André Laugier
Messages : 7157 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 82 Localisation : Marseille
| Sujet: Compilation de poésies pascales. Sam 15 Avr - 12:16 | |
| De nombreuses coutumes datant de la plus haute antiquité destinées à accueillir le retour du printemps se rattachèrent à la fête de Pâques. L’œuf est le symbole de la germination qui se produit au début du printemps. De même le lièvre est un symbole antique qui a toujours représenté la fécondité16. En France et surtout au Québec, certains mythes populaires parlent de la cueillette de l'Eau de Pâques. Dans l'Église catholique québécoise, la cueillette de l'Eau de Pâques n'est pas un mythe, puisque lorsque la vigile pascale ou la messe du matin de Pâques se termine, il est réellement possible de remplir un petit pot avec un peu de l'eau qui vient d'être bénie pendant la célébration pour en rapporter chez soi. Le mythe à proprement parler voulait qu'on recueille l'eau de pluie tombée au matin de Pâques. On disait de cette eau ainsi recueillie qu'elle permettait de guérir des maladies. En Allemagne, en Suisse, en Autriche, en France dans la région d'Alsace et le département de la Moselle ainsi qu'en Martinique, Guyane, Guadeloupe et à la Réunion, le lundi de Pâques s'accompagne d'un autre jour férié : le « Karfreitag », soit le Vendredi saint. Pâques ressemble à Noël et il n'est pas rare que les gens s'offrent des cadeaux entre eux à cette occasion.
En Alsace, le traditionnel « Osterlammele » en biscuit. En Allemagne et en France, le repas de Pâques est souvent l'occasion de partager un gigot d'agneau rôti accompagné de flageolets. En Alsace et dans certaines régions d'Allemagne, on confectionne un biscuit en forme d’agneau appelé Osterlammele ou Lamala. Cette tradition alsacienne catholique du Lammele est attestée par le théologien catholique Thomas Murner en 1519 : le fiancé offrait un agneau pascal à sa promise. On l’offrait aussi aux enfants au retour de la messe du jour de Pâques. Après le temps du Carême, ce biscuit riche en œufs permettait d’écouler le stock d’œufs accumulé avant Pâques et dont la consommation était déconseillée, en attente de Pâques. L’agneau était décoré d'un étendard aux couleurs du Vatican (jaune et blanc) ou de l’Alsace (rouge et blanc). Cette tradition, comme la plupart, a perdu son caractère confessionnel et s'est sécularisée.
Chaque fête a ses spécialités : la bûche de Noël, les œufs de Pâques. En France et en Europe occidentale, la tradition des œufs de Pâques apparaît à la fin du Moyen Âge. Il ne s'agit pas, comme on pourrait le croire, d'une antique coutume païenne...
En France, ce sont les cloches qui apportent les œufs de Pâques. Autrefois, on n'avait pas de montres : les cloches des églises permettaient de connaître l'heure. Or, elles cessaient de sonner le Vendredi saint, jour de la crucifixion de Jésus et se remettaient à sonner le dimanche, jour de la résurrection. On racontait alors que les cloches partaient pour Rome... et revenaient le dimanche avec des œufs de Pâques.
Dans les pays germaniques, c'est le lièvre qui apporte les œufs de Pâques.
Beaucoup de poètes ont écrit des vers sur Pâques, certains destinés aux enfants, d'autres, plus religieux, s'adressant davantage aux adultes. Voici, ci-dessous, une petite compilation d'œuvres d'auteurs connus ou anonymes qui, je pense, en ce week-end pascal, sauront vous séduire et vous apporter quelque sérénité. Marie NOËL
CHANT DE PÂQUES
Alleluia ! Fais, ô soleil, la maison neuve ! Mes soeurs, que chacune se meuve Avec des mains de ménagère et des doigts gais… C’est Pâques ! Jetons hors les poussières obscures, Frottons de sable fin les clefs et les serrures, Pour que la porte s’ouvre en paix. Cirons doux, cirons vif les battants des armoires, La fenêtre en rit dans leurs moires ! Frottons ! qu’elle se mire au luisant du parquet. Vêtons-lui ses rideaux de fraîche mousseline… Quel ouvrage ! A-t-on cuit le gâteau d’avelines Et mis sur la table un bouquet ? Alleluia ! Nous avons fini d’être mortes, De jeûner, de fermer nos portes, Le coeur clos et gardé par les effrois pieux. Le prêtre a délivré la flamme et les eaux folles, Notre âme sort et s’amuse dans nos paroles Et notre jeunesse en nos yeux. Ouvre tout grand la porte à la Semaine Sainte. Mon coeur en moi sautille et tinte Ainsi qu’une clochette en or vif qui se tut Et s’en revient de Rome après les temps mystiques Me donner l’envolée et le ton des cantiques Pour l’allégresse du salut. Mais avec ma corbeille il faut que je m’en aille Chercher les oeufs frais dans la paille… Aux vignes d’alentour ont fleuri les crocus En rondes d’or et tenant leurs mains verdelettes J’ai vu dans les fossés des nids de violettes Et des coucous sur les talus. Les poules ont pondu très loin dans la campagne. Dans le matin qui m’accompagne ? Venez-vous-en seul avec moi, mon bien-aimé… Quelle parole avant d’y penser ai-je dite ? Où donc est ce bien-aimé-là, dis, ma petite ? Qui d’un tel nom as-tu nommé ? Est-ce Jésus, ô moi qui ne connais point d’homme ? Le Dieu martyr que dans son somme Hier nous avons veillé toute la nuit au coeur, Pleurant d’amour sur son tombeau, de deuil voilées ? Est-ce le Printemps doux et ses graines ailées Qui nous a soufflé dans le coeur ? Mon bien-aimé, ce n’est qu’un mot, ce n’est personne. Mais de l’avoir dit je frissonne Et je suis parfumée et je suis en rumeur Comme une fiancée au roi qui l’aime offerte, Je frémis et me sens comme la terre, ouverte Toute grande aux pieds du semeur. Quel germe au loin flottant va me voler dans l’âme ? Quel est le grain qu’elle réclame Pour être avec les fleurs une fleur de l’été Et pour porter des fruts quand passera l’automne ?… Il est doux, invisible et léger, il chantonne A travers le vent enchanté. Qu’est-ce que le Printemps, ô Jésus, mon doux Maître ? L’Ange des révoltes peut-être Qui change d’un regard et la terre et les eaux Pour me séduire et m’agite neuve et rebelle, - Moi qui devrais vous être une calme chapelle- Ainsi que l’herbe et les rameaux. Ah ! de lui maintenant pourras-tu me défendre ? O Christ, il te fallait l’attendre Sur ta croix de salut tous les jours sans guérir Et me faire couler sur le coeur, de tes plaies, Ton sang, pour que cherchant tes épines aux haies, A tes pieds j’adore mourir. Mais ce matin que l’Ange a remué la pierre, O Toi debout dans la lumière, Ressuscité de l’aube aux pieds couleur du temps, Toi qui dans le jardin as rencontré Marie Que feras-tu, jardinier de Pâques fleuries, Pour me défendre du Printemps ? __________________
Emile VERHAEREN
Au bord du toit, près des lucarnes, On a repeint les pigeonniers, Et les couleurs vives vacarment Depuis les seuils jusqu'aux greniers.
Et c'est le vert, le brun, le rouge, Sur les pignons, au bord de l'eau, Et tout cela se mire et bouge Dans la Lys, la Durme ou l'Escaut.
On bouleverse les cuisines : Des mains rudes, de larges bras Frottent les antiques bassines, L'écuelle usée et le pot gras. __________________
Marcel PAGNOL
ŒUFS DE PAQUES
Voici venir Pâques fleuries, Et devant les confiseries Les petits vagabonds s'arrêtent, envieux. Ils lèchent leurs lèvres de rose Tout en contemplant quelque chose Qui met de la flamme à leurs yeux. Leurs regards avides attaquent Les magnifiques œufs de Pâques Qui trônent, orgueilleux, dans les grands magasins, Magnifiques, fermes et lisses, Et que regardent en coulisse Les poissons d'avril, leurs voisins. Les uns sont blancs comme la neige. Des copeaux soyeux les protègent. Leurs flancs sont faits de sucre. Et l'on voit, à côté, D'autres, montrant sur leurs flancs sombres De chocolat brillant dans l'ombre, De tout petits anges sculptés. Les uns sont petits et graciles, Il semble qu'il serait facile D'en croquer plus d'un à la fois ; Et d'autres, prenant bien leurs aises, Unis, simples, pansus, obèses, S'étalent comme des bourgeois. Tous sont noués de faveurs roses. On sent que mille bonnes choses Logent dans leurs flancs spacieux L'estomac et la poche vides, Les pauvres petits, l'œil avide, Semblent les savourer des yeux. __________________
Stuart MERRILL
CHANSON DE PÂQUES
Mon âme est pleine de cloches, Mon âme est pleine d’oiseaux ! Je vois au miroir des eaux Trembler les étoiles proches. Mon âme est pleine d’églises, Mon âme est pleine de fleurs ! Les enfants oublient leurs pleurs À chanter parmi les brises. Mon âme est pleine d’archanges, Mon âme est pleine d’essors ! J’entends travailler les forts Pour l’espoir secret des granges. Mon âme est pleine de joie, Mon âme est pleine de dieux ! Amour, bande-moi les yeux Pour me guider dans la voie ! __________________
ANONYME
VENDREDI SAINT
Jérusalem, la ville où siégeait le grand Dieu, S'apprêtait à fêter la Pâque solennelle. Par les routes montant à la ville éternelle, Les pèlerins en foule accouraient au saint lieu. On entendait bêler, autour du sanctuaire, D'innombrables agneaux qu'on allait égorger... C'était l'heure où l'Agneau de Dieu, le bon Berger, Mourait pour ses brebis, sur la croix du Calvaire.
Le commerce marchait. Plus d'un adorateur Voulait qu'à son retour de la sainte contrée, De quelque beau joyau sa femme fût parée. Ainsi vit-on jadis le parfait serviteur Offrir à Rébecca colliers et diadèmes... C'était l'heure où Jésus, d'épines couronné, Expirait sur la croix, de tous abandonné, Submergé par un flot de haine et de blasphème.
Dans la ville joyeuse, au soleil du printemps, Les enfants, assemblés sur les places publiques, Se livrent à grands cris des combats héroïques ; Les mères entendaient leurs rires éclatants... Et c'est l'heure où là-bas, l'autre mère,Marie, Sentait un glaive aigu lui transpercer le coeur Mais entendait, pourtant, son fils et son Sauveur, Au larron pénitent ouvrir l'autre Patrie !
Pilate est soucieux. Il n'a pas oublié L'Innocent, condamné contre toute justice, Par la haine des Juifs, au plus cruel supplice. « Serait-ce un Dieu, » dit-il, « que j'ai crucifié ? » Et le lâche, troublé par ces pensers funèbres, Sur un lit de repos étendu mollement, Cherche en vain le sommeil... Et c'était le moment Où Jésus appelait son Dieu dans les ténèbres !
Les ténèbres ! Le sol, tout à coup, a tremblé ; Des tombeaux sont ouverts et des morts ressuscitent ! Des prêtres effrayés, hagards, se précipitent Hors du Temple, où le Saint des Saints s'est dévoilé ! Prêtres et magistrats, et toi, foule cruelle, Confessez votre crime ; à genoux, à genoux ! Sinon le sang du Christ retombera sur vous Et vous serez voués à la mort éternelle !
Et depuis deux mille ans, la pauvre humanité, Érigeant chaque jour quelque nouvelle idole, Passe, sans s'arrêter dans sa course frivole, A côté de la croix, où Jésus est resté. Car il est toujours là, celui qu'on crucifie ! Il est là, dans les siens, outragés, méconnus... Ah ! Que je sois, Seigneur, de ces heureux élus, Qui, mourant avec Toi, par Toi trouvent la vie ! __________________
Leconte de LISLE
Ah ! de sa tige d'or quand cette Fleur du ciel Tomba pour embaumer les vallons d'Israël, Que les vents étaient doux qui passaient dans les nues ! Tu vis naître, ô Saron, des roses inconnues ! Tes palmiers, ô Gadès, émus d'un souffle pur, Bercèrent, rajeunis, leurs palmes dans l'azur ! Ton cèdre, ô vieux Liban, noir d'une ombre profonde, Croyant qu'il revoyait les premiers jours du monde, Salua le soleil qui brilla sur Eden ! Le parfum oublié de l'antique jardin, Comme un cher souvenir et comme une promesse, Des enfants de l'exil adoucit la tristesse, Et de célestes voix, en chants harmonieux, Dirent ton nom, Marie, à l'univers joyeux.
Terre ! oublie en un jour ton antique détresse ! O Cieux ! comme les mers, palpitez d'allégresse ! La Vierge bienheureuse est née au sein de Dieu ! Elle vole, aux clartés de l'arc-en-ciel en feu, La Colombe qui porte à l'arche du refuge Le rameau d'olivier qui survit au déluge ! Le mystique rosier va parfumer les airs ! L'Etoile matinale illumine les mers ! Saluez, bénissez, créatures sans nombre, Celle que le Très-Haut doit couvrir de son ombre, Et qui devra porter, vierge, en ses flancs bénis, Le Dieu qui précéda les siècles infinis ! _________________
Noël NOUET
HYMNE PASCAL
Alleluia ! Chantons, chrétiens, cloches, oiseaux ! Un nouveau jour paraît comme un lis sur les eaux Et c'est un matin plein d'allégresse angélique ! La terre va lancer d'elle-même un cantique : Ecoutons, admirons, saluons, bénissons ! Chœurs du monde et des cieux montant à l'unissons Au lever du soleil sur les plaines en joie ! Tout le printemps terrestre est en fête et verdoie, Et le printemps des chœurs s'évanouit en lui Comme un iris humide et frais parmi les buis.
Bonheur d'âme parmi le grand bonheur des choses ! O double renouveau ! Aube en apothéose ! L'espoir miraculeux de la vie à jamais Eclôt divinement dans l'herbe des sommets Et s'unit aux frissons perpétuels des sèves. Les rejetons noueux sont plus forts que les glaives Et l'Amour t'a vaincue, ô Mort, au bord des cieux !
Alleluia ! Chantons ! le nuage est joyeux, La vapeur virginale est comme une bannière, Le cri de l'alouette est rempli de lumière Et les saints carillons volent parmi les bois, Au milieu des bourgeons entr'ouverts, sur les toits, Et sur la haie en fleurs, l'eau de la mare pleine, La brune giroflée et la fraîche fontaine, Comme des drapeaux clairs emportés par le vent. A l'odeur des jasmins va se mêler l'encens, Et nous disperserons en des strophes pieuses Nos émerveillements dans les nefs glorieuses, Tandis que les coteaux que va dorer l'été Frémiront en l'honneur du pur Ressuscité ! _________________
Albert BAUSIL
SOUS LES CLOCHES D’ICI Le Jeudi Saint, les jardiniers ont apporté dès le matin de gros bouquets de quarantin qu’ils ont posés sur le coussin de velours noir, où dort dans la crypte dévote le vieux Christ espagnol dont on compte les côtes.
L’ombre, où le cœur rouge d’un vitrail palpite, sent le cierge, l’encens et l’éponge bénite dont les petits pénitents frisés se sont servis pour laver les pieds du bon Dieu, mercredi.
Au fond de la chapelle de sainte Thérèse, les marchands de chaises dit le chapelet avec des yeux clos, des soupirs, toute l’extase des confesseurs et des martyrs, en songeant à sa soupe-à-l’ail et à Madame Courtois qui lui doit quatre sous de la dernière fois.
Ce soir, les jeunes gens du quartier Saint-Jacques, parce que c’est le samedi de Pâques, iront chanter les goigs dels ous, sous les fenêtres de Monsieur de Lazerme, qui leur donnera peut-être cent sous, pour aller voir « le Fils de Zigoma » au cinéma.
O samedi de Pâques ! mandolines dans les rues d’argent pâle, où l’on devine à l’ombre de la lune et des balcons chantants, des amoureux blottis qui serrent le printemps ! Et puis, demain ce sera Pâques. Ah ! sonnez, cloches de Saint-Jacques ! et vous, cloches de la Réal, dans l’air bleu et matutinal ! et vous, clocher plus bas et plus proche de Dieu, humble clocher de Saint-Mathieu ! et vous ! et vous ! rempli de cloches baptismales, vieux clocher de la Cathédrale !
Sonnez, cloches, sur les maisons, sur les cœurs qui ont plus de foi que de raison, sur le perron, sur la fontaine, sur la grille, sur la chambre de la jeune fille, et sur le lit étroit et blanc, où les petits dorment de si bon appétit !
Sonnez sur le rire aigu des premiers lilas qu’on voit pointer à la porte de la villa, et sur la chaste, tendre, et plaintive glycine, qui tord les bras comme une princesse de Racine.
Sonnez sur moi, sonnez sur moi, cloches réveillées, qui sentez l’herbe, le muguet, l’ombre mouillée, et toute l’ivresse de l’air, jusqu’à la mer !
Sonnez sur moi, sonnez sur moi, ailes battantes des cloches ressuscitantes ! Faites pleuvoir le ciel et le jour palpitant sur mon cœur nu qui vous attend, sur mon cœur nu qui a vingt ans, qui a vingt ans, ô cloches de tous mes printemps ! __________________
Marceline DESBORDES-VALMORE
LES CHOCHES ET LES LARMES
Sur la terre où sonne l'heure, Tout pleure, ah ! mon Dieu ! tout pleure. L'orgue sous le sombre arceau, Le pauvre offrant sa neuvaine, Le prisonnier dans sa chaîne Et l'enfant dans son berceau ; Sur la terre où sonne l'heure, Tout pleure, ah ! mon Dieu ! tout pleure. La cloche pleure le jour Qui va mourir sur l'église, Et cette pleureuse assise Qu'a-t-elle à pleurer ?... L'amour. Sur la terre où sonne l'heure, Tout pleure, ah ! mon Dieu ! tout pleure. Priant les anges cachés D'assoupir ses nuits funestes, Voyez, aux sphères célestes, Ses longs regards attachés, Sur la terre où sonne l'heure, Tout pleure, ah ! mon Dieu ! tout pleure. Et le ciel a répondu : "Terre, ô terre, attendez l'heure ! J'ai dit à tout ce qui pleure, Que tout lui sera rendu." Sonnez, cloches ruisselantes ! Ruisselez, larmes brûlantes ! Cloches qui pleurez le jour ! Beaux yeux qui pleurez l'amour ! __________________
Dernière édition par André Laugier le Sam 15 Avr - 21:50, édité 1 fois | |
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