André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: L'euphonie (Prosodie) Mer 22 Avr - 19:36 | |
| PETIT LEXIQUE POÉTIQUE
L'EUPHONIE Les racines grecques de ce mot sont "eu" (bien) et "phône" (son) que l'on retrouve dans de nombreux composés français, jusqu'au téléphone. L'euphonie cherche à rendre le plus mélodieux possible ce qu'on écrit, ce que l'on dit.
L'euphonie est particulièrement nécessaire à la poésie.
Certaines règles traditionnelles de la versification n'ont plus de raison d'être aujourd'hui (ainsi le "E" muet non prononcé après une voyelles tonique à la fin d'un mot ne devait pas se trouver devant une consonne : La pluie tombe n'était pas admis). Mais aujourd'hui seule l'oreille doit juger de l'euphonie. C'est la raison essentielle qui fait bannir l'hiatus.
L'euphonie est spontanément recherchée en français, même par l'adjonction de consonnes grammaticalement inutiles mais nécessaires pour satisfaire l'oreille : Va-t-en, Donnes-en, et l'on arrive enfin. Ces lettres sans fonction grammaticales sont dites "explétives".
L'euphonie refuse donc le plus possible la rencontre de deux voyelles de deux mots différents (qu'on tolère dans un même mot : [i]aérien ). Elle peut naître de l'emploi discret de l'allitération ou de l'assonance. L'uphonie est particulièrement sensible dans les vers de certains poètes (RACINE, VERLAINE, APOLLINAIRE, par exemple).
MON RÊVE FAMILIER
Je fais souvent ce rêce étrange et pénétrant, D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime, Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Paul VERLAINE
Les phonéticiens estiment que la disposition des voyelles à l'intérieur d'un vers et leur combinaison avec les consonnes concourent à l'euphonie.
Mais il entre une grande part de la subjectivité de l'auditeur dans le reconnaissance de l'euphonie, comme si chacun avait ses sons préférés. Cependant, certains poètes sont plus attentifs que d'autres à cette espèce de fluidité qui rend la poésie proche de la mélodie, comme Charles d'ORLEANS, André CHÉNIER, Paul VALÉRY, René Gy CADOU.
LA JEUNE TARENTINE
Elles est au sein des flots, la jeune Tarentine. Son beau corps a roulé sous la vague marine. Thétis, les yeux en pleurs, dans le creux d'un rocher Aux monstres dévorants eut soin de la cacher.
André CHÉNIER
L'euphonie suppose la connaissance des conventions de la versification, de la mesure et de la diction, y compris des liaisons entre les mots essentiels en français. Il faut savoir, par exemple, que dans le fragment de poème ci-dessus la liaison corps a roulé se fait du "R" de corps au "A", et non pas avec le "S" comme le font de prétentieux semi-lettrés, notamment à la radio, avec des mots comme toujours, amours, etc.
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