Elle ne l’aimait plus, mais lui l’aimait encore ;
Froide, elle lui parlait sur un ton détaché,
Comme à un inconnu d’une voix incolore,
Devenue insensible à ce qui le touchait.
Au cours d’une soirée chez des amis intimes,
Elle n’avait eu d’yeux que pour un invité ;
Son regard traduisait bien plus que de l’estime,
Son sourire bien plus que de l’urbanité.
Blême et décomposé, il scrutait leur manège ;
Il avait l’impression de ne plus exister ;
Il se disait : comment et par quel sortilège
Le charme ne peut-il être et avoir été ?
De les voir deviser, l’air ému et complice
Et le champagne aidant, sans façon, sans pudeur,
Lui ravageait le cœur, le mettait au supplice ;
Il n’était que dépit, jalousie et douleur.
Les jours qui ont suivi il vit sa déchéance ;
Il était étranger en sa propre maison ;
De l’amour il vivait la dernière séance ;
De l’hymen il vivait la dernière saison.
Elle lui annonça son départ sans ambages ;
De prière en menace il tenta son va-tout ;
Mais ni ses pleurs, ses cris, ses jurons ni sa rage
N’y firent ; dans son jeu il n’avait plus d’atout.
Délaissé et livré à ses pensées affreuses,
Il ruminait sa peine et son ressentiment ;
L’image le hantait, éprouvante et honteuse
De son épouse offrant son corps à son amant.
Elle chut quand le coup partit dans la ruelle ;
Ensuite il retourna contre lui le canon ;
Triste destin pour ceux qui, la vie est cruelle,
S’unirent par un oui, moururent pour un non.