Pas de repos pour l'inspecteur 13

Pas de repos pour l’inspecteur 13,
Les deux policiers attendirent qu’elle se calmât pour la bombarder de questions tout azimut. Elle s’appelait Amélie NOROIT, âgée de vingt ans et étudiante à la faculté de Poitiers en licence de droit et sciences sociales. Elle fréquentait Alexandre depuis trois ans : ils avaient projeté de se marier en fin d’année universitaire. Ils avaient même trouvé un petit appartement qu’ils avaient commencé à emménager. Le bail avait été signé entre les parties depuis deux mois déjà. Mais ils s’étaient disputés violemment la veille de sa disparition. Soudainement, Alexandre voulut tout annuler, ne plus se marier avec elle. Il avait trouvé quelqu’un d’autre, lui dit-il. Amélie était furieuse et désarçonnée par cette nouvelle qu’elle n’avait pas vu venir. Il lui avait semblé un peu plus distant et silencieux qu’auparavant mais elle avait mis cette attitude sur le compte de ses études et des problèmes de déménagements à venir. Ils s’étaient quittés sur cette querelle d’amoureux en se donnant néanmoins rendez-vous le lendemain. Et elle ne l’avait pas revu depuis. Et maintenant, en voyant la photo de Mélanie, elle repensait à son envie de rompre d’avec elle. Elle était persuadée que la nouvelle copine d’Alexandre était cette jeune fille, aperçue plusieurs fois devant le portail de l’université. Ce n’était certes pas dû au hasard et ceci corroborait parfaitement avec les témoignages des adolescents. Ainsi donc, ce serait juste une fugue amoureuse entre les deux jeunes gens. Mais pourquoi ne pas en avoir informé les parents de Mélanie, pourquoi avoir choisi cette escapade ? Pourquoi avoir laissé courir la rumeur d’un enlèvement et mobilisé tous les gendarmes de la région à leur recherche ? Alexandre, brillant étudiant, ne se doutait-il pas qu’il était en porte-à-faux avec les lois en partant avec une jeune mineure ? Les policiers se devaient d’en savoir plus sur cette fuite et décidèrent de convoquer les parents de la jeune mineure.
Ils libérèrent Amélie et la rassurèrent comme ils le purent. Ils se quittèrent sur une poignée de main de part et d’autre et les policiers repartirent au commissariat.
En attendant les parents de Mélanie, ils s’octroyèrent un petit noir très serré accompagné de quelques friandises du pays. Les nouveaux éléments en leur possession semblaient tenir la route. Il était peut-être temps de faire cesser le plan alerte enlèvement qui devenait inutile et de libérer la ville de tout ce tintamarre médiatique et policier. Le commissaire repartit faire un tour sur Facebook voir les nouveaux posts et en découvrit deux fort intéressants : deux témoins disaient avoir aperçu Alexandre et Mélanie près d’Angoulins. Le commissaire connaissait l’histoire de cette villa. Il y avait près d'un demi-siècle que la villa Les Platères, construite sur le modèle des maisons basques, était à l'abandon dans ce quartier calme d'Angoulins, un demi-siècle que les gamins du quartier jouaient à se faire peur en y scrutant la pénombre, au travers de la porte d'entrée en lambeaux. Cette porte mystérieuse que des ados plus audacieux poussaient régulièrement pour transgresser la notion de propriété. Ainsi donc les jeunes amants avaient-ils peut-être élu domicile dans cette maison en ruines : c’était à vérifier sur le champ et il passa quelques coups de fils à la brigade cynophile pour aller y faire un tour.
Sur ces réflexions, les parents d’Amélie arrivèrent et le commissaire les reçut avec délicatesse et grande considération. Les questions qu’il avait à leur poser risquaient de les bousculer un peu. Il n’était pas facile d’apprendre à des parents de mineurs la fugue de leur enfant pour des raisons sentimentales dont ils en ignoraient toute l’histoire apparemment. Il les fit assoir en face de lui et commença par leur montrer les photos d’Alexandre. Oui, il leur semblait l’avoir aperçu dans leur rue, deux ou trois fois mais ils n’y avaient pas prêté grand cas : c’était un passant comme un autre. Ils le reconnaissaient à son piercing et son tatouage sur le bras. Alors le commissaire leur dévoila les aboutissants de son enquête mais ils ne voulurent rien savoir. Ce n’était pas possible : leur petite fille était posée, avait trouvé son avenir dans le mannequinat et n’avait pas de petit ami. Elle était brillante collégienne et n’aurait pour rien au monde raté ses séances de photos prévues dans les jours à venir qu’il lui tenait tant à cœur. Cela leur paraissait inconcevable. Ils ne croyaient pas du tout à une escapade amoureuse avec un garçon plus âgé qu’elle. ..
Lucienne le 31.03.2016