PRESTIDIGITATION ET POÉTIQUE
Au commencement…
Il y avait de la magie dans le monde. Il y avait la magie du jour et de la nuit, du printemps et de l’hiver, des bourgeons s’épanouissant en fleurs, des premiers grains dont les tiges vertes perçaient la terre inviolée, des rivières coulant vers la mer. Il y avait la poésie des rythmes et de l’harmonie de la Nature., des mers et des continents inviolés. Une poésie primitive, simple, originelle. La poésie de la création, la poésie de Dieu.
Il y avait la magie des vents et des nuages et des marées qui vivaient et se déplaçaient commandés par le tonnerre de dieux inconnus.
Il y avait la magie de la naissance et de la vie et l’inquiétante, impénétrable magie de la mort. Mais aussi la poésie de la naissance obscure des espèces, du jour et de la nuit, de l’espace et du temps. Prémices de l’expression artistique dans les soubassements, plus tard, de l’intelligence humaine. Une poésie aux dimensions de l’univers.
Et pour les premiers humains qui étaient descendus des arbres des premiers âges pour se tapir dans des cavernes malgré de longues nuits de terreur, tout était de la magie. Une partie constituée de bonne magie blanche, mais principalement de mauvaise magie noire. Les vents dans les arbres étaient les voix d’esprits malins ; les démons parcouraient les collines jusqu’à l’aube, et dans l’obscurité extérieure on entendait les gémissements des fantômes sortis de leurs tombaux.
Aussi, s’adressaient-ils à leur prêtres et sorciers qui opposaient des charmes et des incantations magiques contre les terreurs de la mort et de l’obscurité, du tonnerre et des éclairs, du sang et de la destruction et fabriquaient des talismans grossiers et des amulettes pour apaiser les dieux inconnus afin qu’un fardeau trop lourd de peur et de chagrin ne soit imposé sur la tribu. Ces incantations chantées ou récitées n’étaient-elles pas la préfiguration, dans ces réflexes, de sensibilités extéroceptives, donnant naissance à une unité distinctive minimale, qui est la base du phonème. Tout commencement est magique, tout balbutiement est embryon de poésie.
Cela était au commencement. Les âges farouches, en quelque sorte.
On peut dire que le premier tour de prestidigitation fut exécuté par une femme. C’était au Paradis terrestre lorsque, présentant une pomme à Adam, Eve lui dit : « Pêche. ». (De toute façon, il n’avait pas le choix)
L’apparition des premières formes de l’écriture nous permet de sortir du domaine des conjectures, en nous apportant des témoignages sur les manifestations antiques de la magie et de la magie simulée.
Le plus ancien document ayant trait à la magie, parvenu à notre connaissance, est un papyrus découvert en 1839 par une Anglaise, miss WESTCAR, relatant des évènements fabuleux qui se seraient déroulés en Égypte pendant une période de temps s’étalant de la IIIème à la Vème dynastie (2 .778 à 2. 423 ans avant notre ère). Il comporte douze pages.
Ayant été écrit sous la XIIème dynastie, longtemps après les faits mentionnés, il n’a certainement pas échappé à l’embellissement légendaire dû à l’usure des temps.
Un égyptologue renommé, Adolf ERMAN, a réussi à le traduire. Il décrit les merveilles exécutées par le sorcier UBA-ORNER pour le roi NEBKA (IIIème dynastie) qui avait pétri un petit crocodile en cire qu’il jeta dans l’eau du Nil. La statuette s’anima et protégea des autres sauriens le roi NEBKA lorsqu’il se baignait. Quand on reprenait le petit fétiche en main, il redevenait cire.
Les livres saints, la mythologie sont prolixes de relations de manifestations miraculeuses dont je ne retiendrai que celles faisant appel à un trucage évident, dans cet exposé, et qui, concrètement nous intéresse, puisqu’il s’agit de magie blanche. Cette magie remonte à la nuit des temps.
Aux environs de THÈBES, la statue de MEMNON, fils de TITHON et de l’AURORE, faisait entendre des sons mélodieux lorsque les rayons du soleil levant venaient la frapper, comme si le fameux personnage des légendes de l’antiquité avait voulu saluer l’apparition de sa mère, pendant que les oiseaux battaient des ailes et parlaient d’une voix humaine.
Dans une île de l’archipel turc, la tête parlante de LESBOS conseillait une foule de pèlerins venus la consulter. À ÉLEUSIS, le temple dédié à la blonde CÉRÈS, où l’on célébrait des mystères renommés dans toute la Grèce, possédait un plancher mécanisé (déjà pour l’époque) donnant des ondulations semblables à celles des vagues de l’océan ; lorsque s’allumait le feu de l’autel, des portes s’ouvraient mystérieusement et se refermaient à la fin du sacrifice.
On retrouve semblable mécanisation dans les mouvements imprimés aux statues d’ANTIUM, dans la Rome antique, au pigeon du bois d’ARCHYTUS.
Dans l’île d’ANDREAS, une fontaine donnait du vin pendant 7 jours de l’année, alors que dans la ville d’ÉLIS trois urnes se remplissaient miraculeusement de vin pendant les fêtes de BACCHUS.
Lors de la célébration de l’office en son honneur, la statue de CYBÈLE, fille du ciel, déesse de la terre, donnait du lait en abondance par ses multiples seins nourriciers.
Plusieurs auteurs anciens nous ont donné la description détaillée des astuces et des trucages employés dans les temples païens.
Le plus vieil accessoire truqué qui nous soit parvenu est certainement ce vase magique du IVème siècle avant J.C qui se trouve actuellement au Musée ALLARD-PIERSON, à AMSTERDAM, et qui grâce à de nombreuses cloisons savamment élaborées, permettait de verser en grande quantité de liquides colorés différents.
Et les siècles passèrent.
Beaucoup plus tard, le Père Kircher, jésuite allemand, reprenant les travaux d’HERON D’ALEXANDRIE sur les trucages mécaniques des anciens, fit construite une reproduction fidèle de l’autel de CYBÈLE. Il se composait d’un dôme hémisphérique creux, supporté par 4 colonnes et clos hermétiquement par une plaque de métal. Sous ce kiosque « magique » se trouvait un autel surmonté d’une vasque qui servait de socle à la statue de la déesse aux seins multiples. Aux deux colonnes antérieures étaient fixés des lampadaires mobiles. Et c’est là que se situait le trucage. L’autel était garni de lait et communiquait par un tube avec l’intérieur de la statue. Un autre tube à double courbe – notez-le bien – pénétrait dans le dôme creux.
Lorsqu’on allumait les lampes, en tournant le bras des lampadaires, l’air enfermé dans le dôme se dilatait sous l’influence de la chaleur, pressait le lait contenu dans l’autel et le faisait monter par le tube droit jusque dans l’intérieur de la statue, à hauteur des seins.
Une série de petits conduits, savamment élaborés, entre lesquels se déversait le tube principal, conduisait le lait jusqu’aux seins, desquels il jaillissait. Lorsque le feu s’éteignait, les fontaines, tout naturellement, se tarissaient.
Voilà un exemple de l’ingéniosité de ces illustres devanciers dont on ne peut que saluer le génie dans l’imagination au service du trucage.
Je ne m’attarderai pas sur les réflexions de PLAUTE qui fut le premier à faire allusion à la magie, en tant qu’art théâtral et en qualifiant les faiseurs de prestiges : LES PRAESTIGIATORES, sans nous apporter d’autres précisions sur leur répertoire.
Ajoutons, cependant, que les Grecs et les Romains étaient très friands de ces spectacles devenus incontournables, et que le grammairien ATHENAEUS s’est plaint que l’on mette les inventions mécaniques au-dessus de la culture, comme ce fut le cas avec l’escamoteur POTHINUS qui se produisait sur cette même scène sur laquelle on jouait des pièces d’EURIPIDE.
Ces bribes d’Histoire, ou de petite histoire, ne nous apportent guère de renseignements sur la technique de nos ancêtres escamoteurs. Il semble bien, cependant, que la base essentielle de leur répertoire, venue du fond des âges, ait été ce que l’historien grec PLUTARQUE qualifie, dans sa « MORALE SUR L’INCONSTANCE DES ORACLES » d’ACETABULARI pour qualifier les joueurs de muscades et de gobelets. Ces artistes se produisaient dans les résidences des princes ou en se montrant sur les théâtres, comme DIODORUS et SILICUS, deux magiciens célèbres en leur temps.
Que devient là poésie, entre temps. J’ai fait référence, brièvement à PLAUTE qui fut le premier à s’intéresser aux « dons » des PRAESTIGIATORES, PLAUTE qui était un poète comique, auteur de cent trente pièces, comme « Amphitryon », « Aulularia » ou encore « le soldat fanfaron », et dont ses personnages annoncent déjà une forme poétique proche de la « Commedia dell’arte ». PLUTARQUE, qui fait partie du Collège sacerdotal des Delphes, ne cessa, outre sa passion pour les mystifications des ACETABULARI, d’exercer ses monumentaux ouvrages.
Mais bien avant lui, ALEXANDRE III de Macédoine dit le GRAND (356 – 323 avant J.C) celui qui fut l’élève d’Aristote, le conquérant de la Perse et de la Syrie, soumit le Moyen-Orient et incendia Persépolis pour un sourire de Thaïs, sa favorite, est celui qui, bien involontairement, donne son nom à l’alexandrin. On peut même trouver un poète de la Pléiade d’Alexandrie nommé ALEXANDRE l’Etolien.
Ce ne fut que quatorze siècles après la mort du Grand ALEXANDRE qu’apparut timidement, dans le sud de notre pays, au début du XIIème siècle, le premier ouvrage romanesque consacré aux exploits de ce grand conquérant. Ce n’était pas une épopée, comme « La chanson de Roland », mais une narration en vers destinée, non à être chantée, mais à être lue à haute voix.
Seuls nous sont parvenus 105 « vers de 8 syllabes » écrits en franco-provençal par un certain Alexandre d’ALBÉRIC (ou de Briançon).
Quelques années plus tard, vers 1170, un poète anonyme du Poitou, composera, sur le thème de l’enfance d’ALEXANDRE, 785 vers de 10 syllabes. Ces textes seront ensuite fondus à l’intérieur d’un ouvrage de haute ambition : « Le roman d’Alexandre » écrit par ALEXANDRE (encore !) de PARIS soit : 16 000 vers de 12 syllabes rimés. Nous y voici donc ! L’alexandrin vient de naître à la fin de ce XIIème siècle. Il va devenir au fil des siècles, le vers noble par excellence.
Poésie et Magie ont donc eu un parcours similaire.
Mais faisons encore un bond immense dans le temps. L’histoire, la politique et la magie ont été parfois étroitement liées. Le plus célèbre de nos illusionnistes, celui dont le nom restera à jamais gravé dans les mémoires des profanes, comme des magiciens amateurs et initiés, celui dont le génie révolutionna la profession et qui fut le premier à se débarrasser des habits affectés, précieux et alambiqués des prestidigitateurs, au profit d’un personnage élégant et d’une grande sobriété de gestes, et évoluant dans un faire valoir de talent et de modernité en habit de soirée, est sans conteste, ROBERT-HOUDIN.
Fils d’horloger, Jean Eugène naquit à BLOIS le 7 décembre 1805. Son père le destinait au notariat. Mais le jeune ROBERT était attiré invinciblement par la mécanique. Dès la fin de ses études, il eut l’opportunité de rencontrer un célèbre escamoteur italien TORRINI, comte de GRISY, qui lui enseigna les rudiments de la prestidigitation. .
Son génie inventif lui permit de sortir de l’impasse. Il imagina et mit au point un réveille-matin original, appelé « réveil-briquet » parce qu’une bougie allumée sortait d’une boite en même temps que la sonnerie retentissait, donnant ainsi la lumière dès le réveil. Ce fut sa planche de salut. Cette invention connut une telle vogue qu’il fallut embaucher des ouvriers. Grâce à l’argent récolté, il put se consacrer à la confection de nouveaux automates. Parmi les plus célèbres : « le joueur de gobelets », « le danseur de corde », « les oiseaux chantants ». C’est là qu’il mit au point pour le compte d’un riche marchand de Saint Pétersbourg son automate « Le rossignol » ainsi que « l’Ecrivain-dessinateur. »
L’exposition universelle de 1844 apporta à l’habile mécanicien une médaille d’argent pour ses outils, ses pièces d’horlogerie et ses automates, félicité par Louis-Philippe accompagné du Comte de Paris.
La même année, il réalisa le rêve de sa vie, affronter le public dans son propre théâtre. Le fameux théâtre des Soirées Fantastiques, un peu à l’image du Cabaret du Chat Noir consacré aux écrivains et aux Poètes.
En véritable homme du monde, vêtu à la dernière mode, en habit noir, gilet brodé, jabot de dentelles, le verbe agréable et correct, n’hésitant pas à placer quelques quatrains de son inspiration dans sa prestation, unissant la grâce du geste au charme de la parole, il évoluait avec aisance sur une scène coquette, sobrement décorée dans le plus pur style LOUIS XV. L’ouverture officielle de son théâtre eut lieu le jeudi 3 juillet 1845. En 1852 Jean Eugène ROBERT HOUDIN céda son théâtre à l’illusionniste HAMILTON, fatigué par ses multiples voyages et par un succès dépassant ses espérances. Il se reposait désormais dans son manoir à BLOIS.
Cependant, un matin de juin 1856, une lettre venait troubler la quiétude du solitaire, plongé depuis quelques temps sur les applications pratiques de l’électricité. Il fut le premier a avoir imaginé la lampe à filament.
Le ministère de la guerre lui demandait de se rendre en Algérie pour y donner une série de représentations, devant les principaux chefs et marabouts dissidents qui prêchaient la révolte contre les occupants français.
ROBERT-HOUDIN débarqua en Algérie sur la terre africaine en plein soulèvement Kabyle.
Ses représentations commencèrent devant les cheiks, les agas (officiers et caïds) tandis que des interprètes traduisaient les paroles du sorcier roumi.
Très psychologue, celui-ci avait compris qu’il ne s’agissait plus pour lui de distraire et d’amuser, mais de frapper les imaginations.
Un marabout le mit au défi de charger une arme en lui disant qu’il tirerait ensuite sur lui. En ajoutant qu’il ne risquerait rien puisqu’il était grand magicien.
Il était bien sûr, impossible d’opérer dans ces conditions sans risquer la mort, mais refuser c’était perdre la face.
Grâce à une astuce, ROBERT-HOUDIN gagna un délai de quelques heures. Le lendemain la foule était nombreuse et passionnée.
Le marabout mit lui-même la charge de poudre et bourra. Parmi les balles apportées, deux furent choisies que le magicien mit ostensiblement dans les pistolets. Puis vint le moment solennel. Le marabout visa la poitrine de ROBERT-HOUDIN debout à quinze pas. Le coup partit et aussitôt la balle apparût entre les dents du magicien. Son rival, irrité, se précipite sur le second pistolet. Mais ROBERT-HOUDIN le devance et s’en empare.
-« Tu n’as pu parvenir à me blesser, lui dit-il ; tu vas juger maintenant si mes coups sont plus redoutables que les tiens. Regarde ce mur… »
Au coup de feu, une large tache de sang apparut sur la muraille blanche. Les assistants étaient stupéfaits et terrifiés. Ce miracle décupla le prestige du sorcier français et fortifia la croyance dans son essence surnaturelle. Voilà comment commença la colonisation de l’Algérie. Grâce à un illusionniste. Le général DESVAUD écrivit plus tard : « -Les deux hommes qui ont fait le plus pour la pacification de l’Algérie sont JULES GERARD, le tueur de lions et surtout ROBERT-HOUDIN, le prestidigitateur ».
ROBERT-HOUDIN, spécialiste des effets à grand spectacle, était également un fin manipulateur de cartes. Beaucoup de ses techniques sont encore utilisées par les magiciens d’aujourd’hui. Le fait qu’elles aient résisté à l’usure du temps, démontre leur valeur qui ne s’est jamais démentie. Et on peut parier, que de nombreuses futures générations d’illusionnistes s’en serviront avec autant de succès et de mystère auprès du public au fil des siècles tant l’ingéniosité de ses créations n’a pris et ne prendra aucune ride. Le monde change, les modes et les mentalités aussi. Mais le génie demeure. N’est-ce pas Victor HUGO qui avait dit : - « Un sonnet sans défauts vaut seul un long poème. » C’est aussi vrai de nos jours qu’à l’époque de Clément MAROT. En poésie le sonnet est la seule forme littéraire à forme fixe, dont les règles strictes sont respectées, alors que la poésie moderne s’est libérée quelque peu du carcan imposé par les classiques, avec la poésie libérée ou ultra libérée.
ROBERT-HOUDIN, à l’image de cet exemple, est à la fois le RONSARD et le Victor HUGO de la prestidigitation. Il a donné l’excellence à la beauté. Il ne faut pas oublier que de grands poètes ont été magiciens, et des magiciens de talentueux poètes.
Certains, parmi vous, ignorent sans doute que VERLAINE, Paul VALÉRY, VOLTAIRE, Jean COCTEAU étaient des amateurs éclairés de tours de cartes et ont fréquenté les cercles pourtant très fermés des confréries de magiciens.
Les magiciens CONRADI, LATAPIE, ROBERT-HOUDIN, ainsi que de nombreux artistes professionnels du XXIème siècle, écrivirent ( et écrivent) en poésie et l’interprètent même dans leurs numéros pour accompagner leurs effets.
Le fameux cabaret du « Chat Noir » créé au début des années 1880, par Rodolphe SALIS associé à Émile GOUDEAU, et où se regroupaient les poètes décadents, à Montmartre, était le lieu de rencontre par excellence de l’élite de la rhétorique, mais où l’on assistait aussi à des tours de close-up et de prestidigitation ou s’illustrèrent VERLAINE et MALLARMÉ, entre autres, le tout dans une verve drolatique, variée, contrastée, à la recherche d’un idéal artistique et littéraire libéré des contraintes de tout préjugé et des dogmes ciblés.
L’alcool et l’ambiance, la magie des lieux, une gaie anarchie de styles et d’idées, une mode flattée, lourde ou fleurie : le « Chat noir », c’était un peu et tout ça à la fois. Le rêve, la Magie, la poésie.
Jean COCTEAU, homme de lettres avant-gardiste, d’inspiration futuriste, qui a écrit à ses débuts « La lampe d’Aladin », un recueil de vers d’un tour classique, a même composé un poème libre à la gloire des magiciens :
- « Hommes aux mille mains, je vous salue. N’êtes-vous pas représentatifs de ce temps et de cet espace qui se mélangent pour nous tromper et nous opposent leurs murs innombrables ?
Hommes aux mille mains ce que vous faites croire est plus réel que le réel qui est un rêve.
Car dans cette partie vous tenez le rôle du sort et du mystère. Vos mensonges nous émerveillent davantage que notre pauvre vérité.
Hommes aux mille mains je forme des vœux pour que votre art se lègue, parce qu’il s’adresse à ce que le monde conserve en lui de meilleur : l’enfance. »Orson WELLES disait :
« La magie consiste en une légitimation de l’art de s’amuser solennellement avec des jouets, avec tous les plaisirs solitaires, visuels et tactiles caractéristiques de la prime enfance. »La prestidigitation se subdivise en plusieurs catégories. Il y a la magie de scène, les grandes illusions, la zoomagie, la manipulation scénique, le close-up, la micromagie, la cartomagie. Il y a aussi les arts annexes comme la ventriloquie, l’ombromanie, le modelage sur ballons, etc…
La cartomagie est à l’illusionnisme ce que la manipulation est à l’Art de la scène. C’est-à-dire le fleuron, puisque sa discipline est entièrement basée sur la dextérité.
On aime ou on n’aime pas les cartes. Mais on ne peut rester insensible à la diversité des miracles que l’on peut faire avec ces 52 petits morceaux de cartons rectangulaires. Les cartes seraient d’origine sarrasine et seraient arrivées en Europe, venues de l’Orient. En date de 1376, il est prouvé que pour la première fois, de façon irréfutable, on jouait aux cartes. Grâce à elles on peut aussi apprendre les mathématiques et la science héraldique. Enfin, on dit même qu’elles pourraient prédire l’avenir. C’est du moins ce que certains affirment, mais que réfutent bien entendu les magiciens à l’esprit plus cartésien.
La magie des cartes est certainement celle qui a le plus évolué au cours des siècles. Elles sont peu encombrantes ; on les trouve pratiquement partout, et elles captivent réellement les spectateurs car se crée un contact, une sorte de complicité dans la convivialité entre l’artiste et son auditoire. Mais leur manipulation exige beaucoup de travail, un entraînement permanent, et ne doit souffrir d’aucune faiblesse. La création d’un tour n’est limitée qu’à l’imagination de son concepteur.La magie comme la poésie font appel à ce qu’il y a d’essentiel dans l’homme : la sensibilité et l’esprit de création.
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« La Magie est la poésie du geste tandis que la Poésie est la magie des mots ». Laugier André)N’est-ce point STENDHAL qui écrivait :
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« Peut-être, sans cette exaltation de la sensibilité nerveuse qui va jusqu’à la folie, n’y a-t-il pas de génie supérieur dans les arts qui exigent de la tendresse ». (Extrait de mes conférences sur « Similitude de la Poétique et de l’Art Magique).