André Laugier

Messages : 7147 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 81 Localisation : Marseille
 | Sujet: L'ellipse (Prosodie) Ven 1 Mai - 11:31 | |
| PETIT LEXIQUE POÉTIQUE
L'ELLIPSE L'ellipse (féminin du mot grec "en" qui signifie "dans, et leipein, qui veut dire "laisser là, négliger, d'où "elleipsis (manque, omission d'un mot), est une figure de construction qui consiste à supprimer des mots qui seraient nécessaires à une construction complète, mais dont l'absence n'empêche pas la clarté de sens. Un des exemples les plus connus de l'ellipse est celui de ce vers d'Andromaque :
Je t'aimais inconstant, qu'aurais-je fait fidèle ?
qui concentre une phrase beaucoup plus développée, mais beaucoup moins puissante : "Je t'aimais alors que tu étais inconstant ; combien t'aurais-je aimé si tu avais été fidèle ?"
Le sens du contexte lève l'ambiguïté possible de l'adjectif épicène "fidèle" qui, grammaticalement, peut se rapporter aussi bien à la deuxième personne sous-entendue qu'à la première personne. Mais l'ellipse est une figure de construction très fréquente également dans la poésie moderne : ainsi dans ces deux vers d'Yves Bonnefoy :
Je nommerai désert ce château que tu fus, Nuit cette voix, absence ton visage.
ou encore dans l'expression de Saint-John Perse, "à perte d'hommes", pour dire "des hommes en foule à perte de vue".
La phrase nominale, très fréquente dans la poésie moderne, est elle-même fondée sur l'ellipse du verbe. Voici encore un exemple d'ellipse de Jean Racine, extrait d'une scène basée sur un reproche d'Hermione à Pyrrhus :
Quoi ! sans que ni serment, ni devoir vous retienne, Rechercher une Grecque, amant d'une Troyenne ?
Le paradoxe de l'ellipse est qu'en supprimant des éléments du "signifiant" elle peut mettre en valeur le "signifié" qui lui est associé.
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