Je vous offre ces poèmes pour le 1er mai

J'en déposerai d'autres pour ceux qui n'ont pas encore reçu de vers en cadeau. Bonne journée à vous.  

Pour Alain de François PORCHÉ (Humus et Poussière)

J'ai songé bien des fois...

J'ai songé bien des fois à mon lointain ancêtre,
A celui qui reçut le nom qu'il m'a légué
Du sordide troupeau de porcs qu'il menait paître
Dans la forêt obscure et, de là, boire au gué.

La vase des marais en séchant sur sa guêtre
Alourdissait, le soir, son grand pas fatigué,
Ou bien le gueux courait les bois pieds nus peut-être,
Hirsute, à demi-fol et sauvagement gai.

Serf de condition sans en porter les chaînes,
Il a passé ses jours à rêver sous les chênes,
Et maintenant il n'a plus même de tombeau.

Mais, dans mon coeur, comme un reproche à ma faiblesse,
Il revit. A chacun l'orgueil de sa noblesse !
Il faut aimer ton nom, mon fils, car il est beau.

Pour Momo, Marseille de François PORCHÉ (Sonates)

Marseille

Marseille, heureuse Marseille
Un anneau d'or à l'oreille,
Du stras en tes cheveux bleus,
Tout ensemble jeune et vieille,
Miroir des temps fabuleux,
Toi qui, sous la rose tuile,
Après la soupe au safran,
Manges l'ail pilé dans l'huile,
Toi qui bois ton mazagran
Aux terrasses soleilleuses,
Quelles sources merveilleuses
De vive joie et d'ardeur
J'aime à puiser dans l'odeur
De la chaude aisselle brune,
Marseille rare et commune.
Ô mélange d'Orient
Et d'Occident, il émane
De ton visage riant
Une langueur musulmane ;
Mais, sur ton rocher crayeux,
Aussi la vierge romane
Pose un talon orgueilleux ;
Et par delà l'Evangile,
Et par delà le Coran,
Ton seul dieu, ton seul tyran,
C'est l'enfant fort et fragile,
C'est Erôs, cruel et doux,
Ce feu chantant, cette abeille
Qui bourdonne au fond de nous,
Erôs qui seul te conseille,
Marseille, heureuse Marseille !

Pour André L'automne a dénudé de Pierre Quillard (La lyre héroïque et dolente)

L'automne a dénudé les glèbes, et le soir,
Un soir d'exil et de mains désunies,
S'approche de l'horizon des plaines infinies,
Roi dévêtu de pourpre et spolié d'espoir.

Ô marcheur aux pieds nus et las qui vient t'asseoir
Sans compagnon, parmi les landes défleuries,
Près des eaux mornes, quelles mêmes agonies
Alourdissent ton front vers ce triste miroir ?

Je le sais, tout se meurt dans ton âme d'automne.
Laisse la nuit prendre les fleurs qu'elle moissonne
Et l'amour défaillant d'un coeur ensanglanté,

Pour qu'après le sommeil et les ombres fidèles
Les clairons triomphants de l'aube et de l'été
Fassent surgir enfin les roses immortelles.

Pour Flamme Le bonheur de Henri de Régnier (Vestigia flammae)

Le bonheur

Si tu veux être heureux, ne cueille pas la rose
Qui te frôle au passage et qui s'offre à ta main ;
La fleur est déjà morte à peine est-elle éclose,
Même lorsque sa chair révèle un sang divin.

N'arrête pas l'oiseau qui traverse l'espace ;
Ne dirige vers lui ni flèche ni filet
Et contente tes yeux de son ombre qui passe
Sans les lever au ciel où son aile volait ;

N'écoute pas la voix qui te dit : "Viens". N'écoute
Ni le cri du torrent, ni l'appel du ruisseau ;
Préfère au diamant le caillou de la route ;
Hésite au carrefour et consulte l'écho.

Prends garde... Ne vêts pas ces couleurs éclatantes
Dont l'aspect fait grincer les dents de l'envieux ;
Le marbre du palais, moins que le lin des tentes,
Rend les réveils légers et les sommeils heureux.

Aussi bien que les pleurs, le rire fait des rides,
Ne dis jamais : Encore, et dis plutôt : Assez...
Le Bonheur est un Dieu qui marche les mains vides
Et regarde la Vie avec des yeux baissés.

Il est magnifique ce poème de Régnier, il pense exactement comme moi et cela me touche beaucoup !
Merci de me l'avoir choisi !

Flamme a écrit:

Il est magnifique ce poème de Régnier, il pense exactement comme moi et cela me touche beaucoup !
Merci de me l'avoir choisi !

Dans le mille. Chouette. Je commence à connaitre tes goûts et je devinais qu'il avait été écrit pour toi.

André Laugier a écrit:

Quelle attentionnée initiative, Chère FRIPOU, d'avoir offert à chacun d'entre nous, pour ce 1er mai, un poème choisi, ayant quelques affinités avec le tempérament des membres du forum.

Judicieux ton discernement concernant "L'automne a dénudé" du Poète symboliste Pierre QUILLARD".

L'automne (ma saison préférée), le soir (un de mes moments favoris), les plaines infinies (qui focalisent tous mes regards bucoliques), les fleurs, les couleurs, les ombres, puis l'aube (ce crépuscule du matin dans lequel, inspiré, j'ai commis beaucoup de poèmes). Puis, après le long sommeil de l'hiver l'enchainement des saisons, jusqu'aux clairons triomphants de l'aube et de l'été (période propice pour de longues balades en montagne et dans les bois, où j'y puise "les images" champêtres de la plupart de mes quatrains et sonnets consacrés aux paysages)...

MILLE   CHÈRE FRIPOU, car je me retrouve TOTALEMENT dans ces vers que tu as eu la gentillesse de me dédier.

MES PLUS CHALEUREUX   ET TOUTE MA GRATITUDE.

CARPE DIEM

Excellent moi de mai.

Je suis ravie d'être tombée juste. J'ai essayé de trouver un petit poème adapté à chacun en guise de cadeau et je pressentais que celui-ci t'irait à merveille. Outre que je le trouve très réussi, il évoque des thèmes qui te sont chers. Alors mission accomplie et ravie que mon cadeau t'ai fait plaisir.

Excellente idée Fripou, en effet !
Le poème de Porché m'a fait sourire et j'admire beaucoup ce sonnet. De plus, il m'a renvoyé à mes ancêtres qui, eux, sont venus de lointaines forêts de la suisse alémanique... Et je ne connais pas l'étymologie de mon nom...

Merci à toi de cette attention.

Sansef Alafin a écrit:

Excellente idée Fripou, en effet !
Le poème de Porché m'a fait sourire et j'admire beaucoup ce sonnet. De plus, il m'a renvoyé à mes ancêtres qui, eux, sont venus de lointaines forêts de la suisse alémanique... Et je ne connais pas l'étymologie de mon nom...

Merci à toi de cette attention.

Il est vrai que pour Porché l'étymologie coulait de source...
Le but était en effet de parler des ancêtres chers à ton coeur. Contente que cela t'ai plu.