PETIT LEXIQUE POÉTIQUE
RIMES BABEBINES
C'est la grammairien ARISTIDE qui donna ce nom à des rimes constituant une variété de la contre-assonance.
Dans la contre-assonance, ce ne sont plus les voyelles qui sont identiques (comme dans la rime), mais les consonnes. Les rimes babebines gardent l'identité de la "consonne d'appui", mais en changeant les voyelles dans un certain ordre.
Les véritable rimes babebines n'utilisent pas d'autre système qu'elles-mêmes et, en outre, elles font défiler les "voyelles" dans l'ordre alphabétique : a, e, i, o, u, celui qu'on utilise dans l'apprentissage de la lecture pour les combiner avec les consonnes, soit, par exemple : "ban be, bi, bo, bu" - d'où le nom donné à ce système.
Ci-dessous, un exemple de Clément MAROT, qui s'en approche fortement :
Or, en Noël venu son petit trac :
Sus donc, aux champs bergères de rerspac,
Prenons chacun panetière et bissac,
Flust, flageol, cornemuse et rebec ;
Ores n'est pas temps de clore le bec,
Chantons, sautons et dansons ric à ric ;
Puis allons voir l'enfant au pauvre nic,
Tout exalté d'Elie, aussi d'Enoc,
Et adoré de maint grand roy et duc
...
André SALMON, poète-romancier (1881 - 1969), a parfaitement utilisé ce système dans un recueil de poèmes ayant, tous cinq vers, sauf ceux qui doublaient le procédé on n'en prenaient qu'une partie :
Or le commandant s'avisa,
Au souffle des vents alizés,
D'accorder la Poésie
Le rythme de son aviso.
Je l'ai constaté de visu.
Par ce procédé littéraire, on donne une impression étrange à l'oreille qui perçoit l'existence d'un système répondant à une logique, même si elle n'est pas immédiatement reconnue par le profane.
Tout comme les premières mesures d'un morceau de musique permettent de reconnaître le mode, la tonalité, la mesure du morceau, le poète ayant d'abord indiqué (dans l'ordre) la série de voyelles peut ensuite reprendre la simple contre-assonance. Illustration parfaite de ce procédé : ces vers de Bernard LORRAINE :
Autruches s'amourachent
Malgré leurs grands airs rêches,
Des bijoux d'or des riches.
Quand un danger s'approche,
L'autruche, sotte cruche,
Met sa tête sous roche,
L'enterre dans les friches.
C'est alors qu'à la fraîche,
Plumage on lui arrache.
Ah ! que l'autruche
Nous est proche !
Les "rimes babebines" peuvent s'utiliser avec tous les mètres :
Là
Le
Lit
L'eau
l'eut.
ARISTIDE