À André (Marius LAUGIER)

Que d'émotions !!! Ce récit est un splendide poème avec les rimes qui donnent de la tendresse aux vers, il est très prenant !
Les sentiments de peur, de joie, de se retrouver ensemble après l'effroi d'une séparation causée par la folie des hommes, provoquent un doux soulagement sur ce poème angoissant par moments !
De le faire en 6 vers espacés les uns des autres est très bien apprécié, cela permet de reprendre son souffle après une lecture très forte sur cette atmosphère mélangée d'un bonheur serein et de la peur de l'inconnu quand arrive la guerre, s'en sortir sous les balles des soldats !!!
Est-ce le même bonheur retrouvé après cet horrible évènement ?
Certainement pas. "A mon réveil la peur me hante le matin,", mais peut-être plus intense, plus fragile aussi, et en même temps plus fort, car le triomphe d'en être sorti est bien présent !
Que dire de plus sur ce poème, qui sait nous toucher au plus profond de nos coeurs !!! Il est pour toi André, son fils, sa joie, son bonheur !
Il est pour vous trois, une merveilleuse famille qui a su garder les plus beaux des sentiments : Amour, Bonté, Tendresse, et joie d'être une famille unie !
Merci à Marius d'avoir de telles qualités et de savoir nous offrir son talent de poète !

À ANDRÉ

Tu m’appelles papa ; je te dis mon enfant,
Et je vois dans tes yeux ce rire triomphant
Où l’innocence se dévoile ;
Ton regard est si beau que je voudrais toujours
Y lire mon destin, dans leur noir de velours,
Comme quand on fixe une étoile.

En boucles, sur ton front, tes cheveux viennent choir.
Tu t’élances vers moi, quand j’arrive le soir
Sur le seuil de notre demeure ;
Me couvres de baisers si doux, si savoureux,
Que tout chagrin s’envole, et je suis plus heureux
De sentir ta main qui m’effleure.

Dans mes bras je t’élève au ciel pour te montrer
A l’astre rayonnant que vient de rencontrer
Ta jeune et divine paupière.
Ta main faisant alors le geste d’un baiser,
Tu demandes à Dieu de toujours protéger
Leur enfant, ton père et ta mère.

A deux ans tu connus la guerre et ses malheurs ;
Tu regardais nos yeux où perlaient quelques pleurs,
Sans en deviner l’origine ;
Et tu les essuyais avec tes petits doigts,
Balbutiant des mots, d’une gentille voix,
Venant de ton âme enfantine.

Hélas ! loin du danger te portèrent nos bras.
Quand tu seras plus grand, mieux tu le comprendras
Quel fut alors notre calvaire !
Nous étions menacés par les brigands de l’air :
La mitraille jetait sa rafale de fer
Partant du ciel et de la terre.

Nous demandions asile aux arbres, aux buissons :
L’alerte nous faisait plonger dans les moissons.
Nul être marchant sur les routes,
Ne nous rattachait plus au monde des vivants :
On entendait gronder, des soldats poursuivants,
Le canon comme sous les voûtes.

Nous avons recouvré la joie et le foyer,
Nul, à présent, sur nous ne doit s’apitoyer :
Le soleil brille après l’orage,
Profite de la vie, à ce soleil nouveau,
Fais éclater tes ris sous le blond écheveau
De cheveux couvrant ton visage.

Appelles-nous encor des doux noms d’autrefois,
Egayant le passé quand ta petite voix
Nous tenait en éveil sans cesse ;
Alors, le bras tendu vers nos fronts rayonnants,
Ta main les caressait comme font les enfants
Qui demandent une caresse.

Je ne peux croire encor vous sentant sur mon sein ;
A mon réveil la peur me hante le matin,
Il me semble que c’est un rêve
De nous voir réunis à la table le soir.
D’être au milieu de vous, lorsque je viens m’asseoir,
A la fin du jour qui s’achève.

Écrit à Marseille, le 14 février 1946.

Salut et estime.....BRAVO MOMO DE MASSILIA.[/h2]

Un poème d'amour qui raconte la vie, ses espoirs, ses inquiétudes, ses chagrins, ses émotions, sa tendresse... Et quand on sait combien il est difficile de réécrire de mémoire des rimes oubliées, le mérite est encore plus grand. Un poème à conserver sur le coeur pour égayer les souvenirs.