La clepsydre et le rouet - sonnet alterné -

Sonnet inspiré par le lied « Gretchen am Spinnrade » (Marguerite au rouet ) de Franz Schubert – D188 – D’après un poème de Goethe extrait de Faust




De la clepsydre choit l’ultime gouttelette,
Le fil du temps trop long retord mon désarroi.
Ô ne point redouter que chute la navette
Faisant sans fin les tours me séparant de toi.

Tu es si loin là-bas, crois bien, je le regrette.
Dès la pointe du jour c’est celui que je guette
Où je pourrai tisser au doux chant de ta voix.

La roue de l’heur se grippe. Or, dès qu’à toi je pense,
Ourdissent mes fuseaux de délicats serments,
Des dentelles de mots dont ton fil est l’essence,
Entrelacs de sourires et de baisers d’amants.

La clepsydre poursuit le cours de l’existence,
Le rouet l’accompagne à la même cadence.
Ainsi passent les jours tandis que je t’attends.

Le texte de Goethe :

Gretchen am Spinnrade

Meine Ruh ist hin,
Mein Herz ist schwer;
Ich finde sie nimmer
Und nimmermehr.

Wo ich ihn nicht hab,
Ist mir das Grab,
Die ganze Welt
Ist mir vergällt.

Mein armer Kopf
Ist mir verrückt,
Mein armer Sinn
Ist mir zerstückt.

Meine Ruh ist hin,
Mein Herz ist schwer;
Ich finde sie nimmer
Und nimmermehr.

Nach ihm nur schau ich
Zum Fenster hinaus,
Nach ihm nur geh ich
Aus dem Haus.

Sein hoher Gang,
Sein edle Gestalt,
Seines Mundes Lächeln.
Seiner Augen Gewalt,

Und seiner Rede
Zauberfluß,
Sein Händedruck,
Und ach sein Kuß!

Meine Ruh ist hin,
Mein Herz ist schwer;
Ich finde sie nimmer
Und nimmermehr.

Mein Busen drängt
Sich nach ihm hin.
Ach dürft ich fassen
Und halten ihn,

Und küssen ihn,
So wie ich wollt,
An seinen Küssen
Vergehen sollt!

Johann Wolfgang von Goethe (1749 - 1832)

***

Et la traduction qu'en fit Gérard de Nerval :

Chambre de Marguerite

Une amoureuse flamme
Consume mes beaux jours;
Ah ! la paix de mon âme
A donc fui pour toujours!

Son départ, son absence,
Sont pour moi le cercueil;
Et loin de sa présence
Tout me paraît en deuil.

Alors, ma pauvre tête
Se dérange bientôt;
Mon faible esprit s'arrête,
Puis se glace aussitôt.

Une amoureuse flamme
Consume mes beaux jours;
Ah! la paix de mon âme
A donc fui pour toujours!

Je suis à ma fenêtre,
Ou dehors, tout le jour
C'est pour le voir paraître,
Ou hâter son retour.

Sa marche que j'admire,
Son port si gracieux,
Sa bouche au doux sourire,
Le charme de ses yeux ;

La voix enchanteresse
Dont il sait m'embraser,
De sa main la caresse,
Hélas! et son baiser...

D'une amoureuse flamme
Consument mes beaux jours ;
Ah! la paix de mon âme
A donc fui pour toujours!

Mon cœur bat et se presse,
Dès qu'il le sent venir;
Au gré de ma tendresse
Puis-je le retenir?

O caresses de flamme!
Que je voudrais un jour
Voir s'exhaler mon âme
Dans ses baisers d'amour!

Gérard de Nerval (1808 - 1855)

Et si je te disais mon cher Momo que non seulement je ne perds pas la langue de Goethe, mais qu'en plus j'ai terriblement peur de finir par oublier -ou malmener- celle de Molière. C'est pour cela que je m'efforce de lire et écrire des poèmes rigoureusement ficelés...
Je suis heureuse de voir que tu es le premier à te risquer sur mon terrain complètement à la renverse et plein de gens bizarres..  

C’est vrai, j’admets : Goethe + Schubert + Nerval + Abado + Faust

Tout ce monde rassemblé
Dans un sonnet tourneboulé
C’est un peu exagéré
Je ne le ferai plus, juré !
Pour me faire pardonner,
Voici en guise de pousse-café
Cette jolie chanson d’Isabelle Aubret
C’est tout tendre et léger…


Bisous, mon clown au grand coeur
Bonne écoute

Un beau travail Amarante ayant su traduire en de beaux vers la musique de Schubert, le poème de Goethe sous la pensée de Nerval pour que ton inspiration et belle imagination nous en offre ta propre pensée en un beau poème....une écriture musicale par un quatuor !!!

Flamme a écrit:

Un beau travail Amarante ayant su traduire en de beaux vers la musique de Schubert, le poème de Goethe sous la pensée de Nerval pour que ton inspiration et belle imagination nous en offre ta propre pensée en un beau poème....une écriture musicale par un quatuor !!!

Plus qu'un travail c'est toujours un plaisir pour moi que d'imaginer une histoire sur un morceau de musique classique que j'aime.
Je dois avoir comme cela une trentaine de poèmes tous plus variés les uns que les autres à distiller au fil de l'humeur et des saisons.

Amicalement


Bravo pour les belles photos de votre rencontre à Marseille. Cela fait rêver ! Ah, si je n'habitais pas si loin, sûr que je serais venue vous rejoindre !

Le même morceau joué "a voce" par un des plus grands pianistes au monde.

Ces lignes bien codées ont franchi le mur du son...

Les nuages prévenus se sont écartés et Phébus en personne frappe à mes volets...

Le doux bruit de la houle m'attire vers le large...

Je vais aller voir si la sirène est au rendez-vous

Bravo pour cet ensemble chargé d'émotions et non des motions..

Bien à toi
Tonin

Un message codé pour signaler, en musique et paroles, que l'ambiance très (trop) calme aurait bien besoin de quelques histoires au parfum d'aventure..

Je te souhaite bon vent et bonne inspiration..
Mais fais attention aux sirènes enjoleuses, cramponne-toi à ton calame, tel Ulysse au mât, et écris-nous de beaux poèmes dont tu as le secret.

Bonne journée Tonin
Bien à toi