Drôle d'affaire pour l'inspecteur 2

Drôle d’affaire pour l’inspecteur 2
Au bout d’un chemin cahotant, l’inspecteur aperçut le coin de pêche du garçon. C’était un endroit assez à l’écart, calme et très boisé, avec quelques emplacements prévus pour les pêcheurs. Le cours d’eau, le Grémillon, était un petit ruisseau d’au moins six kilomètres qui se jetait dans la Meurthe. Il  se trouvait en contrebas et sa surface en était agitée et boueuse. Des saules pleureurs, des frênes communs et des aulnes glutineux apportaient l’ombre nécessaire si besoin. Le sol était jonché de bois morts, la végétation était dense et les racines des arbres consolidaient les berges. L’inspecteur supputait déjà que ce serait une affaire compliquée : le terrain était peu propice à la découverte d’indices et les pluies diluviennes n’arrangeaient rien. Il y avait de la boue et des trous d’eau partout. Il pataugeait et se dit qu’il aurait dû mettre des bottes. Ses mocassins prenaient l’eau de toutes parts, sans compter son chapeau qui lui dégoulinait sur la figure. Dans la précipitation, il n’avait pas pris de parapluie et son pardessus était trempé. « quel sale temps » se dit-il, en pestant !
Néanmoins, il inspecta minutieusement les lieux, mais ne trouva que des bouts de nylon, des hameçons cassés, des miettes d’appât détrempées et le matériel au complet de l’adolescent : deux cannes à pêche, des moulinets, des leurres, du fil, une nasse  emplie de poissons, une épuisette, un couteau de pécheur ensanglanté, une trousse de premiers secours un peu tachée et jusqu’au pique-nique resté dans le panier. Sur la branche d’un arbre était suspendu un blouson de cuir noir.
Une des deux cannes était classique, mesurait environ deux mètres et était d’un poids moyen. Elle avait l’air solide et assez flexible. Elle était posée par terre et n’avait pas été dépliée. L’autre paraissait en graphite car elle était légère et solide mais elle lançait beaucoup plus loin, elle mesurait près de quatre mètres et était dans l’eau. Ce garçon était un habitué, à n’en pas douter ! Rien ne manquait à son kit de base, pas même le permis de pêche validée pour l’année en cours. Il était au nom de Maxence Grailly, 14 ans, domicilié à Nancy (Meurthe et Moselle)
Il  fouilla le blouson très succinctement et avec grande précaution pour ne pas effacer d’indices éventuels. Il y trouva des mouchoirs en papier, un paquet de chewing-gums et un téléphone portable de marque Samsung. L’inspecteur n’était pas très fier de sa trouvaille : la fugue était peut-être à écarter. Mais il voulait y croire encore !
Le sol n’avait pas l’air d’avoir été piétiné, les herbes n’étaient ni pliées, ni arrachées. Avec les trombes d’eau tombées, il serait difficile de retrouver des empreintes. S’il y avait eu lutte, ce n’était pas très visible. Il fallait attendre l’équipe scientifique pour en apporter la preuve. Les gars du labo trouveront certainement des indices, des fragments ou des empreintes de pas, voire de voiture : rien ne devait lui échapper ! Il devait suivre chaque piste et chercher dans toutes les directions possibles, la vie du jeune homme en dépendait. D’ailleurs, il ferait  appel à la brigade canine. Ils effectueront des patrouilles terrestres de manière plus efficaces et plus rapidement que lui. Les maîtres-chiens et leurs auxiliaires étaient habitués à ce genre d’investigation. Ces derniers pouvaient accéder à des endroits inaccessibles à l’homme. Les équipes cynophiles étaient très expérimentées pour ce genre de recherche ; elles étaient de plus en plus présentes sur les terrains accidentés pour retrouver des personnes disparues ou ensevelies. Il appela aussi le Procureur de la République pour avoir l’aide et la logistique d’Europol : il fallait faire vite,  très vite, c’était une question d’heures…
Lucienne le 05.01.2016