André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: La région Alsace-Lorraine vue par les poètes Lun 4 Juil - 14:26 | |
| LA RÉGION ALSACE-LORRAINE VUE PAR LES POÈTES
(Compilation) Comme tant d'autres génies, comme Beethoven et Mozart, Verlaine mourut seul, il y a soixante ans. Il n'eut même pas la suprême consolation qu'une main aimée fermât ses yeux, comme il l'avait souhaité dans cet admirable poème, rare, que je vous propose, composé à Metz :
VERLAINE
Et j'ai revu l’enfant unique : il m'a semblé Que s'ouvrît dans mon cœur la dernière blessure, Celle dont la douleur plus exquise m'assure D'une mort désirable en un jour consolé. La bonne flèche aiguë et sa fraîcheur qui dure ! En ces instants choisis, elles ont éveillé Les rêves un peu lourds du scrupule ennuyé, Et tout mon sang chrétien chanta la Chanson pure. J'entends encor, je vois encor ! Loi du devoir Si douce ! Enfin je sais ce qu'est entendre et voir, J'entends, je vois toujours ! Voix des bonnes pensées ! Innocence, avenir ! Sage et silencieux, Que je vais vous aimer, vous un instant pressées, Belles petites mains qui fermerez mes yeux ! _________________
VERLAINE
Metz aux campagnes magnifiques Rivières aux ondes prolifiques Coteaux boisés, vignes de feu Cathédrale toute en volutes Où le vent chante sur la flûte Et qui lui répond par la Mutte Cette grosse voix du Bon Dieu. _________________ Charles PÉGUY a fait parler Jeanne d'Arc (née à Domrémy sur la Meuse) dans un vibrant "Adieu à la Meuse", un poème que voici... Cet hommage nous intéresse particulièrement parce qu'il fait référence à la Meuse Lorraine, alors que de nombreuses références littéraires font le plus souvent référence à la Meuse plus en aval vers la Belgique et les Pays Bas.
Charles PÉGUY
Adieu, Meuse endormeuse et douce à mon enfance, Qui demeures aux prés, où tu coules tout bas. Meuse, adieu : j’ai déjà commencé ma partance En des pays nouveaux où tu ne coules pas.
Voici que je m’en vais en des pays nouveaux : Je ferai la bataille et passerai les fleuves ; Je m’en vais m’essayer à de nouveaux travaux, Je m’en vais commencer là-bas les tâches neuves.
Et pendant ce temps-là, Meuse, ignorante et douce, Tu couleras toujours, passante accoutumée, Dans la vallée heureuse où l’herbe vive pousse,
Ô Meuse inépuisable et que j’avais aimée.
Tu couleras toujours dans l’heureuse vallée ; Où tu coulais hier, tu couleras demain. Tu ne sauras jamais la bergère en allée, Qui s’amusait, enfant, à creuser de sa main Des canaux dans la terre, – à jamais écroulés.
La bergère s’en va, délaissant les moutons, Et la fileuse va, délaissant les fuseaux. Voici que je m’en vais loin de tes bonnes eaux, Voici que je m’en vais bien loin de nos maisons.
Meuse qui ne sais rien de la souffrance humaine, Ô Meuse inaltérable et douce à mon enfance, Ô toi qui ne sais pas l’émoi de la partance, Toi qui passes toujours et qui ne pars jamais, Ô toi qui ne sais rien de nos mensonges faux,
Ô Meuse inaltérable, ô Meuse que j’aimais,
Quand reviendrai-je ici filer encor la laine ? Quand verrai-je tes flots qui passent par chez nous ? Quand nous reverrons-nous ? et nous reverrons-nous ?
Meuse que j’aime encore, ô ma Meuse que j’aime… _________________ À l'occasion du « Printemps des poètes » à la MJC Jean-Savine, la ville a rendu hommage à André MARTIN, Grand prix des poètes lorrains 2010 pour son recueil « Symboles vivants ». André MARTIN n’est pas simplement un poète, c’est aussi ce qu’on appelle un homme de bien.
Professeur de latin et de français au collège Louis-Armand pendant 19 ans, il a fait partager son amour de la poésie à ses élèves, notamment, à ceux en difficulté. Il a également beaucoup travaillé pour l’Unicef. Lorrain d’origine, André MARTIN a toujours aimé la littérature, surtout la poésie qu’il a découverte à l’adolescence en lisant « La légende des siècles » de Victor HUGO. Il est resté attaché aux romantiques. Cet héritage marque son œuvre, "avec un respect absolu de la métrique des alexandrins pour arriver à la musique" , explique le poète qui a débuté l'étude du piano à l'heure de la retraite. Et d'ajouter que son but et sa vie étaient "de transmettre le plaisir de la poésie et de la faire découvrir à mes élèves" .
HUGO et les romantiques, ARAGON et les poètes de la résistance, ont la préférence de cet homme humble et discret, qui apprécie par-dessus tout l’aspiration vers un idéal.
Voici quelques exemples de sa poésie :
André MARTIN
JARDIN SECRET L’enclos de mon enfance est un jardin secret : Buisson ardent suave en folle exubérance ; Fruits vermeils élixirs de grandes espérances ; Fleurs bleues de l’innocence au sentier des regrets.
Clowns, jongleurs et soldats, comédiens guillerets, Emules du vrai cirque au ris d’irrévérence, Francs gais lurons ravis, tirent leur révérence Au candide plaisir que leur jeu proférait.
Rideau dans la mémoire enchantée et trop brève D’une scène idéale embellie par le rêve. L’âge a sonné le glas des candeurs de l’enfance.
Jardin secret rêvé dans les parfums d’antan, Refuge maternel des matins triomphants Et des regrets amers vécus à contretemps. _________________
André MARTIN
LORRAIN
Une croix de Lorraine hissée sur la victoire ; Le blason d’un duché d’or et de sang teinté, Dans l’envol fulgurant d’alérions argentés ; Un beau mirabellier, arbre prémonitoire.
Voici de la Lorraine un emblème notoire. L’or rutilant des fruits au blason incrusté, Ailes d’oiseaux et fleurs de même pureté. Glorieux pilier vivant d’un noble territoire.
Migrant venu d’ailleurs en terre d’adoption, Promu lorrain de souche comme être d’exception. Par tous ceux qu’endurcit le climat de rigueur.
Au mois d’août le Lorrain dans sa charpagne* égrène, Sous les mirabelliers enracinés de cœur, Les merveilleux fruits d’or aux couleurs de Lorraine. _________________
André MARTIN
TERRE CHARNELLE
Au pays éprouvé des marches de Lorraine, De l’argile rebelle aux calcaires profonds, Un nectar d’eau de vie sourd sans fin du tréfonds, Un nectar d’eau de mère à couronner des reines. Promesse de fruit d’or, discrète et souterraine, Quand s’ouvre, imperceptible, un œil sur un greffon. L’arbre au sein de sa mère en secret puise à fond Un élixir de vie pour prunes souveraines. Les nuits de mai, la voie lactée goutte du ciel, Dans les coupes des fleurs, en poussières de miel. Les racines qui fouillent leurs entrailles charnelles Vont transmettre la vie en féconde litière, Vie d’un témoin fidèle, en glèbe maternelle D’un vieil arbre aux fruits d’or, orfèvre en la matière _________________ Quelques personnalités de la région Alsace-Lorraine qui ont marqué l'histoire :
Henri POINCARÉ Mathématicien de génie également connu des physiciens pour ses études sur la stabilité du système solaire, Henri Poincaré naît le 29 avril 1854 à Nancy. Sa famille appartient à l'élite intellectuelle de la ville : son père, neurologue, est professeur à la faculté de médecine ; son cousin Raymond sera président de la République de 1913 à 1920.
Marie MARVINGT Pionnière de l'aviation, sportive tout terrain et alpiniste hors pair, celle que l'on avait surnommée « la fiancée du danger » ou « Marie casse-cou » est restée toute sa vie fidèle à sa devise : « Je décide de faire mieux, encore et toujours. » Née le 20 février 1875, elle est très attachée à Nancy, où ses parents s'étaient installés en 1889, place de la Carrière. En 1908, elle s'inscrit au Tour de France cycliste ; les organisateurs ayant refusé sa participation, elle réalise seule le parcours, se payant le luxe de prendre le départ après les hommes ! Elle pulvérise dix-sept records mondiaux (natation, équitation, aviation, gymnastique, athlétisme, escrime, tir, tennis, golf, polo...) et devient la femme la plus décorée de son temps. Elle s'éteint paisiblement le 14 décembre 1963 à Nancy, à l'âge de 88 ans, deux ans après s'être offert un ultime Nancy- Paris à bicyclette et un dernier survol de la capitale en hélicoptère à réaction.
Louis-Hubert LYAUTEY Officier durant les guerres coloniales, résident général au Maroc en 1912, ministre de la Guerre durant la Première Guerre mondiale, fait maréchal de France en 1921, académicien, Louis-Hubert Gonzalve Lyautey, né le 17 novembre 1854 à Nancy, n'avait qu'une devise : « La joie de l'âme est dans l'action. » Après sa mort, le 27 juillet 1934, à l'âge de 79 ans, son corps est d'abord déposé dans le caveau des ducs de Lorraine, à l'église des Cordeliers de Nancy, puis inhumé à Rabat, avant d'être transféré en 1961 dans la chapelle de l'hôtel des Invalides.
Edmond De GONCOURT
Né à Nancy le 26 mai 1822, l'écrivain Edmond Huot de Goncourt, fondateur de l'académie éponyme, a donné son nom à l'un des prix littéraire français les plus convoités. La postérité a un peu négligé son frère Jules, avec qui Edmond a pourtant écrit une partie de son oeuvre, notamment le Journal, témoignage saisissant sur les moeurs politiques et sociales de la fin du XIXe siècle.
Antoine DROUOT Général d'Empire et aide de camp de Napoléon, le grand artilleur Antoine Drouot, fils d'un modeste boulanger, vient au monde le 11 janvier 1774 à Nancy, où il fait une partie de ses études. Héros des grandes batailles napoléoniennes, de Wagram à Waterloo, proscrit par Louis XVIII et finalement acquitté par le conseil de guerre, il se retire dans sa ville natale et refuse toute fonction publique pour ne pas se trouver dans la prospérité et les honneurs, alors que Napoléon croupit à Sainte-Hélène. Il meurt à Nancy le 24 mars 1847, en lâchant : « Je vais retrouver mon Empereur... » Il repose au cimetière de Préville alors que son nom est gravé sous l'Arc de triomphe.
Emmanuel HÉRÉ
Les commémorations de 2005 (les 250 ans de la place Stanislas) ont un peu éclipsé Emmanuel Héré. « Et pourtant, que serait Nancy sans lui ? » s'interroge Françoise Hervé, fervente admiratrice du premier architecte du roi de Pologne et duc de Lorraine. Né à Nancy en 1705, il fut l'élève de Germain Boffrand, à qui l'on doit les plus beaux hôtels particuliers de la ville (hôtel des Loups, de La Monnaie...). A la cour de Stanislas, il déploie une activité foisonnante dans toutes les résidences royales, de Commercy à Chanteheux, construisant palais et aménageant jardins. A Lunéville, les jeux d'eau, le kiosque turc et le pavillon du trèfle chinois impressionnent durablement les hôtes de Stanislas Leszczynski. L'église Notre-Dame de Bonsecours, à Nancy, est sa première grande réalisation religieuse. La place Royale (aujourd'hui place Stanislas) sera son dernier grand chantier, son chef-d'oeuvre, merveilleusement scandé par les ferronneries de Jean Lamour. Rénové avec brio il y a trois ans, l'ensemble est inscrit au Patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco.
Philippe CLAUDEL
L'auteur des « Ames grises » (Stock, prix Renaudot 2003), né en 1962 à Dombasle-sur-Meurthe, enseigne toujours à la faculté des lettres de Nancy. Il a réalisé l'an passé son premier film, « Il y a longtemps que je t'aime », tourné essentiellement en Lorraine, avec Kristin Scott Thomas et Elsa Zylberstein dans les premiers rôles.
FIN
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André Laugier
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