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| Les plus beaux poèmes sur les animaux. | |
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Auteur | Message |
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Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 1 Déc - 8:00 | |
| Le poème de Paul Fort a été mis en chanson et j'ai reconnu l'air, l'histoire triste est fort joli ! J'aime la fable de La fontaine montrant combien nos animaux sont intelligents et rusés. Le poème est court et raconte fort bien l'histoire ! | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 2 Déc - 17:53 | |
| Pierre de RONSARD
La grenouille Pierre de Ronsard
Nous t’estimons une Déesse, Gente Grenouille, qui sans cesse Au fonds des ruisselets herbeux Te desalteres quand tu veux, Et jamais la soif vehemente Qui l’esté les gorges tourmente Du pauvre peuple et des grands Rois, Ne te tourmente ; car tu bois (Hé Dieu ! que je porte d’envie Aux felicitez de ta vie !) A gorge ouverte sous les eaux Comme la Royne des ruisseaux. Quand tu es sur la rive herbue Aux rais du soleil estendue, Que tu es aise, si un beuf Passe par là mourant de seuf ; Tu enfles contre la grand’beste Si fort les veines de la teste, Et coaces d’un si haut bruit, Que de crainte le beuf s’enfuit, Toy demeurant, sur l’herbe espesse, Des ondes la seule maistresse. En ton royaume le Serpent Te combat, mais il se repent Tout sus l’heure de t’avoir prise, Car tu luy tiens la teste mise Si long temps au fond du ruisseau, Que tu l’estouffes dessous l’eau. Le Laboureur à ta venüe, Joyeux de ton chant, te salüe Comme profete du Printemps ; Ores tu predis le beau temps, ________________
Alfred DE VIGNY
LA MORT DU LOUP
Les nuages couraient sur la lune enflammée Comme sur l’incendie on voit fuir la fumée, Et les bois étaient noirs jusques à l’horizon. Nous marchions, sans parler, dans l’humide gazon, Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes, Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des landes, Nous avons aperçu les grands ongles marqués Par les loups voyageurs que nous avions traqués. Nous avons écouté, retenant notre haleine Et le pas suspendu. — Ni le bois ni la plaine Ne poussaient un soupir dans les airs ; seulement La girouette en deuil criait au firmament ; Car le vent, élevé bien au-dessus des terres, N’effleurait de ses pieds que les tours solitaires, Et les chênes d’en bas, contre les rocs penchés, Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés. Rien ne bruissait donc, lorsque, baissant la tête, Le plus vieux des chasseurs qui s’étaient mis en quête A regardé le sable en s’y couchant ; bientôt, Lui que jamais ici l’on ne vit en défaut, A déclaré tout bas que ces marques récentes Annonçaient la démarche et les griffes puissantes De deux grands loups-cerviers et de deux louveteaux. Nous avons tous alors préparé nos couteaux, Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches, Nous allions pas à pas en écartant les branches. Trois s’arrêtent, et moi, cherchant ce qu’ils voyaient, J’aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient, Et je vois au-delà quatre formes légères Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères, Comme font chaque jour, à grand bruit sous nos yeux, Quand le maître revient, les lévriers joyeux. Leur forme était semblable et semblable la danse ; Mais les enfants du Loup se jouaient en silence, Sachant bien qu’à deux pas, ne dormant qu’à demi, Se couche dans ses murs l’homme leur ennemi. Le père était debout, et plus loin, contre un arbre, Sa Louve reposait comme celle de marbre Qu’adoraient les Romains, et dont les flancs velus Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus. Le Loup vient et s’assied, les deux jambes dressées, Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées. Il s’est jugé perdu, puisqu’il était surpris, Sa retraite coupée et tous ses chemins pris ;
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante, Du chien le plus hardi la gorge pantelante, Et n’a pas desserré ses mâchoires de fer, Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair, Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles, Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles, Jusqu’au dernier moment où le chien étranglé, Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé. Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde. Les couteaux lui restaient au flanc jusqu’à la garde, Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang, Nos fusils l’entouraient en sinistre croissant. Il nous regarde encore, ensuite il se recouche, Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche, Et, sans daigner savoir comment il a péri, Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.
II
J’ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre, Me prenant à penser, et n’ai pu me résoudre À poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois, Avaient voulu l’attendre, et, comme je le crois, Sans ses deux louveteaux, la belle et sombre veuve Ne l’eût pas laissé seul subir la grande épreuve ; Mais son devoir était de les sauver, afin De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim, À ne jamais entrer dans le pacte des villes Que l’homme a fait avec les animaux serviles Qui chassent devant lui, pour avoir le coucher, Les premiers possesseurs du bois et du rocher.
III
Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d’Hommes, Que j’ai honte de nous, débiles que nous sommes ! Comment on doit quitter la vie et tous ses maux, C’est vous qui le savez, sublimes animaux ! À voir ce que l’on fut sur terre et ce qu’on laisse, Seul, le silence est grand ; tout le reste est faiblesse. — Ah ! je t’ai bien compris, sauvage voyageur, Et ton dernier regard m’est allé jusqu’au cœur ! Il disait : « Si tu peux, fais que ton âme arrive, À force de rester studieuse et pensive, Jusqu’à ce haut degré de stoïque fierté Où, naissant dans les bois, j’ai tout d’abord monté. Gémir, pleurer, prier, est également lâche. Fais énergiquement ta longue et lourde tâche Dans la voie où le sort a voulu t’appeler, Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. » _________________
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| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 2 Déc - 23:15 | |
| Je préfère et de loin Vigny que je connais bien, Ronsard est trop précieux, manque de simplicité, surtout avec les mots en vieux Français ! Merci André, on va en connaitre des poèmes sur les animaux et grâce à tes découvertes ! | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Sam 3 Déc - 12:12 | |
| - Flamme a écrit:
- Je préfère et de loin Vigny que je connais bien, Ronsard est trop précieux, manque de simplicité, surtout avec les mots en vieux Français !
Merci André, on va en connaitre des poèmes sur les animaux et grâce à tes découvertes !
Bonjour FLAMME,
J'ai pensé adapter en français moderne le poème de RONSARD. Certains mots, cependant, posaient problème, difficilement remplaçables avec un équivalent, ou rendant la rime différente. Sans compter, aussi, le nombre de syllabes qui ne correspondaient plus. Je pense que malgré ces expressions anciennes, il est possible de suivre le poème, sans trop de difficulté. Mais, tu as raison, le fait de chercher et de faire un rapprochement avec notre langue actuelle, casse le rythme de la lecture. Et puis, il y a cette "préciosité" qui n'est pas sans donner un côté "apprêté" au texte.
BEAUCOUP pour tes mots d'appréciation ainsi que pour le vif intérêt que tu portes à cette poésie animale.
Excellent week-end à vous deux.
NOS PLUS AFFECTUEUX À TOUTES LES DEUX.
CARPE DIEM
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Lun 5 Déc - 12:54 | |
| Victor HUGO
EN ECOUTANT LES OISEAUX
Oh ! Quand donc aurez-vous fini, petits oiseaux, De jaser au milieu des branches et des eaux, Que nous nous expliquions et que je vous querelle ? Rouge-gorge, verdier, fauvette, tourterelle, Oiseaux, je vous entends, je vous connais. Sachez Que je ne suis pas dupe, ô doux ténors cachés, De votre mélodie et de votre langage. Celle que j'aime est loin et pense à moi ; je gage, O rossignol dont l'hymne, exquis et gracieux, Donne un frémissement à l'astre dans les cieux, Que ce que tu dis là, c'est le chant de son âme. Vous guettez les soupirs de l'homme et de la femme, Oiseaux ; Quand nous aimons et quand nous triomphons, Quand notre être, tout bas, s'exhale en chants profonds, Vous, attentifs, parmi les bois inaccessibles, Vous saisissez au vol ces strophes invisibles, Et vous les répétez tout haut, comme de vous ; Et vous mêlez, pour rendre encor l'hymne plus doux, A la chanson des coeurs, le battement des ailes ; Si bien qu'on vous admire, écouteurs infidèles, Et que le noir sapin murmure aux vieux tilleuls : « Sont-ils charmants d'avoir trouvé cela tout seuls ! » Et que l'eau, palpitant sous le chant qui l'effleure, Baise avec un sanglot le beau saule qui pleure ; Et que le dur tronc d'arbre a des airs attendris ; Et que l'épervier rêve, oubliant la perdrix ; Et que les loups s'en vont songer auprès des louves ! « Divin ! » dit le hibou ; le moineau dit : « Tu trouves ? » Amour, lorsqu'en nos coeurs tu te réfugias, L'oiseau vint y puiser ; ce sont ces plagiats, Ces chants qu'un rossignol, belles, prend sur vos bouches, Qui font que les grands bois courbent leurs fronts farouches, Et que les lourds rochers, stupides et ravis, Se penchent, les laissant piller le chènevis, Et ne distinguent plus, dans leurs rêves étranges, La langue des oiseaux de la langue des anges. __________________
LECONTE DE LISLE
LA MORT DU LION
Étant un vieux chasseur altéré de grand air Et du sang noir des bœufs, il avait l'habitude De contempler de haut les plaines et la mer, Et de rugir en paix, libre en sa solitude. Aussi, comme un damné qui rôde dans l'enfer, Pour l'inepte plaisir de cette multitude Il allait et venait dans sa cage de fer, Heurtant les deux cloisons avec sa tête rude. L'horrible sort, enfin, ne devant plus changer, Il cessa brusquement de boire et de manger, Et la mort emporta son âme vagabonde. Ô coeur toujours en proie à la rébellion, Qui tournes, haletant, dans la cage du monde, Lâche, que ne fais-tu comme a fait ce lion ? __________________
Anatole FRANCE
LA MORT DU SINGE
Dans la serre vitrée où de rigides plantes, Filles d'une jeune île et d'un lointain soleil, Sous un ciel toujours gris, sommeillant sans réveil, Dressent leurs dards aigus et leurs floraisons lentes,
Lui, tremblant, secoué par la fièvre et la toux, Tordant son triste corps sous des lambeaux de laine, Entre ses longues dents pousse une rauque haleine Et sur son sein velu croise ses longs bras roux.
Ses yeux, vides de crainte et vides d'espérance, Entre eux et chaque chose ignorent tout lien ; Ils sont empreints, ces yeux qui ne regardent rien, De la douceur que donne aux brutes la souffrance.
Ses membres presque humains sont brûlants et frileux ; Ses lèvres en s'ouvrant découvrent les gencives ; Et, comme il va mourir, ses paumes convulsives Ont caché pour jamais ses pouces musculeux.
Mais voici qu'il a vu le soleil disparaître Derrière les huniers assemblés dans le port ; Il l'a vu : son front bas se ride sous l'effort Qu'il tente brusquement pour rassembler son être.
Songe-t-il que, parmi ses frères forestiers, Alors qu'un chaud soleil descendait des cieux calmes, Repu du lait des noix et couché sur les palmes, Il s'endormait heureux dans ses frais cocotiers,
Avant qu'un grand navire, allant vers des mers froides, L'emportât au milieu des clameurs des marins, Pour qu'un jour, dans le vent, qui lui mordît les reins, La toile, au long des mâts, glaçât ses membres roides ?
À cause de la fièvre aux souvenirs vibrants Et du jeûne qui donne aux âmes l'allégeance, Grâce à cette suprême et brève intelligence Qui s'allume si claire au cerveau des mourants,
Ce muet héritier d'une race stupide D'un rêve unique emplit ses esprits exaltés : Il voit les bons soleils de ses jeunes étés, Il abreuve ses yeux de leur flamme limpide.
Puis une vague nuit pèse en son crâne épais. Laissant tomber sa nuque et ses lourdes mâchoires, Il râle. Autour de lui croissent les ombres noires : Minuit, l'heure où l'on meurt, lui versera la paix. __________________
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 9 Déc - 19:49 | |
| Jean RICHEPIN
TRISTESSE DES BÊTES
Le soleil est tombé derrière la forêt. Dans le ciel, qu'un couchant rose et vert décorait, Brille encore un grenat au faîte d'une branche. La lune, à l'opposé, montre sa corne blanche. Vers les puits, dont l'eau coule aux rigoles de bois, C'est l'heure où les barbets avec de grands abois Font, devant le berger lourd sous sa gibecière, Se hâter les brebis dans des flots de poussière. Les bêtes, les oiseaux des champs, sont au repos. Seuls, le long du chemin, compagnons des troupeaux, Sautant de motte en motte après la mouche bleue, On entend pépier les brusques hoche-queue. Puis ils s'en vont aussi. La nuit de plus en plus Monte, noyant dans l'ombre épaisse le talus Les grillons plaintifs chantent leur bucolique En couplets alternés d'un ton mélancolique. Sous la brise du soir les herbes, les buissons, Palpitent, secoués de douloureux frissons, Et semblent chuchoter de noires confidences. A ce ronron lugubre accordant ses cadences, Le vieux berger, qui souffle en ses pipeaux faussés, Fait pâmer les crapauds râlant dans les fossés. Or, le bélier pensif baisse plus bas ses cornes ; Les brebis, se serrant, ouvrent de grands yeux mornes ; Et les chiens en hurlant s'arrêtent pour s'asseoir.
Oh ! vous avez raison d'être tristes, le soir ! Elle a raison, berger, ta chanson monotone Qui pleure. Il a raison, l'animal qui s'étonne De l'ombre épouvantable et de la nuit sans fond. Hélas ! l'ombre et la nuit, sait-on ce qu'elles font ? Sait-on quel oeil vous guette et quel bras vous menace Dans cette chose noire ? Ah ! la nuit ! C'est la nasse Que la Mort tous les soirs tend par où nous passons, Et qui tous les matins est pleine de poissons.
Vive le bon soleil ! Sa lumière est sacrée. Vive le clair soleil ! Car c'est lui seul qui crée. C'est lui qui verse l'or au calice des fleurs, Et fait les diamants de la rosée en pleurs ; C'est lui qui donne à mars ses bourgeons d'émeraude, A mai son frais parfum qui par les brises rôde, A juin son souffle ardent qui chante dans les blés, A l'automne jauni ses cieux roux et troublés ; C'est lui qui pour chauffer nos corps froids en décembre Unit au bois flambant les vins de pourpre et d'ambre ; C'est lui l'ami magique au sourire enchanté Qui rend la joie à ceux qui pleurent, la santé Aux malades ; c'est lui, vainqueur des défaillances, Qui nourrit les espoirs, ranime les vaillances ; C'est lui qui met du sang dans nos veines ; c'est lui Qui dans les yeux charmants des femmes dort et luit ; C'est lui qui de ses feux par l'amour nous enivre ; Et quand il n'est pas là, j'ai peur de ne plus vivre.
Vous comprenez cela, vous, bêtes, n'est-ce pas ? Puisque, le soir venu, ralentissant le pas, Dans votre âme, par l'homme oublieux abolie, Vous sentez je ne sais quelle mélancolie. __________________
Alphonse LAMARTINE
VERS À MON CHARDONNERET
Toi dont mon seul regard faisait frissonner l’aile, Qui m’égayait par ton babil, Hélas ! te voilà sourd à ma voix qui t’appelle, Cher oiseau ! la saison cruelle De ta vie a tranché le fil !
Ne crains pas que l’oubli chez les morts t’accompagne, O toi le plus doux des oiseaux ! Tu fus pendant six ans ma fidèle compagne, Oubliant pour moi la campagne, Ta mère et ton nid de roseaux !
Moi je fus avec toi si vite accoutumée ! Nos jeux étaient mon seul loisir ; Lorsque tu me voyais dans ma chambre enfermée Tu chantais. À ta voix aimée Mon ennui devenait plaisir !
Que ne peux-tu savoir combien je te regrette ! Hélas ! ce fut à pareil jour Que tu vins par ton vol égayer ma chambrette Où maintenant je te regrette Seule sous cette ombre d’amour ! __________________
Jules SUPERVIELLE
MOUVEMENT
Ce cheval qui tourna la tête Vit ce que nul n’a jamais vu Puis il continua de paître À l’ombre des eucalyptus.
Ce n’était ni homme ni arbre Ce n’était pas une jument Ni même un souvenir de vent Qui s’exerçait sur du feuillage.
C’était ce qu’un autre cheval, Vingt mille siècles avant lui, Ayant soudain tourné la tête Aperçut à cette heure-ci.
Et ce que nul ne reverra Homme, cheval, poisson, insecte, Jusqu’à ce que le sol ne soit Que le reste d’une statue Sans bras, sans jambes et sans tête. __________________
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| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Sam 10 Déc - 18:20 | |
| On sent l'amour des animaux, cher nos chers poètes !!! ce matin sur Antenne 2 nous avons entendu que le peuple allemand s'occupe des animaux et de leur maltraitance avec plus de 80 % de la population ! les Anglais de même, et bien d'autres pays ...Nous sommes à la traîne ..hélas ! merci André de nous faire connaitre des vers plein de tendresse et de sensibilité sur nos compagnons ! | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mer 14 Déc - 18:37 | |
| VOLTAIRE
LE LOUP MORALISTE
Un loup, à ce que dit l’histoire, Voulut donner un jour des leçons à son fils, Et lui graver dans la mémoire, Pour être honnête loup, de beaux et bons avis. « Mon fils, lui disait-il, dans ce désert sauvage, A l’ombre des forêts vous passez vos jours ; Vous pourrez cependant avec de petits ours Goûter les doux plaisirs qu’on permet à votre âge. Contentez-vous du peu que j’amasse pour vous, Point de larcin : menez une innocente vie ; Point de mauvaise compagnie ; Choisissez pour amis les plus honnêtes loups ; Ne vous démentez point, soyez toujours le même ; Ne satisfaites point vos appétits gloutons : Mon fils, jeûnez plutôt l’avent et le carême, Que de sucer le sang des malheureux moutons ; Car enfin, quelle barbarie, Quels crimes ont commis ces innocents agneaux ? Au reste, vous savez qu’il y va de la vie : D’énormes chiens défendent les troupeaux. Hélas ! Je m’en souviens, un jour votre grand-père Pour apaiser sa faim entra dans un hameau. Dès qu’on s’en aperçut : O bête carnassière ! Au loup ! s’écria-t-on ; l’un s’arme d’un hoyau, L’autre prend une fourche ; et mon père eût beau faire, Hélas ! Il y laissa sa peau : De sa témérité ce fut le salaire. Sois sage à ses dépens, ne suis que la vertu, Et ne sois point battant, de peur d’être battu. Si tu m’aimes, déteste un crime que j’abhorre. » Le petit vit alors dans la gueule du loup De la laine, et du sang qui dégouttait encore : Il se mit à rire à ce coup. « Comment, petit fripon, dit le loup en colère, Comment, vous riez des avis Que vous donne ici votre père ? Tu seras un vaurien, va, je te le prédis : Quoi ! Se moquer déjà d’un conseil salutaire ! » L’autre répondit en riant : « Votre exemple est un bon garant ; Mon père, je ferai ce que je vous vois faire. » Tel un prédicateur sortant d’un bon repas Monte dévotement en chaire, Et vient, bien fourré, gros et gras, Prêcher contre la bonne chère. __________________
Charles-Marie LECONTE DE LISLE
L'INCANTATION DU LOUP
Les lourds rameaux neigeux du mélèze et de l'aune. Un grand silence. Un ciel étincelant d'hiver. Le Roi du Hartz, assis sur ses jarrets de fer, Regarde resplendir la lune large et jaune.
Les gorges, les vallons, les forêts et les rocs Dorment inertement sous leur blême suaire, Et la face terrestre est comme un ossuaire Immense, cave ou plat, ou bossué par blocs.
Tandis qu'éblouissent les horizons funèbres, Le lune, oeil d'or glacé, luit dans le morne azur, L'angoisse du vieux Loup étreint son coeur obscur, Un âpre frisson court le long de ses vertèbres.
Sa louve blanche, aux yeux flambants, et les petits Qu'elle abritait, la nuit, des poils chauds de son ventre, Gisent, morts, égorgés par l'homme, au fond de l'antre. Ceux de tous les vivants, qu'ils aimait, sont partis.
Il est seul désormais sur le neige livide. La faim, la soif, l'affût patient dans les bois, Le doux agneau qui bêle ou le cerf aux abois, Que lui fait tout cela, puisque le monde est vide ?
Lui, le chef du haut Hartz, tous l'ont trahi, le Nain Et le géant, le Bouc, l'Orfraie et la Sorcière, Accroupis près du feu de tourbe et de bruyère Où l'eau sinistre bout dans le chaudron d'airain.
Sa langue fume et pend de la gueule profonde. Sans lécher le sang noir qui s'égoutte du flanc, Il érige sa tête aiguë en grommelant, Et la haine, dans ses entrailles, brûle et gronde.
L'homme, le massacreur antique des aïeux, De ses enfants et de la royale femelle Qui leur servait le lait ardent de sa mamelle, Hante immuablement son rêve furieux.
Une braise rougit sa prunelle énergique; Et, redressant ses poils roides comme des clous, Il évoque, en hurlant, l'âme des anciens loups Qui dorment dans la lune éclatante et magique. __________________
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| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mer 14 Déc - 20:07 | |
| Voltaire s'est lancé dans la fable ...je le trouve fort bon !!! Bonne soirée André, et bisous à vous 3. | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 16 Déc - 12:53 | |
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 16 Déc - 13:00 | |
| Jean-Pierre Claris de FLORIAN (1755-1794)
LE GRILLON
Un pauvre petit grillon Caché dans l'herbe fleurie Regardait un papillon Voltigeant dans la prairie. L'insecte ailé brillait des plus vives couleurs ; L'azur, la pourpre et l'or éclataient sur ses ailes ; Jeune, beau, petit maître, il court de fleurs en fleurs, Prenant et quittant les plus belles. Ah! disait le grillon, que son sort et le mien Sont différents ! Dame nature Pour lui fit tout, et pour moi rien. je n'ai point de talent, encor moins de figure. Nul ne prend garde à moi, l'on m'ignore ici-bas : Autant vaudrait n'exister pas. Comme il parlait, dans la prairie Arrive une troupe d'enfants : Aussitôt les voilà courants Après ce papillon dont ils ont tous envie. Chapeaux, mouchoirs, bonnets, servent à l'attraper ; L'insecte vainement cherche à leur échapper, Il devient bientôt leur conquête. L'un le saisit par l'aile, un autre par le corps ; Un troisième survient, et le prend par la tête : Il ne fallait pas tant d'efforts Pour déchirer la pauvre bête. Oh! oh! dit le grillon, je ne suis plus fâché ; Il en coûte trop cher pour briller dans le monde. Combien je vais aimer ma retraite profonde ! Pour vivre heureux, vivons caché. _________________
Théophile GAUTIER
LE CHANT DU GRILLON
Souffle, bise ! Tombe à flots, pluie ! Dans mon palais, tout noir de suie, Je ris de la pluie et du vent ; En attendant que l'hiver fuie, Je reste au coin du feu, rêvant.
C'est moi qui suis l'esprit de l'âtre ! Le gaz, de sa langue bleuâtre, Lèche plus doucement le bois ; La fumée, en filet d'albâtre, Monte et se contourne à ma voix.
La bouilloire rit et babille ; La flamme aux pieds d'argent sautille En accompagnant ma chanson ; La bûche de duvet s'habille ; La sève bout dans le tison.
Le soufflet au râle asthmatique, Me fait entendre sa musique ; Le tournebroche aux dents d'acier Mêle au concerto domestique Le tic-tac de son balancier.
Les étincelles réjouies, En étoiles épanouies, vont et viennent, croisant dans l'air, Les salamandres éblouies, Au ricanement grêle et clair.
Du fond de ma cellule noire, Quand Berthe vous conte une histoire, Le Chaperon ou l'Oiseau bleu, C'est moi qui soutiens sa mémoire, C'est moi qui fais taire le feu.
J'étouffe le bruit monotone du rouet qui grince et bourdonne ; J'impose silence au matou ; Les heures s'en vont, et personne N'entend le timbre du coucou.
Pendant la nuit et la journée, Je chante sous la cheminée ; Dans mon langage de grillon, J'ai, des rebuts de son aînée, Souvent consolé Cendrillon.
Le renard glapit dans le piège ; Le loup, hurlant de faim, assiège La ferme au milieu des grands bois ; Décembre met, avec sa neige, Des chemises blanches aux toits.
Allons, fagot, pétille et flambe ; Courage, farfadet ingambe, Saute, bondis plus haut encore ; Salamandre, montre ta jambe, Lève, en dansant, ton jupon d'or.
Quel plaisir ! Prolonger sa veille, Regarder la flamme vermeille Prenant à deux bras le tison ; A tous les bruits prêter l'oreille ; Entendre vivre la maison !
Tapi dans sa niche bien chaude, Sentir l'hiver qui pleure et rôde, Tout blême et le nez violet, Tâchant de s'introduire en fraude Par quelque fente du volet.
Souffle, bise ! Tombe à flots, pluie ! Dans mon palais, tout noir de suie, Je ris de la pluie et du vent ; En attendant que l'hiver fuie Je reste au coin du feu, rêvant. _________________
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mer 8 Fév - 12:23 | |
| Amédée POMMIER (1804-1877)
SUR UNE PETITE CHIENNE
Moi qui suis partisan de la métempsychose, Je soupçonne très fort que Coquette, autrefois, Était une marquise à l'agaçant minois, Et rien que son aspect confirmerait la chose.
Observez sa figure et son geste et sa pose, De quel air grande dame on saute aux bons endroits, Comme aux places d'honneur on sent qu'on a des droits, Et comme on porte au cou son nœud de ruban rose !
Si l'on prônait jadis notre beau petit nez, Notre œillade assassine et nos traits chiffonnés, Et notre pied charmant, le plus mignon du globe,
Notre queue aujourd'hui n'est pas moins belle à voir, Ou notre fine patte, ou notre museau noir, Ou le long poil soyeux qui forme notre robe. __________________
Victor HUGO (1802-1885)
À UN HOMME PARTANT POUR LA CHASSE
Oui, l'homme est responsable et rendra compte un jour. Sur cette terre où l'ombre et l'aurore ont leur tour, Sois l'intendant de Dieu, mais l'intendant honnête. Tremble de tout abus de pouvoir sur la bête. Te figures-tu donc être un tel but final Que tu puisses sans peur devenir infernal, Vorace, sensuel, voluptueux, féroce, Échiner le baudet, exténuer la rosse, En lui crevant les yeux engraisser l'ortolan, Et massacrer les bois trois ou quatre fois l'an ? Ce gai chasseur, armant son fusil ou son piège, Confine à l'assassin et touche au sacrilège. Penser, voilà ton but ; vivre, voilà ton droit. Tuer pour jouir, non. Crois-tu donc que ce soit Pour donner meilleur goût à la caille rôtie Que le soleil ajoute une aigrette à l'ortie, Peint la mûre, ou rougit la graine du sorbier ?
Dieu qui fait les oiseaux ne fait pas le gibier. __________________
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| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 9 Fév - 8:38 | |
| Comme il a raison V.Hugo sur ces maudits chasseurs ! le goût de tuer, de se sentir le plus fort !!! On y voit l'imbécilité de l'homme alliée à sa monstruosité ! Pommier a bien décrit quelque petit chien précieux, rendu encore plus ridicule quand on leur met un petit nœud sur la tête !!! Bonne journée André | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 9 Fév - 11:29 | |
| - Flamme a écrit:
- Comme il a raison V.Hugo sur ces maudits chasseurs ! le goût de tuer, de se sentir le plus fort !!! On y voit l'imbécilité de l'homme alliée à sa monstruosité !
Pommier a bien décrit quelque petit chien précieux, rendu encore plus ridicule quand on leur met un petit nœud sur la tête !!! Bonne journée André Bonjour FLAMME,
Je poursuis mes recherches, dans mes ouvrages, concernant la poésie animale ainsi que des textes sur la défenses des animaux. C'est un sujet très médiatique et intéressant, surtout au moment où 3 personnes comparaissent aujourd'hui pour avoir agressé Allain BOUGRAIN-DOUBOURG alors qu'il détruisait des pièges destinés à capturer des pinsons, espèce protégée.
Je suis très heureux que tu sois sensible à la cause animale comme nous le sommes, je pense, une majorité de gens qui désirent que soit mis fin à toutes ces pratiques de braconnages qui ne concernant, hélas, pas que les oiseaux.
pour ta lecture ainsi que ta positive réaction.
Passe une excellente journée et reçois nos plus affectueux
CARPE DIEM
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 9 Fév - 11:32 | |
| Jean SUTRA
CHASSE AU COQ DE BRUYÈRE
Les coqs sont réveillés dans les forêts sauvages ; L'aurore a caressé les flancs des monts rouillés ; Les chasseurs sont déjà dans les grands paysages Qui se coiffent de ciel et de soleil mouillé.
Les chiens couleur d'automne et la narine ouverte Flairent et vont, parmi les hêtres rabougris, Dans la bruyère rose et les myrtilles vertes Où vivent les grands coqs et les lourds perdreaux gris.
Kep se fige, en arrêt, frémissant, sur la cime. Il hume une odeur forte aux fontaines du vent. Un coq bruyant s'enlève et plonge dans l'abîme. Des coups de feu, l'écho ; plus rien ! Plumes et sang !
Jusqu'au soir, les chasseurs traverseront des pentes, Ils ne trouveront pas le bel oiseau. Souvent, Parmi des rocs géants et des brumes mouvantes, — Comme un boulet puissant qui dévale, — l'élan
Emporte le coq mort sur des ailes vivantes. ___________________
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Ven 10 Fév - 11:09 | |
| Madeleine MANSIET-BERTHAUD
DERNIÈRE CHASSE
Il ne fixera plus les ciels figés d'automne Qui posent sur la lande un regard embué, Eclairant les guérets d'une lueur atone Et du frémissement de reflets dilués.
Il ne sifflera plus l'alouette frivole Dans le froid matinal blêmissant le sentier, Lorsque sous le filet d'eau captif s'affole, Ou tremble dans la main qui le tient prisonnier.
Il démonte, pensif, les murs de sa cabane, Comme s'il contemplait pour la dernière fois Les restes de l'amie et fidèle compagne Qui fut depuis toujours témoin de ses exploits.
À regrets le chasseur a plié son bagage, Salué par les cris de l'oiseau migrateur Qui reprend son envol pour un autre voyage, Dans le battement d'ailes d'un frou-frou moqueur. Le vent souffle, emportant la stridence d'un trille... Mélancolique appel vers un exil lointain, Et le vieil homme essuie une larme qui brille, Immobile et pleurant dans le petit matin... __________________
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| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| | | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Sam 11 Fév - 11:07 | |
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Sam 11 Fév - 11:10 | |
| Charles Marie René LECONTE DE LISLE
LA CHASSE DE L’AIGLE
L'aigle noir aux yeux d'or, prince du ciel mongol, Ouvre, dès le premier rayon de l'aube claire, Ses ailes comme un large et sombre parasol.
Un instant immobile, il plane, épie et flaire. Là-bas, au flanc du roc crevassé, ses aiglons Érigent, affamés, leurs cous au bord de l'aire.
Par la steppe sans fin, coteau, plaine et vallons, L'oeil luisant à travers l'épais crin qui l'obstrue, Pâturent, çà et là, des hardes d'étalons.
L'un d'eux, parfois, hennit vers l'aube ; l'autre rue ; Ou quelque autre, tordant la queue, allègrement, Pris de vertige, court dans l'herbe jaune et drue.
La lumière, en un frais et vif pétillement, Croît, s'élance par jet, s'échappe par fusée, Et l'orbe du soleil émerge au firmament.
À l'horizon subtil où bleuit la rosée, Morne dans l'air brillant, l'aigle darde, anxieux, Sa prunelle infaillible et de faim aiguisée.
Mais il n'aperçoit rien qui vole par les cieux, Rien qui surgisse au loin dans la steppe aurorale, Cerf ni daim, ni gazelle aux bonds capricieux.
Il fait claquer son bec avec un âpre râle ; D'un coup d'aile irrité, pour mieux voir de plus haut, Il s'enlève, descend et remonte en spirale.
L'heure passe, l'air brûle. Il a faim. À défaut De gazelle ou de daim, sa proie accoutumée, C'est de la chair, vivante ou morte, qu'il lui faut.
Or, dans sa robe blanche et rase, une fumée Autour de ses naseaux roses et palpitants, Un étalon conduit la hennissante armée.
Quand il jette un appel vers les cieux éclatants, La harde, qui tressaille à sa voix fière et brève, Accourt, l'oreille droite et les longs crins flottants.
L'aigle tombe sur lui comme un sinistre rêve, S'attache au col troué par ses ongles de fer Et plonge son bec courbe au fond des yeux qu'il crève.
Cabré, de ses deux pieds convulsifs battant l'air, Et comme empanaché de la bête vorace, L'étalon fait dans l'ombre ardente de l'enfer.
Le ventre contre l'herbe, il fuit, et, sur sa trace, Ruisselle de l'orbite excave un flux sanglant ; Il fuit, et son bourreau le mange et le harasse.
L'agonie en sueur fait haleter son flanc ; Il renâcle, et secoue, enivré de démence, Cette grande aile ouverte et ce bec aveuglant.
Il franchit, furieux, la solitude immense, S'arrête brusquement, sur ses jarrets ployé, S'abat et se relève et toujours recommence.
Puis, rompu de l'effort en vain multiplié, L'écume aux dents, tirant sa langue blême et rêche, Par la steppe natale il tombe foudroyé.
Là, ses os blanchiront au soleil qui les sèche ; Et le sombre Chasseur des plaines, l'aigle noir, Retourne au nid avec un lambeau de chair fraîche,
Ses petits affamés seront repus ce soir.
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Dim 12 Fév - 18:22 | |
| André LEMOYNE (1822-1907)
LE PAPILLON.
Où t'endors-tu, le soir, pauvre petite abeille, Butineuse des fleurs, qui t'en vas picorant Dès la pointe du jour, quand l'aube se réveille, Jusqu'au dernier rayon du soleil expirant ?
L'ABEILLE.
Sans trop hâter mon vol, c'est à moins d'un quart d'heure Dans le creux d'un vieux chêne, à ma ruche des bois, Juste au pied du grand arbre où, tous les ans, demeure Un couple de ramiers dans son nid d'autrefois.
LE PAPILLON.
Pour tes gâteaux de miel rapidement tu voles... Je te vois disparaître au bord des grands lys blancs, Roulée à corps perdu dans le fond des corolles Qui doivent t'enivrer de leurs parfums troublants ;
Mais j'admire toujours l'active travailleuse, Dont le travail est pur, dont le travail est saint, Faite pour accomplir sa tâche merveilleuse, Dont s'honore à bon droit la reine de l'essaim.
L'ABEILLE.
Toi qui pars en zigzag comme un éclat de foudre, Pourquoi donc ce caprice ?
LE PAPILLON.
Afin que dans son vol Un bec d'oiseau jaseur ne puisse nous découdre. Je ris d'un martinet passant au ras du sol.
Que faites- vous l'hiver ?
L'ABEILLE.
En grappes léthargiques, Sans oreilles, sans yeux, sans entendre, sans voir, Longuement nous rêvons de belles fleurs magiques Dans la ruche bien close où dès lors tout est noir.
LE PAPILLON.
Nous, dans la saison froide et sombre de l'année, Nous n'aimons pas à voir nos grands lys se flétrir ; Notre vie est bien courte, hélas ! mais fortunée. Quand sont mortes les fleurs, nous préférons mourir. ________________
| |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mer 15 Fév - 11:16 | |
| Victor HUGO
LIBERTÉ !
De quel droit mettez-vous des oiseaux dans des cages ? De quel droit ôtez-vous ces chanteurs aux bocages, Aux sources, à l'aurore, à la nuée, aux vents ? De quel droit volez-vous la vie à ces vivants ?
Homme, crois-tu que Dieu, ce père, fasse naître L'aile pour l'accrocher au clou de ta fenêtre ? Ne peux-tu vivre heureux et content sans cela ? Qu'est-ce qu'ils ont donc fait tous ces innocents-là
Pour être au bagne avec leur nid et leur femelle ? Qui sait comment leur sort à notre sort se mêle ? Qui sait si le verdier qu'on dérobe aux rameaux, Qui sait si le malheur qu'on fait aux animaux
Et si la servitude inutile des bêtes Ne se résolvent pas en Nérons sur nos têtes ? Qui sait si le carcan ne sort pas des licous ? Oh ! de nos actions qui sait les contre-coups,
Et quels noirs croisements ont au fond du mystère Tant de choses qu'on fait en riant sur la terre ? Quand vous cadenassez sous un réseau de fer Tous ces buveurs d'azur faits pour s'enivrer d'air,
Tous ces nageurs charmants de la lumière bleue, Chardonneret, pinson, moineau franc, hochequeue, Croyez-vous que le bec sanglant des passereaux Ne touche pas à l'homme en heurtant ces barreaux ?
Prenez garde à la sombre équité. Prenez garde ! Partout où pleure et crie un captif, Dieu regarde. Ne comprenez-vous pas que vous êtes méchants ? À tous ces enfermés donnez la clef des champs !
Aux champs les rossignols, aux champs les hirondelles ; Les âmes expieront tout ce qu'on fait aux ailes. La balance invisible a deux plateaux obscurs. Prenez garde aux cachots dont vous ornez vos murs !
Du treillage aux fils d'or naissent les noires grilles ; La volière sinistre est mère des bastilles. Respect aux doux passants des airs, des prés, des eaux Toute la liberté qu'on prend à des oiseaux
Le destin juste et dur la reprend à des hommes. Nous avons des tyrans parce que nous en sommes. Tu veux être libre, homme ? et de quel droit, ayant Chez toi le détenu, ce témoin effrayant ?
Ce qu'on croit sans défense est défendu par l'ombre. Toute l'immensité sur ce pauvre oiseau sombre Se penche, et te dévoue à l'expiation. Je t'admire, oppresseur, criant : oppression !
Le sort te tient pendant que ta démence brave Ce forçat qui sur toi jette une ombre d'esclave Et la cage qui pend au seuil de ta maison Vit, chante, et fait sortir de terre la prison.
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 16 Fév - 12:35 | |
| Maxime LÉRY
LE CHAT, LE LOUP ET LE CHIEN
Le loup hurlait, vive la liberté! Elle est mon plus bel apanage Et le chien répondait: j'accepte l'esclavage Pour prix de ma sécurité Le chat les écoutait, caché dans le feuillage Il leur dit à mi-voix: “noble loup, pauvre chien Vos façons de juger sont lourdes, Vous ne comprenez rien à rien, En un mot, vous êtes deux gourdes. Songez que moi, le chat, j'ai trouvé le moyen De garder mon indépendance, Et de vivre avec l'homme en bonne intelligence. Il me sert mes repas, il m'apporte mon lait. Si j'autorise une caresse, Je reste indifférent, lointain. Pas de bassesse, Je suis un chat, non un valet.” C'est merveilleux, pensa le loup. En somme, le serviteur du chat, c'est l'homme.
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| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Dim 19 Fév - 21:22 | |
| Maurice ROLLINAT
LA BONNE CHIENNE
Les deux petits jouaient au fond du grand pacage; La nuit les a surpris, une nuit d’un tel noir Qu’ils se tiennent tous deux par la main sans se voir : L’opaque obscurité les enclot dans sa cage.
Que faire ? les brebis qui paissaient en bon nombre, Les chèvres, les cochons, la vache, la jument, Sont égarés ou bien muets pour le moment, Ils ne trahissent plus leur présence dans l’ombre.
Puis, la vague rumeur des mauvaises tempêtes Sourdement fait gronder l’écho. Mais la bonne chienne Margot A rassemblé toutes les têtes Du grand troupeau... si bien que, derrière les bêtes, Chacun des deux petits lui tenant une oreille, Tous les trois, à pas d’escargot, Ils regagnent enfin, là-haut, Le vieux seuil où la maman veille. __________________
Louis AMADE
LES CHIENS PLEURENT AUSSI
Moi je sais que les chiens les chiens pleurent aussi quand ils ont du chagrin que parfois ils se cachent pour souffrir à loisir sans que leur maître sache ni où ils sont ni le grand mal qui les conduit
J'en sais un qui partit au fond d'une forêt pour fuir les longs soupirs de cet enfant malade cet enfant qui jouait avec lui ses chamades et qu'il ne s'en revint que lorsqu'il fut sauvé
Et j'en sais un aussi qui se laissa mourir de faim de désespoir au départ de son maître pour les Terres d'Ailleurs où seules ne pénètrent que les ombres de ceux dont la vie va finir
Mais moi je sais aussi que dans ces Pays Hauts les hommes et les chiens chaque fois se retrouvent sur les vastes prairies quand les portes s'entrouvrent parmi l'immensité des joies et des repos. __________________
| |
| | | fripou Admin
Messages : 3365 Date d'inscription : 17/10/2010 Age : 60 Localisation : Gironde
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mar 21 Fév - 10:40 | |
| Le dernier est une pure beauté... Ces animaux qui savent mieux que quiconque offrir leur coeur sans jamais vouloir le reprendre jusqu'à l'éternité. Merci pour ce partage de sentiments. | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mer 22 Fév - 17:55 | |
| - fripou a écrit:
- Le dernier est une pure beauté... Ces animaux qui savent mieux que quiconque offrir leur coeur sans jamais vouloir le reprendre jusqu'à l'éternité. Merci pour ce partage de sentiments.
Bonsoir FRIPOU,
La fidélité des chiens est divine car elle est spontanée. Elle nous donne confiance, car elle n'est pas changeante.
"Il semble que la nature ait donné le chien à l’homme pour sa défense et pour son plaisir. C’est de tous les animaux le plus fidèle, c’est le meilleur ami que puisse avoir l’homme." Cette belle et intense réflexion est de VOLTAIRE. C’est un fait, l’Homme et le chien font d’excellents amis depuis des millénaires, probablement parce qu’il existe entre les deux espèces un très fort niveau de compréhension. Une étude récente révèle que comme nous, le chien est pourvu d’une région dans son cerveau sensible à la voix, et qu’il sait y interpréter les émotions de l’émetteur, qu’il soit à quatre pattes ou sur deux pieds. Exactement comme l’Homme le fait.
pour l'intérêt que tu portes sur ce topic consacré aux bêtes et, plus particulièrement aux animaux dits de compagnie.
DE GROS DE NOUS TROIS, FRIPOU.
Douce soirée à toutes les deux.
| |
| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 23 Fév - 9:04 | |
| De très beaux poèmes André sur nos amis les chiens. Je vois que Voltaire et bien d'autres poètes savaient apprécier toute la sincérité, l'amour fidèle que les animaux savent donner à l'homme ! Ils n'en reçoivent pas toujours le rendu, il s'en faut !!! Des pays d'Asie, Suisse, Philippines les consomment sans la moindre gêne, les font souffrir, les torturent jusqu'à la mort ! C'est horrible ! L'humain devient de plus en plus inhumain, des monstres nous entourent ! On tue les oies sauvages, on assassine les canards ou on les gave pour quelques minutes de plaisir...et je passe tous ces abattoirs de tortures, et leur vie dans des cages !!! Je hais cette société de pouvoir et d'argent !!! Merci André de nous montrer les belles choses de la vie, qu'il va être difficile de conserver ! | |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 23 Fév - 19:57 | |
| - Flamme a écrit:
- De très beaux poèmes André sur nos amis les chiens. Je vois que Voltaire et bien d'autres poètes savaient apprécier toute la sincérité, l'amour fidèle que les animaux savent donner à l'homme ! Ils n'en reçoivent pas toujours le rendu, il s'en faut !!! Des pays d'Asie, Suisse, Philippines les consomment sans la moindre gêne, les font souffrir, les torturent jusqu'à la mort ! C'est horrible !
L'humain devient de plus en plus inhumain, des monstres nous entourent ! On tue les oies sauvages, on assassine les canards ou on les gave pour quelques minutes de plaisir...et je passe tous ces abattoirs de tortures, et leur vie dans des cages !!! Je hais cette société de pouvoir et d'argent !!! Merci André de nous montrer les belles choses de la vie, qu'il va être difficile de conserver ! Je vais faire en sorte de continuer ce topic en recherchant sur tous les supports qui sont à ma disposition des poèmes émouvants sur nos compagnons à quatre pattes.
Ainsi, le forum va se constituer une véritable anthologie animale.
UN GRAND MERCI POUR TES FIDÈLES ENCOURAGEMENTS, CHÈRE FLAMME.
DE GROS À VOUS DEUX et DOUCE SOIRÉE.
| |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Jeu 23 Fév - 19:58 | |
| Hippolyte TAINE
LE CHAT
Il siège au coin du feu, les paupières mi-closes, Aspirant la chaleur du brasier qui s'éteint; La bouilloire bouillonne avec des bruits d'étain; Le bois flambe, noircit, s'éffile en chardons roses. Le royal exilé prend de sublimes poses; Il allonge son nez sur ses pieds de satin; Il s'endort, il échappe au stupide destin, A l'irrémédiable écroulement des choses.
Les siècles en son cœur ont épaissi leur nuit, Mais au fond de son cœur, inextinguible, luit Comme un flambeau sacré, son rêve héréditaire : Un soir d'or, le déclin empourpré du soleil, Des fûts noirs de palmiers sur l'horizon vermeil, Un grand fleuve qui roule entre deux murs de terre.
| |
| | | André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Lun 27 Fév - 19:55 | |
| René-Guy CADOU
LES AMIS D'ENFANCE
Je me souviens du grand cheval Qui promenait tête et crinière Comme une grappe de lumière Dans la nuit du pays natal.
Qui me dira mon chien inquiet, Ses coups de patte dans la porte, Lui qui prenait pour un gibier Le tourbillon des feuilles mortes.
Maintenant que j’habite en ville Un paysage sans jardins, Je songe à ces anciens matins Tout parfumés de marguerites.
| |
| | | Flamme Admin
Messages : 5250 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 77 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: Les plus beaux poèmes sur les animaux. Mar 28 Fév - 8:25 | |
| Le chat est bien un animal particulier...Taine en parle bien Il s'endort, il échappe au stupide destin, A l'irrémédiable écroulement des choses. En général, il est d'un pur égoïsme, indépendant, et si on lui trouve de l'affection, ce n'est que très rarement ! J'avoue que je ne vois dans le chat que sa beauté et quand il n'est pas obèse !!! Bisous ami André. | |
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