La chanson de l'exilé par Sansef Alafin

La chanson de l'exilé



J'ignore la télé, les appels des mobiles,
Les crissements des pneus dans les rues de nos villes,
Je ne suis plus d'ici, je suis venu d'ailleurs
De passés révolus et peut-être meilleurs...

Sur un lit de regrets que je vais empiler
Repose le passé d'où je suis exilé.

L'odeur du vieil antan remonte dans mon coeur
Je le sens s'exhaler comme une ancienne fleur.
Ce parfum d'autrefois flotte sous ma narine
Ainsi qu'un vent marin parfume une marine.

Radeau du vieux passé sous le ciel étoilé,
Venu d'un temps lointain, je suis un exilé.

Au fond du ruisseau bleu où murmure le vent
J'entends un galoubet sur les pipeaux du temps.
Un chant de pastoureau, un flutiau champêtre
Hantent mes nuits venant chanter à ma fenêtre.

Ainsi que passe au loin un rêve désolé,
Depuis le temps lointain, je suis un exilé.

Des voix et des rumeurs emplissent les sentiers,
On entend du patois aux chemins muletiers,
Les calades d'antan où sonnent les galoches
Bruissent des troupeaux où frissonnent les cloches.

La chenille du temps poursuit son défilé,
En ce présent toujours, je suis un exilé.

Les nuages au ciel ont un air d'autrefois
De gueule rouge sang, de sable quelquefois.
Les blasons de mon coeur ont une dame ingrate
Et mes amours d'antan sont bien passés de date.

Sous un voile discret le temps s'est effilé.
Dans ce monde réel, je suis un exilé.

Un rigodon ringard s'en vient bercer ma nuit
Un vieil accordéon se lamente sans bruit
Les hautbois de la vie ne sont plus à la fête,
Un violoncelle ému résonne dans ma tête.

Mon printemps disparu pleure son jubilé.
Même au fond du fauteuil, je suis un exilé.