L'inspecteur reprend du service 2

L’inspecteur reprend du service 2
Il se précipita sur le combiné et décrocha rapidement pensant que ce fut sa nouvelle cliente. Mais au lieu de cela, c’était le commissaire-divisionnaire qu’il avait au bout du fil. Ce dernier lui souhaitait un bon retour et le tint au courant des affaires en suspens : quelques effractions, des délits de fuite, des dealers en surveillance, des vols à la tire, des disparitions, des attentats à la pudeur et tant d'autres, mais rien sur l’affaire qui le préoccupait déjà.
L’inspecteur remercia son supérieur hiérarchique et raccrocha prestement pour avoir la ligne de libre. Il avait hâte de commencer cette enquête qui lui paraissait urgente mais qui n’avait pas encore franchi la porte du commissariat. Il compulsa de nouveau le courrier et regarda plus attentivement la photographie : il ne pensait pas connaître cette région ni même n’avoir déjà aperçu ce domaine  auparavant. Cette maison était vraiment cossue et le parc  était immense. Il pouvait apercevoir, dissimulée derrière un massif de rosiers le hayon d’un véhicule, mais il n pouvait déchiffrer la plaque d’immatriculation, cachée par les fleurs. Il lui semblait cependant que c’était une grosse berline gris métallisé. Il ne tirerait rien de concret de cette prise de vue, du moins pour l’instant : il était trop dans le flou. Il lui fallait attendre d’avoir plus de renseignements sur cette propriété et ses résidents
L’inspecteur ne tenait plus en place : il était pressé d’en savoir davantage et voulait expressément résoudre cette nouvelle énigme qui se présentait à lui. Il relut une troisième fois la lettre manuscrite mais elle ne contenait aucune information d’ordre privé : pas de nom, pas d’adresse ; juste un numéro de téléphone sur liste rouge ; rien de personnel, simplement ces mots énigmatiques,  à croire que ce billet avait été écrit dans l’urgence et en cachette. Se pouvait-il que l’expéditrice soit en danger ou détenue contre son gré ? Peut-être n’était-elle pas la propriétaire de cette belle maison, un membre du personnel seulement, une voisine, une parente éloignée ?
Il se résolut donc à attendre un appel ou, éventuellement, une autre lettre plus explicite pour commencer ses investigations. Il était dans le noir le plus complet et rien ne servait à courir dans tous les sens sans plus amples informations.
En attendant ce coup de fil, il fit une toilette sommaire, comme il en avait l’habitude lorsqu’il était au bureau ; mais il prit le temps nécessaire pour se raser de frais. Il se recoiffa minutieusement et plaqua ses cheveux avec une noisette de gomina qui leur donna un aspect lisse et brillant. Il arrangeait une mèche rebelle quand la sonnerie du téléphone retentit
Mais cette fois, il prit tout son temps pour répondre. Il se donna un dernier coup de peigne et sortit de son minuscule cabinet de toilette, fermant la porte aux regards éventuels. Cette pièce était un vrai fourre-tout et il ne voulait pas offusquer ces visiteurs, même les plus gaillards : sa fierté en prendrait un sacré coup dans l’aile ! En même temps, c’était son cabinet d’aisance, alors raison de plus pour qu’il restât clos.
Il s’avança vers le combiné pour décrocher quand on toqua à la porte : son geste resta en suspens quelques secondes. Il réfléchit rapidement à l’action à faire : répondre au téléphone qui sonnait depuis au moins dix minutes ou aller voir qui se présentait à son bureau sans s’être fait annoncer à ses subalternes. Il aurait voulu faire les deux choses en même temps mais c’était impossible, la porte se tenant à trois mètres au moins du bureau : il lui fallut choisir entre la vitesse et la précipitation, mais préféra la politesse …
Lucienne le 29.01.2016