Un petit coin de campagne pour l'inspecteur 8

Un petit coin de campagne pour l’inspecteur 8,
En attendant l’arrivée du présumé coupable, il s’octroya une petite promenade. La frontière suisse n’était pas si loin à vol d’oiseau. Mais en voiture, il fallait compter au moins quatre heures plus le temps que la machine administrative et judiciaire se mette en branle, il avait encore quelques belles heures devant lui à tuer. Il sortit prendre l’air ! Le soleil était enfin au rendez-vous et le parc de la maison d’hôte était suffisamment espacé pour y perdre une heure ou deux. Il put ainsi visiter le jardin potager de légumes anciens, la culture des plantes aromatiques, le petit parc arboricole, le verger ainsi que les magnifiques massifs de fleurs essaimés par ci par là : c’était une véritable pépinière de splendides spécimens de plantes, d’herbes et de légumes en tous genres, le tout judicieusement agencé dans une parfaite harmonie de formes et de couleurs. Les parfums se mêlaient pour le plus grand bonheur des hôtes de ce gîte verdoyant et luxuriant. Chaque espèce était répertoriée et légendée par de petits panneaux et l’inspecteur adorait se ressourcer ainsi dans la verte campagne, loin de la ville et du béton, des fonds sonores et de la pollution. Il y avait même des petits bancs en bois pour se reposer et de superbes tonnelles recouvertes de vigne vierge pour s’y ombrager, ce qu’il ne manqua pas de faire.
Il put ainsi réfléchir à son enquête qui commençait à prendre belle tournure. Bien sûr, les analyses d’ADN n’avait rien apporté de positif, les indices trouvés dans la décharge se révélaient être insuffisants et il n’avait aucune identité fiable pour la victime : il lui fallait s’armer de patience et attendre l’interrogatoire du sieur KAFI. Tout dépendait maintenant de son témoignage ou de ses aveux. Il aimerait beaucoup savoir aussi qui était la petite fille révélée par la serveuse, son rôle dans l’affaire et le rapport qu’elle put avoir avec la victime et le présumé coupable. Il en était là de ses supputations quand son portable sonna. C’était un appel de l’hôtel de police : le témoin était dans leurs murs et l’inspecteur devait s’y rendre le plus rapidement possible. Enfin il allait savoir, tout du moins en connaître un peu plus, sur cette affaire peu ordinaire. Pour l’interrogatoire, il se ferait assister de l’officier de police local pour qu’il n’y eut ni dysfonctionnement ni bavure !
Le commissaire de police lui dépêcha une estafette pour le récupérer et l’amener à l’hôtel de police : il était déjà dix-neuf heures. Occupé par ses pensées, l’inspecteur n’avait pas vu le temps passer.
L’audition du prévenu se passerait dans le bureau de l’officier municipal : la pièce était assez conséquente pour contenir l’inculpé, l’inspecteur, le commissaire et quelques hommes de main en cas de grabuge.
Il lui faudrait agir avec prudence : il devait canaliser les propos de son interlocuteur sans en rompre le cours. La moindre précipitation, la moindre intrusion venue du dehors serait susceptibles de la détruire irrémédiablement. Aucun interrogatoire ne ressemblait à un autre et l’inspecteur, en vieux routier de la criminelle, le savait. Comme il savait également qu’une confession extorquée par la violence ou la contrainte ne signifiait rien. Il n’y avait pas de succès hors le droit et l’honnêteté de conscience. D’ailleurs les aveux n’avaient de valeur que s’ils étaient circonstanciés, c’est-à-dire si le présumé coupable donnait des précisions que seul l’auteur de l’assassinat fut à même de connaître : la description exacte des lieux, la manière dont les faits s’étaient déroulés …L’aveu était un moment crucial dans le processus d’enquête. Le policier qui interrogeait devait faire preuve de souplesse dans son approche ; il devait être tenace sans être rigide, tout en étant neutre et psychologiquement flexible pour adapter son style de travail. Ceci étant très clair dans la tête de l’inspecteur, l’interrogatoire pouvait enfin commencer…
Lucienne le 02.03.2016