L'inspecteur part en chasse 2

L’inspecteur part en chasse 2,
L’inspecteur n’était pas très familiarisé avec ce type d’affaires. Il n’avait jamais eu à enquêter sur des cas de pédophilie auparavant : c’était sa toute première fois et il devait se renseigner auprès de ses collègues pour la démarche à suivre. Il fit appel à un gendarme informaticien pour voir si ces deux pervers sexuels n’allaient pas sur des sites de rencontre et lui demanda de pratiquer une cyber-infiltration. Il délégua une brigade de la protection des mineurs pour surveiller la sortie des écoles primaires ainsi que les jardins d’enfants et les abords des piscines municipales. Enfin, il fit appel à une grande agence de presse pour faire une enquête discrète sur la pédophilie, voire s’infiltrer dans un réseau et devenir auxiliaires de police : c’était risqué mais il fallait absolument les retrouver avant qu’ils ne récidivent sur de jeunes victimes. Il connaissait quelques pigistes en mal de copie qui collaboreraient sûrement pour parfaire leurs études de journalisme.
Puis, il pianota sur son vieil ordinateur les quelques informations reçues et chercha des renseignements plus poussés sur le statut de pédophile, au niveau judiciaire comme dans les milieux médicaux. Ces derniers considéraient que la pédophilie relevait de la maladie, de la déviance, de la perversité, en un mot de la psychiatrie, et peut-être du soin. Il s'agissait de la thèse la plus reprise dans le discours psychiatrique sur le sujet. Il lui fallait donc avancer prudemment et prévenir tout passage à l’acte notamment en ce qui concernait le cousin de la petite fille, si ce n’était déjà fait.
L’inspecteur était conscient de marcher sur des œufs. Tout l’établisment de la petite ville était déjà sur ses talons. Le Procureur de la République l’avait appelé pour savoir où il en était et lui demandait de traiter l’affaire avec célérité et grande prudence. Les relations sexuelles entre un adulte et un enfant représentaient presque toujours pour ce dernier un évènement traumatique porteur de conséquences psychologiques lourdes, imprévisibles et potentiellement graves. Les sociétés contemporaines reconnaissaient les principes du droit à la protection de l'enfant, qui devait être protégé de certaines perversions. Le développement de sa sexualité devait se faire dans un milieu équilibré et sécurisé. En cas de relations sexuelles adulte-enfant, l'enfant était victime, avait subi un dol, et avait droit à réparation, et l'adulte tombait sous le coup de la loi. La perception juridique et sociale contemporaine faisait de la pédophilie une transgression majeure de la norme de nos sociétés, cette perversion sexuelle pouvant conduire à des crimes. Ces informations ne le rassuraient pas, bien au contraire. Il avait peut-être affaire à des futurs criminels, en attente de passer à l’acte.
Il téléphona à son supérieur hiérarchique pour l’informer de son enquête et diligenta une estafette de gendarmerie chez le dit cousin : d’après les grands-parents, il s’appelait Marcel DUCHAMP, de type caucasien, d’une trentaine d’années environ, plombier de son métier. Il habitait rue Gambetta dans le centre-ville et se déplaçait en scooter. Il n’avait pas trouvé d’information judiciaire à son actif. Peut-être était-ce bon signe mais l’inspecteur devait vite boucler l’individu pour éviter toute dérive.
Et puis l’opinion publique et les élus locaux commençaient à ruer dans les brancards : c’était une très mauvaise image de leur ville que de détenir en ses murs des pédophiles notoires dont un récidiviste, qui plus est. L’affaire Marc Dutroux contribua largement à cette prise de conscience collective. Depuis, l'abus sexuel sur mineur, conséquence du passage à l'acte pédophile, bénéficiait d'une attention sociale intensive. Et d’après l’article 227-25 du Code pénal, « Le fait, par un majeur, d’exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d’un mineur de quinze ans est puni de cinq ans d’emprisonnement et de soixante-quinze mille euros d’amende.»
L’inspecteur en savait un peu plus sur ces abuseurs d’enfants. Il pouvait ainsi monter un plan d’action pour interpeler au plus vite les deux individus. Il appela un psychiatre de sa connaissance ainsi qu’un vieux commissaire de police à la retraite pour demander une aide supplémentaire. Il avait déjà quadrillé la ville et les endroits sensibles et informé la presse locale : ne lui restait plus qu’à attendre que ses hommes l’appellent …
Lucienne le 15.02.2016