Sale histoire pour l’inspecteur 11

Sale histoire pour l’inspecteur 11
-Quoi, quoi, allez, ne me faites pas poireauter, je n’ai plus  que quelques heures de garde à vue, dites-moi ce que vous avez trouvé, qu’on en finisse !
- D’après l’interprétation des résultats, nous pouvons affirmer sans risque d’erreur  que Mademoiselle Aurore Delplanque est la fille biologique de Madame Magnat et que Monsieur Zend était aussi son fils. Pour être sûr à cent pour cent, nous avons procédé à un test de demi - fraternité et il s’est révélé positif.  Par contre, il n’y a aucun lien avec l’époux assassiné. Nous n’avons trouvé aucune trace de compatibilité. Voilà, Inspecteur, nos recherches sont finies : à vous de jouer !
Tenez, nos collègues nous ont transmis les résultats des empreintes digitales, palmaires et des chaussures : elles correspondent à celles des prévenus et des victimes. Aucune autre empreinte suspecte n’est ressortie de leur analyse. Ils n’ont pas eu de visiteurs ce soir-là. »
L’inspecteur était assommé par cette nouvelle : il s’attendait à tout sauf à ça.
Mais son enquête avait fait un bond en avant : restait à démontrer et à obtenir des aveux.
Tout en repartant à son bureau, il réfléchissait. Il s’était déjà renseigné sur le parricide pour une affaire précédente.  Les psychiatres interrogés à l’époque  lui avaient expliqué les tenants et aboutissants qui amenaient les enfants à tuer leurs parents. Mais les avis divergeaient.
Les actes de parricide sont souvent perpétrés par des personnes normales. On ne tue pas sa famille sans raison et il y a des cas qui ne rentrent pas dans les tableaux classiques de psychiatrie. La survenue du passage à l’acte est brusque jusqu’à l’acharnement féroce et c’était le cas pour ses victimes. Il y avait forcément des facteurs explicatifs, un terrain propice. Ils ont dû se retrouver dans une impasse existentielle. En gommant la filiation, le crime réalisait un fantasme fou, celui de l’auto-engendrement comme pour exister.
Après un tel acte, il n’est pas rare de constater un retour à la raison voire un calme étrange.
Ce que ne comprenait pas tout à fait l’inspecteur, c’était l’absence de renseignements de cette maternité dans son dossier. Les victimes étaient très connues pour n’avoir pas d’enfants. Ils étaient originaires du village et personne, parmi les voisins ou les plus proches parents, n’avaient vu Madame Magnat enceinte, qui plus est par deux fois : alors, comment avait-elle pu les cacher et pourquoi ? Aurait-elle fait un déni de grossesse ? Il lui fallait éclaircir ce dilemme.
Il s’installa à son bureau, sortit sa fiole de bourbon. Constatant qu’elle était vide, il pesta et se rabattit sur une bière. Il regarda l’heure à la pendule : il était déjà quatorze heures ! Il ingurgita vite un encas suivi d’un énième café, compulsa de nouveau son dossier avec les nouvelles données : il était grand temps de cuisiner les deux prévenus avant de les inculper pour matricide.
Il répondit au téléphone qui sonnait depuis un bon quart d’heure : c’était le Procureur qui venait aux nouvelles et qui le pressait dans son enquête …
Lucienne le 28.12.2015