L'inspecteur reprend du service 6

L’inspecteur reprend du service 6,
Le repas achevé, l’inspecteur piqua un petit somme sur la banquette. Excité de retourner à son bureau après une si longue absence, il n’avait pas fermé l’œil de la nuit : il avait encore une bonne heure devant lui avant son rendez-vous avec l’officier de justice.
Au bout d’une demi-heure de somnolence, il fut réveillé brutalement par une voix de stentor qui lui braillait dans les oreilles. Quelle ne fut pas sa surprise de se retrouver nez à nez avec une vieille balance de sa connaissance qui l’avait repéré dans son coin, à l’abri des regards, pensait-il. Il lui proposa un café et le fit assoir à côté de lui. Et il en profita pour le questionner sur les derniers potins de la ville. Ce dernier ne se fit pas prier pour lui raconter par le menu ce qu’il voulait savoir : des faits divers mineurs genre casses de voiture, vols à la tire, trafics de stupéfiants. Mais ce qui l’intéressa le plus, c’était l’effraction d’une propriété dans les environs de Nancy : des meubles de valeurs avaient été dérobés ainsi que des tableaux de famille et quelques autres objets. Le tout avait été refourgué à des receleurs de la région et dispersé chez des brocanteurs. Mais bizarrement, aucune plainte n’avait été déposée par les propriétaires de la maison en question. Il se fit préciser les circonstances de cette effraction et le lieu, et d’après le renseignement obtenu, il était sûr qu’il s’agissait du domaine de la jeune femme. Pourquoi lesdits propriétaires n’avaient-ils pas porté l’affaire en justice ? Avaient-ils quelque chose à se reprocher ? Ceci corroborait parfaitement avec les informations de la jeune femme.
Mais l’heure du rendez-vous approchait et, après un dernier café pour se réveiller complètement, il partit rejoindre son ami le notaire. L’air frais lui fit du bien et il mit à profit cette petite marche forcée pour réfléchir aux questions à poser : il se devait d’être le plus précis possible pour défendre les intérêts de la jeune femme. Son ami saurait lui expliquer par le menu cet imbroglio juridique et quelques démarches à faire dans l’urgence : il en allait de l’intégrité et la sécurité de Florence de Serreville ! Si comme il le pensait, elle avait été spoliée de son droit de propriété, ce dernier lui indiquerait sûrement les démarches à faire pour récupérer son bien.
Le vieil homme l’accueillit à bras ouvert, le fit pénétrer dans son appartement et lui offrit un café. Ce dernier avait peu changé, peut-être s’était-il un peu empâté et avait gagné quelques cheveux blancs mais il était toujours aussi jovial et d’une élégance rare pour un homme de son âge.
L’inspecteur lui fit part de sa nouvelle enquête et de ses inquiétudes inhérentes à son affaire. Mais le vieux monsieur le rassura vite en lui expliquant que ces spoliations étaient devenues choses courantes et qu’à priori, le délai de prescription n’était pas dépassé. Il fallait qu’elle demandât un recours et la désignation d’un avocat en cours de cassation. Elle avait parfaitement le droit de faire appel à un autre notaire afin qu’il contrôlât le travail de son confrère ; Si elle constatait que le notaire avait commis des erreurs ou avait lésé ses droits, elle devrait saisir la chambre départementale ou régionale dont il relevait. Cette dernière disposait d’un pouvoir disciplinaire sur ses membres, Faute d’obtenir satisfaction, elle devait se tourner vers un avocat pénaliste qui traduirait le notaire en justice. Elle devait aussi porter plainte avec constitution de partie civile directement devant le juge d’instruction.
L’inspecteur était satisfait : il avait de quoi étayer son dossier. Il ne lui restait plus qu’à informer la jeune femme de ses droits et à appréhender les faussaires, le notaire y compris. Il était persuadé que ce dernier était véreux et sans aucun doute de mèche avec ces gens de mauvaise foi…
Lucienne le 04.01.2016