POÉSIE ET PHILOSOPHIE
ESSAI
Chacun d'entre nous possède, en son imaginaire, le privilège d'un concept poétique, plus ou moins latent, confiné au tréfonds de notre conscience, mais qui demeure, néanmoins, l'apanage d'une perception patente qui se révèle en notre potentiel énergétique, et qui est souvent lié à des images eidétiques qui ravivent, à un moment donné, en nos facultés mémorielles, un sens plus ou moins exacerbé de poétisation quand notre esprit est sous l'emprise d'un profond onirisme, et que notre cœur est en état de grâce.
De cette concordance des sens naît un argument psycho-philosophique suggérant des sensations qui peuvent nous conférer davantage de réceptivité, de tendresse, d'idéalisme, d'émotivité et de rêverie. Tout ce qu'un poète, exalte, de fait, dans sa quête envers le chimérique. André Chénier a dit: -
"l'art ne fait que des vers, le cœur seul est poète". On pourrait ajouter: la poésie en l'homme abrite un bien secret.
De tout temps, la poésie a exprimé la perception des sentiments et des idées. Elle est le trait d'union entre la pensée et le langage articulé, celui des belles-lettres. Elle véhicule nos impressions, nos passions, le bonheur et l'amour. Mais, au delà de ces références, elle est un lien direct authentique et spontané avec l'être cher et aimé; elle communie avec la beauté formelle de la nature, sachant s'adapter et se fondre aussi au vent de l'histoire, au travers des époques. Elle ambitionne à la communication des hommes au-delà des critères religieux, idéologiques et ethniques. La poésie, quelquefois, nous permet la rencontre avec Dieu... Ses accents sont multiples dans la diversité.
Goûter à la poésie c'est en boire l'onde pure et légère, rafraîchissante de bonheur. Ainsi coulera dans nos veines une source de passion.
La poésie est, en quelque sorte, la musicalité de notre langue. Symbole de la paix et de l'amour, mais aussi de la tristesse et des regrets, elle demeure un œil ouvert en permanence vers la douceur de vivre en nous faisant rêver.
Je ne peux que conclure par cette citation de Francis Bacon :
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"On a toujours admis que la poésie participait du divin parce qu'elle élève et tend l'esprit en soumettant l'apparence des choses aux désirs de l'esprit, tandis que la raison contraint et soumet l'esprit à la nature des choses". (fin de citation)
Et ceci est le vrai sens de la vie.
Les philosophes se sont toujours accordés à critiquer les mythes tout au long de l’histoire, au nom de la bien fondée raison, mais ils ont, dans le même temps, cherché comme clef de la « métaphysique » un premier principe, la pierre angulaire, convaincus, malgré tout, qu’ils étaient de la divine transcendance de ce principe.
Aristote, lui-même, fera appel à la physique pour reconnaître l’existence d’un « premier moteur de l’univers » auquel est attaché le nom de Dieu. Saint Thomas d’Aquin, théologien italien, pour qui la séparation entre la philosophie et la théologie relativement à la question de Dieu demeurait néanmoins, a opposé tout de même l’idée d’une « double vérité », le thème central d’une harmonie entre la foi et la raison. Il fut amené à dire que Dieu étant l’Etre Immuable, donc véritable, se nomme aussi bien Dieu d’Abraham, d’Isaac que de Jacob. Il utilisera largement, au cours de son existence, la philosophie d’Aristote, tout en soulignant l’hétérogénéité du point de vue de la connaissance de Dieu, de la philosophie et de la théologie.
Dieu, dans la pensée moderne, apparaît comme fait psychologique et tout à la fois comme un phénomène historique et heuristique relevant plus d’une explication scientifique qui aurait tendance à rejeter celle-ci dans le domaine du chimérique. Pour répondre à cette négation, l’époque moderne a vu se constituer un discours théiste, qui a de moins en moins recours à la théologie, au sens étymologique du terme, orientée vers la métaphysique et l’ontothéologie. Ainsi s’opposent au discours athée deux théologies antithétiques. Il paraît incompatible et absurde de renoncer à l’un et à l’autre de ces deux aspects, mais il est difficile, aussi, de les imaginer ensemble, car leurs perspectives sont plus antagonistes que complémentaires. Il semblerait que tout est régi comme si l’affirmation de Dieu signifiait tantôt, puisqu’il y a des preuves rationnelles, un succès de la raison que dénonce l’existentialisme athée, mais également un désaveu de cette même raison, que jugent insuffisante une science excessive et une philosophie de l’esprit absolu.
Si Hegel, dans sa philosophie, rend à Dieu ce qui apparaît à L’homme, Feuerbach, détaché de l’idéalisme hégélien qui identifie l’Etre et la Pensée dans un principe unique, rend à l’homme ce qui appartient à Dieu. Mais orientés tous deux, malgré leurs différences, vers le général, tout en scrutant dans l’histoire ces échanges constants qui se produisent dans l’humanité entre le divin et l’humain, ils délaissent le spécifique, l’individuel, ce qui laisse un champ exploitable de ressources et un refuge de choix aux penseurs existentiels hostiles à leur antipersonnalisme. La rupture d’équilibre engendrée par l’inquiétude et l’interrogation face à la raison peut aussi bien conduire au nihilisme qu’à ouvrir un nouvel avenir allégorique dans la révélation de Dieu.
Faut-il y apporter crédibilité ? Pourquoi pas ? Sans Dieu rien n’aurait raison d’exister peut-on raisonnablement penser. Alors comment n’existerait-il pas ? Le concept de Dieu a écrit Hegel
« inclut en lui l’Etre », ce qui tendrait à signifier que Dieu est la seule créature qui existe par
« essence ». Et c’est pourquoi, dans notre société l’espérance, autant que la foi, selon Kant,
« est une vertu théologale, parce qu’elle a Dieu même pour objet ».
« Le contraire de désespérer c’est croire » a dit Kierkegaard. On peut donc logiquement penser et avancer que Dieu est l'unique Être qui puisse satisfaire notre espérance. Il est vrai que les convictions, les désirs, les espérances ne sont pas des arguments irréfutables; mais que valent les arguments qui ne laissent rien à espérer ?
Je suis poète avant tout, et, à l'instar de la majorité de mes condisciples, je m'intéresse à la philosophie, à la littérature et à la métaphysique qui sont, je crois, partie intégrante de la poésie. Ces doctrines m'amènent à m'interroger sur l'existence de Dieu, dont les théories les plus spéculatives relèvent pour les unes de l'expérience immédiate, et pour les autres - je pense les plus importantes - du raisonnement. Pour moi, mais cela n'est qu'une opinion personnelle et qui, je sais, ne sera pas partagée par tout le monde, Dieu est "position absolue" de lui-même et le fait souverain de toute existence dans le présupposé de tout savoir humain.
Victor Hugo, pour sa part, s'est interrogé en écrivant :
"...car la poésie est l'étoile à Dieu, Rois et Pasteurs."Les poètes se sont, jadis, souvent comparés à Dieu. Comme lui ils créaient et donnaient forme de vie à des configurations, des images, ainsi qu'une âme à des personnages, perpétuant ainsi la création du Tout Puissant et établissant les prémices de ce qui peut être considéré comme un évènement des consciences par leurs œuvres immortelles d'hommes, tout simplement.
La poésie est incarnation, à l'image de cette imprégnation spirituelle que l'on rencontrera dans les écrits de Baudelaire, P.Valéry, Mallarmé et surtout de Shakespeare.
La poésie, cite aussi Yves Bonnefoy
"est incarnation étant donné qu'elle doit se faire chair. Dire "je", demeure pour les poètes la réalité comme telle, et demeure une tâche précise dans le mystère du Dieu fait Homme, celle qui recentre les mots, franchit les bornes du rêve, sur la relation à autrui qui est l'origine de l'Etre".Pour conclure, je dirai que la poésie me paraît purement existentialiste.