Pas de repos pour l'inspecteur 15

Pas de repos pour l’inspecteur 15,
Le repas fut promptement avalé. Ils finirent leur bière et repartirent au commissariat. La nuit était tombée et il était temps pour l’inspecteur de regagner sa pension de famille. Ils se quittèrent sur une poignée de main amicale et se donnèrent rendez-vous le lendemain à neuf heures. Le fin limier était sur les rotules et monta directement dans sa chambre. Il se dévêtit rapidement, passa vite fait dans la salle d’eau pour ses ablutions quotidiennes et alla se coucher. Il ne prit pas le temps de réfléchir ni de se poser quelques questions. Il s’endormit aussitôt dès qu’il se fut allongé sous le duvet.il avait mis son portable à sonner pour sept heures et demi.
Mais il ne fit pas sa nuit complète. Bien sûr, il avait bien dormi, mieux que l’avant-veille. Il se réveilla en pleine forme à six heures, vieille habitude de son travail lorsqu’il était sur une enquête. Alors, il se leva, fit sa toilette, retapa un peu le lit et descendit faire un petit tour dans le jardin de la pension pour se dégourdir les jambes et s’ouvrir l’esprit. Il était persuadé que leur enquête était sur la bonne voie d’élucidation. Les deux jeunes gens étaient sans doute sur le chemin du commissariat, grâce à l’intervention de la brigade cynophile et les témoignages obtenus. Finalement, son flair ne l’avait pas trompé : depuis le début, il était sûr et certain que c’était une seule et même affaire. Après une bonne heure à musarder dans le parc joliment fleuri, il s’approcha de la table d’hôte. C’était l’heure de sa collation matinale et pour rien au monde, il ne l’aurait manqué. D’autant que ce petit déjeuner était savoureusement campagnard et copieux et la table toujours aussi bellement agencée avec son bouquet de fleurs fraîches qui trônait au milieu. Il prit tout son temps à profiter de tous les mets proposés. Il avait grand appétit et se dit que peut-être, ce serait le seul repas solide de la journée alors il mit les bouchées doubles.
Une fois suffisamment restauré et l’estomac bien saturé, il déplia ses longues jambes et partit d’une grande enjambée au commissariat de police. Il était neuf tapantes et il se devait de n’être en retard, c’était une de ses qualités. Son homologue l’attendait avec impatience, semblait-il et avec un large sourire affiché. L’accolade fut si joyeuse que l’inspecteur faillit en tomber à la renverse. Ils partirent d’un fou-rire tous les deux : ce matin, l’ambiance était au beau fixe.
En effet, le commissaire lui apprit que les deux jeunes fugueurs avaient été interpelés dans la vieille maison d’Argoulins et qu’ils étaient sur le chemin de son bureau. Ils n’avaient pas tenté de s’enfuir ni protesté de la sommation de se rendre aux forces de l’ordre. Bien au contraire, ils semblaient avoir hâte et peut-être envie de retourner dans leurs foyers respectifs. Depuis leur disparition, ils étaient traqués et ne pouvaient pas faire un pas sans tomber sur une escouade de gendarmes. Ils n’avaient pas prévu un tel déploiement de forces policières. Ils étaient dépassés par les évènements de passer soudain de l’ombre à la lumière.
L’inspecteur était très satisfait de ce dénouement sans coup férir. Enfin une enquête policière sans cadavre ! Il ne restait plus qu’à savoir le pourquoi du comment. Qui avait eu l’idée de cette fugue romanesque ? Que comptaient-ils faire de cette liberté nouvelle mais bien embarrassante ? Pourquoi avoir choisi la fuite plutôt que d’étaler cette affaire de cœur en plein jour ? Quels avaient été les freins qui les avaient conduits à cette escapade amoureuse ? Le jeune homme n’ignorait sans doute pas la faute grave et répréhensible par la loi qui planait au-dessus de sa tête ? Un enlèvement de mineur était passible de cinq à dix ans de prison.
Les deux policiers attendaient avec grande impatience l’arrivée des deux jeunes gens sous bonne escorte. Ils s’octroyèrent un petit noir pour tuer le temps et pour parler des vacances de l’inspecteur…
Lucienne le 02.04.2016