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 Paradoxe poétique (exercice de style)

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AuteurMessage
André Laugier

André Laugier


Messages : 7157
Date d'inscription : 25/01/2015
Age : 82
Localisation : Marseille

Paradoxe poétique  (exercice de style) Empty
MessageSujet: Paradoxe poétique (exercice de style)   Paradoxe poétique  (exercice de style) EmptyVen 11 Jan - 11:01

Paradoxe poétique  (exercice de style) La-force-du-paradoxe-strategie



L'oxymore désigne, en rhétorique, une "ingénieuse alliance de mots contradictoires", forme d'antithèse qui unit en un syntagme deux termes en principe contradictoires. Le plus connu est celui de CORNEILLE dans "Le Cid" : "Cette obscure clarté qui tombe des étoiles."


PARADOXE POÉTIQUE

Je suis la main de fer dans un gant de velours ;
Celui qui, lentement, soudainement s'agite,
Et peut faire payer l'insolence gratuite
A ceux qui, sombrement, éclairent mon parcours.

D'un clair-obscur devine au mieux que je ne vois,
Une lueur d'espoir dans un espace d'ombre:
Ce douloureux bonheur qui me hante, parfois,
De courage et de peur que je chiffre en grand nombre.

Je suis ange et démon, dérisoire grandeur,
Qui oublie le mépris que le coeur me rappelle,
Quand du mal c'est le bien qui use ma rancoeur,
Et l'espace d'un temps, maintes fois, m'ensorcelle.

Silence assourdissant de fougueuse torpeur,
Je vis le doux-amer d'un désert solitaire ;
Pour me donner bravoure au germe de frayeur,
Dans mon rêve éveillé je prie pour mieux me taire.

Peut-être alors verrai-je d'un regard moins flou
Les secrets dévoilés de mes rires funèbres ;
Qu'au tombeau de ma vie ce n'était qu'un iglou
Qui glaçait ma gaieté convulsive aux ténèbres.

Mes amis ces quatrains, plaisanterie atroce,
Charmants et sépulcraux, affectés à souhait,
M'ont beaucoup amusé par leur humour féroce,
Car rien de tout cela n'a toujours été vrai !

Dans le raisonnement d'une absurde logique,
De mots si naturels et désorganisés,
Oh non, bien sûr, mes vers n'ont pour effet magique
Qu'un mutisme éloquent pour n'être récusés.

Mes idées épuisées, renouvelées sans cesse
Au pire et au meilleur, en cet instant présent,
Me donnent le sourire: "Ah! oui je le confesse",
Et j’en pleure de joie : plaisir n'est déplaisant.

Dans la réalité de mon imaginaire
Les mots se bousculent dans un ordre courtois,
Et je fais un aveu afin de ne point taire
Qu'un dit "Membre discret" paillarde quelques fois.

Si dans mon absolu flotte un air équivoque,
Bien peu me coûte, en fait, la cherté de l'humour,
Au tumulte des mots chuchote ce qui choque,
Dans la fraîcheur des vers flambe le calembour.

Brillant des feux obscurs d'alliances de mots,
Cette antithèse oppose en un désir d'approche
Conquête aux mots croisés : contrainte à l'Oulipo,
D'effets d'acrobatie, mais précis, sans reproche.

Si factice est le fond, réelle est l'oxymore ;
L'hermétisme, souvent, peut en être perçu ;
S'il occulte ou bouscule, en la forme il colore
L'alchimie d'un écrit en un lato sensu.

Et tous ces jeux de mots, en leur vieille jeunesse,
Un tantinet féconds et à l'humour rageur,
Plaident un aigre-doux en propos, en finesse,
Où la grandeur du verbe est broyée par l'ampleur

Emphatique et ornée de vérité trompeuse...
Apparence, souvent, d'une réalité
Où termes amusants et pensée sérieuse,
Donnent la vraisemblance à l'incrédulité.

Je poursuis donc mes mots et dans ce fort silence,
Où l'inaudible bruit du stylo au papier,
Cause d'un cœur léger et lourd de conséquence
M'octroie de noircir mes nuits blanches : phrasier.

Et je regarde absent, sans jamais trop le voir,
Le texte accumulé qui remplit bien ma feuille ;
Je force avec douceur l'oxymore au pouvoir
D'un sourire posé autant que je le veuille.

Ces mots en trompe-l'œil, mais concrets à la fois,
Forgés d'un premier jet, qui n'est que secondaire,
Dans un songe éveillé me procurent parfois
Un plaisir suffisant : de quoi me satisfaire.

Si ces vers surprenants, curieux à souhait,
Où mes oxymorons, nombreux, restent uniques :
Tourbillon immobile où notre humour français,
Dans la sage folie les dotent d'airs comiques,

C'est au hasard des mots qu'ils sont sélectionnés.
Réalisme rêveur à en mourir de rire
Où, comme au chant muet, ils sont acoquinés
D'invisibles splendeurs nées d'un pince-sans-rire.

Si mes précisions sont approximatives,
Une sage folie me hâte lentement
Pour tout avérer faux : ces perles objectives
Sont un pieux mensonge au silence éloquent.

Ces mètres sont partis pour demeurer longtemps…
Quel ange diabolique, en un seul choix possible,
Au feu glacé des mots – gentiment provocants -,
Me pousse à les écrire en les ayant pour cible ?

Mutisme assourdissant de douce violence ;
Monstrueuse beauté, trouble simplicité ;
Aurai-je dû choisir une voix du silence
Quand l'urgence d'attendre a un temps limité ?

Ma jovialité que je me veux sévère,
Et ma force tranquille en la chasse des mots,
Ne sont profonds talents, ni génie ordinaire,
Mais d'une rigueur floue, et rien de plus normaux.

Ces quatrains composés de fausses vérités,
Ne sont que bouts-rimés d'illusions réelles :
Un carcan libéral où les énormités,
Coquettes et menues sont sages et rebelles,

Font désordre régnant comme en toute logique.
Si la légèreté est pesante à former,
L'affabulation réaliste est magique :
D'invisibles splendeurs peuvent s'y costumer.

D'un ordonné fouillis, un illustre inconnu
Peut donner à ses vers souriante grimace ;
Si je suis de ceux-là ce n'est pas saugrenu :
Sérieux en gaieté, je suis humble en audace.

ANDRÉ



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