Un petit coin de campagne pour l'inspecteur 13

Un petit coin de campagne pour l’inspecteur 13,
Sa déclaration terminée, l’homme se renfrogna un peu plus sur sa chaise, au bord du désespoir et le visage hagard. L’inspecteur lui posa quelques questions personnelles, le rassura sur son sort et le remercia de sa franchise : il ne mentait pas, il en était sûr et certain. Pendant l’audition, il avait fait appeler par le commissariat, le tribunal correctionnel de Genève  et les faits s’étaient bien avérés : le sieur CHALON avait été reconnu coupable de proxénétisme commis en région suisse et française et avait écopé d’une peine de prison de sept ans ferme.  Il avait donc repris, à sa sortie, ses activités de proxénète et s’impliquait de la sorte en qualité de principal auteur dans un dossier de traite des êtres humains et de mise au travail forcé de plusieurs prostituées. Son dossier comportait  également des préventions d'exploitation de la prostitution, de détention arbitraire, de tentatives de mariages blancs, d'association de malfaiteurs, de menaces, de séjour illégal et d'aide à l'immigration illégale. Il était en état de récidive légale et spéciale. Le Parquet réclamerait contre lui plus de onze de prison assortie sans doute d’une mise à disposition de cinq ans voire plus ! Et s’il s’avérait qu’il fut l’assassin de Carlotta, il encourait la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de vingt-deux ans ! D’autant plus si le meurtre avait été prémédité : Carlotta avait reçu des menaces de mort sur elle et sa famille.
L’inspecteur était satisfait de la tournure que prenait son enquête. Monsieur KAFI, tout bourru qu’il fut lui plaisait bien : il ne lui était pas antipathique, au fond. Il le plaignait sincèrement de son manque de discernement et de son entêtement de n’avoir averti les autorités pour protéger sa famille : sa belle épouse avait payé le prix fort de son laxisme. Mais il ne lui jeta pas la pierre pour autant. Point n’était besoin de réveiller les douleurs et les remords. Il le salua chaleureusement d’une main franche et amicale et lui demanda de rester à disposition pour informations d’enquête. Il lui fit signer sa déposition et le laissa partir.
Il ne restait plus à l’inspecteur qu’à comparer l’ADN récolté sur le corps de la victime avec celui du présumé coupable, qu’il trouverait sûrement dans les fichiers de la brigade de répression du proxénétisme ou BRP qui était un service spécialisé de la police judiciaire, essentiellement chargée de surveiller la prostitution et de lutter contre le proxénétisme. Mais elle se consacrait  également à tous les délits d’ordre sexuel comme les viols et l’exhibitionnisme.  En tant qu’unité de police judiciaire, elle menait des enquêtes, récoltait des renseignements, recueillait des témoignages, infiltrait des policiers, mettait en place des dispositifs de planque et de filature, procédait à des perquisitions et à des arrestations. Pour être efficace, la brigade des mœurs se devait d’être à l’écoute des prostituées qui étaient considérées comme les victimes des proxénètes. La BRP tissait des liens particuliers avec ces filles qui étaient de précieuses informatrices et souvent des éléments clés dans la résolution des affaires. Elle effectuait aussi des enquêtes de grande envergure au niveau national ou international pour remonter les filières et les réseaux de prostitutions, les démanteler et devaient rassembler toutes les preuves nécessaires avant de pouvoir mettre au grand jour ces lieux de prostitutions et fermer les établissements : bar à hôtesses, société d’Escort girl, meublés, maisons de passe etc.
L’inspecteur téléphona à son homologue au commissariat pour qu’il lui dépêche un véhicule banalisé. Il avait besoin de son aide pour interpeler le prévenu le plus rapidement possible avant que l’oiseau ne s’envole. Il lui fallait à tous prix, avec l’appui du BRP, démanteler ce réseau de prostitution avant qu’il n’y ait d’autres victimes…
Lucienne le 06.03.2016