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| | COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 | |
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André Laugier
Messages : 7152 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 81 Localisation : Marseille
| Sujet: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 Ven 9 Nov - 12:18 | |
| COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918
COMPILATION DE QUELQUES POÈMES EN L'HOMMAGE DE TOUS NOS SOLDATS DISPARUS Victor HUGO
APRÈS LA BATAILLE Mon père, ce héros au sourire si doux, Suivi d'un seul housard qu'il aimait entre tous Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille, Parcourait à cheval, le soir d'une bataille, Les champs couverts de morts sur qui tombait la nuit. Il lui sembla dans l'ombre entendre un faible bruit, C'était un espagnol de l'armée en déroute Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide et mort plus qu'à moitié, Et qui disait : A boire, à boire par pitié ! Mon père ému, tendit à son housard fidèle Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit : Tiens donne à boire à ce pauvre blessé Tout à coup, au moment où le housard baissé Se penchait vers lui, l'homme une espèce de Maure, Saisit un pistolet qu'il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant " Caramba " ! Le coup passa si près que le chapeau tomba Et que le cheval fit un écart en arrière, - Donne-lui quand même à boire, dit mon père. __________________
Arthur RIMBAUD
LE DORMEUR DU VAL C'est un trou de verdure où chante une rivière Accrochant follement aux herbes des haillons D'argent ; où le soleil de la montagne fière, Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue, Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit. __________________
Y. CHODZKO
UN RÊVE
Je dormais d'un sommeil hanté d'étranges rêves Le corps las du combat, secoué de frissons, Je rêvais d'une femme et ses paroles brèves Restent dans mon esprit gravées comme des sons.
Elle était jeune et belle et ses yeux d'émeraude Laissaient tomber sur moi un regard attendri, Je sentais dans ma main sa main superbe et chaude, Elle me dit : Je suis la Vie et j'ai souri.
Plus tard je la revis sur un champ de bataille Qui maintenant mon bras me montrait l'ennemi, Des palmes de lauriers enguirlandaient sa taille, Elle me dit : Je suis la Gloire et j'ai frémi.
Et puis je l'ai revue inhumaine et farouche, Les yeux étincelant d'un triomphant mépris, Elle a glacé mon sang d'un baiser sur la bouche, Elle m'a dit : Je suis la Mort et j'ai compris. _________________
G. Matt DE KER
Octobre 1914 APPEL AUX FRONTIÈRES
La moisson battait son plein Quand le tambour l'interrompit Obscurcissant le ciel serein De ces foyers dont le dépit Se mesurait au vue de l'homme Partant pour la Marne ou la Somme
Mobilisé il court aux armes Sans trop se poser de questions Frondeur il cachait bien ses larmes Ne parlant que de munitions Et du sac lourd à transporter Sur les chemins pour escorter
Au long des jours un idéal Dont il détient moult secrets Puisqu'étant devenu féal De ce pays dont les décrets Le force avec ses compagnons A courir sus aux vils canons Détruisant tout Sur les frontières. ________________
Louis MERCIER
POUR LES MORTS DE LA GUERRE
Donnez-leur le repos éternel ! Ils sont las, Ce fut un dur travail que de sauver la France ! Ils sont morts à la peine et sans qu'ils aient hélas ! Cueilli les fruits de leur souffrance.
Ils ont semé dans les larmes et dans le sang Leur moisson de splendeur, d'autres l'ont terminée Que ces bons ouvriers reçoivent à présent Le salaire de leur journée !
Ils ont sauvé la France et le prix qu'elle vaut Vous le savez, mon Dieu, puisque vous l'avez faite Puisque c'est de vos mains que ce noble joyau a reçu sa taille parfaite. Elle vous doit, Seigneur, la beauté de son ciel La fierté de ses monts, l'attrait de ses collines, Et la grâce qui met un sourire éternel Jusqu'aux pierres de ses ruines Elle vous doit ses champs dont le terroir fécond Nourrit les blés sacrés et les vignes royales Et ses fières cités qui portent sur leur front La couronne des cathédrales Ses preux ont accompli vos gestes autrement Le sang de vos martyrs baptisa son enfance Et leur poussière auguste et leurs saints ossements Font d'elle un reliquaire immense. C'est cela, tout cela qu'ont défendu ces Morts Les voici devant Vous, dans toute leur misère Si pauvres, que certains n'ont plus même le corps Qui vêtit leur âme sur terre
Ah ! Puisque les souffrants et les déshérités Auprès de vous toujours trouvent des préférences, Ouvrez la lumineuse et douce éternité Aux douloureux héros de France _________________
G. Matt DE KER
FACE AU RÉÈL
Vous qui êtes groupés autour de cette stèle Savez-vous seulement pourquoi ces gens sont morts ? Alors sachez qu'ici à leur pays fidèles Tombèrent tous ces héros égalant les plus forts. -°- A côté des grands noms révélés par l'histoire Les voila reposant parmi les tous meilleurs, Ils ont bien mérité le respect et la gloire Dévolus aux vaillants et purs triomphateurs -°- Car ce qu'ils défendaient s'inscrit en lettres d'or Sur la pierre ou drapeau depuis l'âge biblique, Au nom d'un idéal ayant reçu l'accord D'un peuple partisan de cette république, Dont la devise marie Honneur et liberté. _________________
Henri Eugène LALLIER
POÈME D'UN POILU DE VERDUN...
Dans un trou à Verdun. Toute la terre tremble, Et le canon qui gronde. Oui, je crois, il me semble Que c’est la fin du monde. Dans nos trous, on blasphème, On ne croit plus au bon dieu. Même les morts aux faces blêmes Tendent leurs poings vers les cieux. C’est la moisson de notre jeunesse. On tue des gosses de vingt ans Qui meurent là, sans une caresse, Fauchés comme des fleurs de printemps. A quand la fin de ce cauchemar. On n’en peut plus; on en a marre. Mais c’est dans un trou à Verdun Que j’ai connu mon petit copain. Comme l’amitié réchauffe le cœur ! On se déride; on n’a plus peur. Et dans la boue de Verdun Nous nous sommes serrés la main. Prends mon bidon, un coup de pinard, Rien de meilleur contre le cafard. Et pourquoi conserver ces biens, Puisque nous tous mourrons demain. Et puis ensuite nos retrouvailles Devant ta maison près du café. On discutait de nos batailles Et des copains qu’on a laissés. Toujours dans notre petite causette: Souville, Douaumont et La Caillette. Mais je voyais dans tes yeux bleus, Comme un reflet des cieux. Tu es parti de bon matin, Sachant bien sûr, l’étape dure. Et puis quand on pense aller loin, Il faut ménager sa monture. Mais partant pour l’éternité Au pays de l’égalité, Tu aurais dû comme à Verdun, Mon petit copain, me serrer la main. Mais dis-lui bien, à Dieu le Père, Puisque Verdun fut un enfer, Qu’il te réserve au paradis Une place pour toi et tes amis, Et tous les combattants de la terre. Une prière: honnie la guerre, Et tous, nous nous serrerons la main, En bons copains, en vrai copains. _________________
AUTEUR ANONYME
Ah ! Comment ils ont fait, qui donc pourrait le dire ? Tant de héros sont morts, qui ne parleront pas ; Tant d’autres garderont, muets, jusqu’au trépas, L’insondable secret du glorieux martyre !
Six mois dans un enfer qu’on ne saurait décrire, Ils ont lutté, souffert, tombant à chaque pas Au fond des trous creusés aux points où tu frappas, Prince, que leur fierté dédaignait de maudire… La haine ou bien l’orgueil, au souffle de Satan, Pour l’œuvre de mort fit du gorille un Titan : Et le marteau bondit, lourd, en ta main chétive.
Mais Joffre avait dit : « Non ! » De ses guerriers plus d’un, Revenant du combat, si l’on criait : « Qui vive ? » Au pied des murs croulant a répondu : « Verdun ! » _________________
Eugène PITHIOUX
Elle est, du vrai soldat, la parure et le signe. Elle veut dire : honneur, discipline, devoir Son prestige est intact et tel est son pouvoir, Qu’il n’existe chez nous plus enviable insigne.
Au feu, l’humble troupier en secret se l’assigne, Et brave tout danger s’il la peut entrevoir. Pour le chef valeureux qui la doit recevoir, C’est, au soir du succès, la récompense insigne.
Médaille militaire, objet de mon respect, À mon regard jamais ne deviendra suspect Qui t’aura méritée au cours de la bataille.
Petits ou grands, ceux-là sont tous de même taille, Généraux triomphants ou soldats dans le rang, Qui t’ont payée, un jour tragique, avec leur sang ! __________________
Henri de REIGIER
POUR LE JOUR DES MORTS
O vous qui, dans les plis déchirés du drapeau, Dormez en un linceul aux couleurs de la France, Vous qui, les yeux fermés, goûtez le grand silence Et, face à l’ennemi, mourûtes, le front haut ; Paix à vous que la guerre a frappée du fléau, Héroïque moisson d’audace et de vaillance ! Ce jour de souvenir, de deuil et d’espérance Est votre jour, inclinons nous. Ce jour est beau. A vous, fils belliqueux de la Patrie en armes, Nous n’apporterons pas de regrets et de larmes ; Devant vous nos genoux ne doivent pas plier. C’est debout qu’il convient de vous porter envie, Car, lorsque l’on repose à l’ombre du laurier, La Gloire fait la Mort plus belle que la vie. _________________
Henri de R1GIER
SALUT
Salut, ô premiers morts de nos premiers combats, Ô vous, tombés au seuil de la grande espérance Dont palpite le cœur ébloui de la France, Héros, je vous salue et ne vous pleure pas !
La Gloire vous a pris, pieuse, dans ses bras, Et d’un baiser d’amour sacre votre vaillance, Et la Victoire, avant que son vol ne s’élance, Posera ses pieds nus où marchèrent vos pas. Lorsque le Coq gaulois de son bec héroïque Aura crevé les yeux de l’Aigle germanique, Nous entendrons son chant vibrer au clair soleil :
Salut à vous, Héros, qui, d’une main hardie, Cueillerez le laurier triomphal et vermeil Pour l’offrir à l’autel sanglant de la Patrie ! _________________
Emile VERHAEREN
LA PATRIE AUX SOLDATS MORTS
Vous ne reverrez plus les monts, les bois, la terre, Beaux yeux de mes soldats qui n'aviez que vingt ans Et qui êtes tombés, en ce dernier printemps, Où plus que jamais douce apparut la lumière.
On n'osait plus songer aux champs d'or Que l'aube revêtait de sa gloire irisée ; La guerre occupait tout de sa sombre pensée Quand, au fond des hameaux, on apprit votre mort.
Hélas ! où sont vos corps jeunes, puissants et fous, Où, vos bras et vos mains et les gestes superbes Qu'avec la grande faux vous faisiez dans les herbes ? Hélas ! La nuit immense est descendue en vous.
Vos mères ont pleuré dans la chaumière close : Vos amantes ont dit leur peine aux gens des bourgs ; On a parlé de vous tristement, tous les jours, Et puis un soir d'automne on parla d'autre chose.
Mais je ne veux pas, Moi, qu'on voile vos noms clairs, Vous qui dormez là-bas dans un sol de bataille Où s'enfoncent encor les blocs de la mitraille, Quand de nouveaux combats opposent leurs éclairs.
Je recueille en mon coeur votre gloire meurtrie, Je renverse sur vous les feux de mes flambeaux Et je monte la garde autour de vos tombeaux, Moi qui suis l'avenir, parce que la Patrie. _________________
Baronne Aymar de MAULMONT
MÉLOPÉE DES MÈRES
Dormez, pauvres petits, dans vos berceaux funèbres, Dormez, ensevelis dans vos glorieux drapeaux, Et si vous y restez, tout petits pour vos mères, Pour la patrie vous êtes grands et beaux.
Vous rêviez, tout enfant, de défendre la France ; Vos jouets préférés étaient sabres, fusils, Vos jeux plus favoris simulaient la revanche ; Vous disposiez déjà, seuls, de vos jeunes vies.
Quand l'heure est arrivée, que de jour ou de nuit Il a fallu partir, vous êtes devenus D’invincibles héros, en face l'ennemi Qui surpris, étonne, s'enfuit a votre vue.
Mais se ressaisissant, il fondit, tel un monstre, Et s'abattit sur vous, cruel en son courroux, Vous faisant payer cher l'admiration du monde, Déshonorant son nom pour se venger de vous.
Mais vous l'avez vaincu, en évoquant vos mères ; Nous avons entendu vos râles d'expirant. Ah ! nous avons pleuré, mais sommes restées fières De nos petits soldats morts en nous appelant
Dormez ! nous vous berçons le soir quand la nuit tombe Dormez ! sous les lauriers dont vos fronts restent ceints. Jusqu’au dernier soupir, nous veillerons vos tombes Et sentirons vos cœurs battre encore dans nos seins !
Invocation
Vous qui fîtes les cœurs des mères désolées Consolez-nous, mon dieu ! Et nous réunissez a nos fils bien aimes À nos morts glorieux.
_________________ La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André Laugier)
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| | | Flamme Admin
Messages : 5239 Date d'inscription : 04/01/2011 Age : 76 Localisation : Près Bordeaux
| Sujet: Re: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 Ven 9 Nov - 19:02 | |
| UN RÊVE de Y. CHODZKO me plait beaucoup ! Quelques frissons à la fin pour l'avoir bien apprécié ! Rimbaud et Hugo magnifiques et connus ! Merci pour ces poèmes sur la guerre ! _________________ | |
| | | André Laugier
Messages : 7152 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 81 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 Ven 9 Nov - 19:40 | |
| - Flamme a écrit:
UN RÊVE de Y. CHODZKO me plait beaucoup ! Quelques frissons à la fin pour l'avoir bien apprécié !
Rimbaud et Hugo magnifiques et connus !
Merci pour ces poèmes sur la guerre ! Bonsoir FLAMME,
Nous avons tous un grand-père, un arrière-grand-père, un grand-oncle ou un grand cousin combattant ou mort lors de la Grande guerre. Rendre aussi aux fusillés leur place, entière, sans tache, à côté de leurs camarades.
On devrait faire lire dans les écoles GENEVOIX, BARBUSSE, PERGAUD, DORGELES, CENDRARS, et tant d’autres ! Ces citoyens de 1914 qui pensaient justifier leur souffrance et leur malheur par ce beau concept, "la der des ders", par l’héritage de paix qu’ils laisseraient, ces femmes qui guettaient le garde champêtre ou monsieur le maire porteurs de mauvaises nouvelles, ce sont eux.
J'ai pensé, à l'occasion de ce "centenaire", qu'il était approprié de lire, relire ou découvrir quelques poèmes d'exception d'auteurs connus ou simple poilus, dont les mots sont chargés par toutes les émotions et la tragédie qu'ils véhiculent. C'est toute la barbarie que ces poètes exposent, refusant de soumettre le destin du monde aux lois ignobles de la guerre, de la haine et de la misère.
pour ta lecture et ton partage, FLAMME.
NOS PLUS CHALEUREUX
_________________ La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André Laugier)
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| | | André Laugier
Messages : 7152 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 81 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 Ven 9 Nov - 19:56 | |
| Jules PECH
LES MUGUETS D'ARGONNE Les muguets sont fleuris mignonne, C’est ton parfum aimé, je crois, Aussi ma lettre cette fois Vient t’offrir les muguets d’Argonne. Dans mon cœur leur clochette sonne Le temps si joli d’autrefois ; Plus j’y songe et mieux je perçois Ce doux parfum sur ta personne ! Gentille clochette de mai Dis-lui ce temps où je l’aimai Afin que toujours et de même, En te voyant près de son cœur, Comme au temps de notre bonheur Elle sache combien je l’aime. __________________
HERKA, (du 7ème d’Infanterie)
CE SONT LES POILUS DE L'ARGONNE Ce sont les Poilus de l’Argonne De Bolante et des Meurissons Souriants, quand le canon tonne Ce sont les Poilus de l’Argonne Qui savent se battre en chansons. Ce sont les Poilus de l’Argone Quand à l’assaut nous les lançons Le « Boche » sait que l’heure sonne ; Leur courage fameux lui donne A l’avance le grand frisson ; Le canon scande de ses sons Les refrains que leur cœur entonne ; Ce sont les Poilus de l’Argonne Qui savent se battre en chansons. Ce sont les Poilus de l’Argonne De Bolante et des Meurissons. Les airs de moderne Gorgone Que leur Kaiser en vain se donne Touchent leur cœur moins qu’un glaçon Ils en feraient plusieurs tronçons D’un simple coup de leur dragonne. Ce sont les Poilus de l’Argonne Qui savent se battre en chansons. Ce sont les Poilus de l’Argonne De Bolante et des Meurissons Souriants quand le canon tonne Ce sont les Poilus de l’Argonne Qui savent se battre en chansons _________________
René MARTIN
NOS MOINEAUX Une grande volée d’insouciants moineaux Est venue se poser en dépit de la guerre En un coin trop fameux où règnent les fléaux Déchaînés par les boches en un beau coin de terre. Ils savaient bien, pourtant, les pauvres oiselets Que les grands vents d’Argonne emportent la mitraille, Que les maisons meurtries où pendant les volets Sont vides d’habitants qui couchent sur la paille. Et cependant, joyeux, ils sont demeurés là, Chantant des ritournelles au sortir des tranchées, Réconfortant un peu les poilus qui sont las Bref, ces petits oiseaux nous avaient enchantés. Mais, il suffit hélas, d’un criminel obus Pour que ceux qui avaient soulagé nos souffrances Soient pleurés de nous tous, pourtant rudes poilus Et ne puissent avec nous chanter la délivrance. Souvenir d’Argonne (1915) __________________
Maurice BOIGEY
FLEURS D'ARGONNE Un jour en février, dans la forêt d’Argonne, Je vis d’étranges fleurs, au bord de mon chemin. Je vous les envoyai, dans le secret dessein De rappeler l’amour que mon cœur emprisonne. Vous m’avez répondu par d’autres fleurs, mignonne, Et vous vous étonniez qu’en ce pays lorrain, Puisse éclore une fleur, puisque chaque matin, Il gèle, il neige et que de froid l’arbre frissonne. Pourquoi la fleur d’Argonne, au cours de cet hiver, A-t-elle devancé cette fleur, qu’hier Je recevais, chère âme, et qui venait de Nice ? L’une, de nos héros, buvait le sang vermeil Pour rajeunir sa tige et gorger son calice, Et l’autre, pour fleurir, n’avait que le soleil. __________________
_________________ La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André Laugier)
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| | | André Laugier
Messages : 7152 Date d'inscription : 25/01/2015 Age : 81 Localisation : Marseille
| Sujet: Re: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 Dim 11 Nov - 12:05 | |
| Charles PEGUY
Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre Heureux ceux qui sont morts d'une mort solennelle. Heureux ceux qui sont morts dans les grandes batailles Couchés dessus le sol à la face de Dieu Heureux ceux qui sont morts sur un dernier haut lieu Parmi tout l'appareil des grandes funérailles Heureux ceux qui sont morts pour des cités charnelles Car elles sont le corps de la cité de Dieu Heureux ceux qui sont morts pour leur âtre et leur feu Et les pauvres honneurs des maisons paternelles Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournés Dans la première argile et la première terre Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés _________________
A. RAMEAU
LA BALLADE DES POILUS Ce sont les poilus de l’Argonne, La pipe au bec et les yeux fous, Et dont l’allure vous étonne ! Ils viennent d’où l’on se tamponne. Ce sont les poilus de l’Argonne, Tous plus maigres que des coucous, Sous leurs haillons couverts de poux, Et souriant sous leurs poils roux. Ce sont les poilus de l’Argonne, La bouffarde au bec, les yeux fous ! Ce sont les poilus de l’Argonne, Renfrognés comme des hiboux ; Mais, au fond de leur âme chantonne Avec le cuivre qui claironne. Ce sont les poilus de l’Argonne, De gloire leurs vieux cœurs sont saouls ! Leurs flingos, précieux joujoux, Seuls leur font faire les yeux doux. Ce sont les poilus de l’Argonne, Renfrognés comme des hiboux ! Ce sont les poilus de l’Argonne, Qui vont se battre en casse-cou ; Leur œil est vif, leur front rayonne. La mitraille les environne, Ce sont les poilus de l’Argonne. « Tant mieux ! nous ferons des jaloux, « Tout le boulot sera pour nous ; « Ca va, crient-ils, c’est dans nos goûts ! » Ce sont les poilus de l’Argonne, Qui vont se battre en casse-cou. Ce sont les poilus de l’Argonne, Peuples, qui vont mourir pour vous ! Ils vont, sous le canon qui tonne, Ecraser la horde teutonne. Ce sont les poilus de l’Argonne, Et courant au-devant des coups, Ils vont déterrer de leurs trous, La louve germaine et ses loups ! Ce sont les poilus de l’Argonne, Peuples, qui vont mourir pour vous ! _________________
A. BOUILLY
AUX CHÊNES DE L’ARGONNE Robustes chênes séculaires De l’Argonne aux talus à pic, Vous avez bravé les colères Et les menaces de Brunswick ; Vous avez vu ses loups par bandes Sortant des forêts allemandes, Ouvrant leurs gueules toutes grandes Et ravageant notre pays ; Vous avez vu nos fiers ancêtres Qui prétendaient vivre sans maîtres, Refouler ces odieux êtres Des territoires envahis. Ces hideux loups à face humaine Vous les voyez comme autrefois, Plus que jamais brûlant de haine, Se déchaîner parmi vos bois. Monstres fous à qui la science, La piété, la conscience, Donnent bien plus de malfaisance Qu’aux naturels et simples loups, Puisque le nouveau fauve égorge Pour égorger, de tout se gorge, Et veut, au nom de Dieu qu’il forge, Asservir le monde à se goûts ! Vieux chênes au grave murmure Où les Gaulois croyaient ouïr L’âme de la grande Nature Travaillant à s’épanouir, Que votre âme avec votre sève, Avec la force de son rêve, Avec l’élan qui vous soulève, Toujours passe en nos défenseurs Afin que l’esprit de leurs pères Revive en leurs saintes colères Et chasse de nos forêts chères Les sauvages envahisseurs ! Quand le printemps et son mirage Rendront l’espoir à notre cœur, Laissez tomber votre feuillage En vertes couronnes d’honneur Sur les fosses de ces victimes, Morts pour les tâches légitimes ! Aux vivants, par vos fermes trônes, Enseignez les longues constances, Des héroïques résistances Qui sauveront nos espérances Et mettront la gloire à nos fronts ! _________________
Georges LIONNAIS
MONTFAUCON D’ARGONNE Dans l’histoire immortelle, où revit le passé, Une seconde fois ton nom se voit tracé, Parmi d’autres aussi de la terre meusienne, Du vieux sol des Gaulois glorieuse gardienne ! J’aimais, par les temps clairs, à laisser, sans arrêt, Ma vue émerveillée, au-delà des forêts, Scruter dans le lointain, par-dessus les campagnes, Pour y voir apparaître au seuil de la Champagne, Dans la brume, très lointain, le profil imposant De ce saint sanctuaire, à l’aspect séduisant, Joyau de l’art français qu’ont brûlé les vandales Pendant que leurs blessés gémissaient sur les dalles !… Souviens toi du passé ! Des pirates normands, Ces dignes précurseurs des soudards allemands, Qui, venus pour piller ta riche basilique, Renfermant maints trésors et de saintes reliques, Furent anéantis, au pied de ton coteau Que dominait, alors, ton antique château ! Les hordes du Kaiser, reculant en déroute, Ont fait de ta colline une forte redoute ; Mais l’heure va sonner ! Déjà nos bataillons, Parmi tes ravisseurs ont creusé des sillons Où le sang coule à flots…Ni les flammes d’essence, Ni les vapeurs de chlore – armes de l’impuissance Ne pourront arrêter l’élan de nos troupiers Quand il faudra sortir les Boches des terriers. __________________
Rita Del NOIRAM
PRO PATRIA
C'est un fils du soleil, un enfant de Provence, Et sa taille bien prise comme un jeune aubépin, Oeil de jais, teint bronzé sous le béret alpin, Habile aux jeux d'amour, prompt à venger l'offense. Sur la Marne, choc rude ! Il faut garder l'avance, L'orchestre bavarois fait rage ce matin ; Dans l'ombre des taillis, au repli du chemin, La Mort s'embusque et rode en traitre connivence. Tel un éphèbe grec, au jour du Marathon, Le chasseur est tombé sous un obus teuton, La soif le brûle... et rien ne peut calmer sa fièvre. Mais stoïque il s'endort du suprême sommeil, Car son rêve croit voir, dans un halo vermeil, La victoire en chantant, le baiser sur la lèvre. __________________
Mathilde MAYEN
LA FRANCE AUX MORTS
Vous êtes morts pour que mon jour de gloire arrive Et soit l'aube d'un temps nouveau ; Pour que, toujours plus grande et plus belle, je vive Levant plus haut toujours mon immortel flambeau. Votre sang a sauvé l'avenir d'une race... Dormez sans nuls tressaillements, Sous mes ceps champenois et mes sapins d'Alsace, Et sous l'or onduleux de mes grands blés flamands ! O mes sacrifiés, dormez dans l'assurance Que les vôtres seront heureux. Vous êtes morts pour moi, je m'appelle la France, Je suis deux fois leur mère et veillerai sur eux ! Dormez ! Pour vos petits j'aurai des nids encore. Je les y réchaufferai tous, Et tous retrouveront des sourires d'aurore En sentant sur leurs fronts mes longs baisers très doux ! Dormez ! Ils grandiront, vos fils, sous mon égide, Bercés par votre souvenir ! Je serai leur tendresse et je serai leur guide, Comme ils sont, je le sais, eux tous, mon avenir ! Dormez ! Je soutiendrai toutes les pauvres femmes Que vous laissez sur le chemin, La France en fait serment, ô fières grandes âmes, Celles que vous aimiez ne tendront pas la main ! O martyrs ! Ouvriers de cette délivrance Qu'appelaient les peuples unis. Dormez, mes fils ! Je suis votre mère la France, J'étends sur vous mon aile immense et vous bénis. __________________
ANDRE-BELLOT
LA COURONNE
Là-bas, au champ d'honneur, il avait dû tomber, Blessé grièvement, il vient de succomber, Le major, bien souvent, examinant ce brave, En secouant la tête, il répétait : C'est grave ! Déjà, dans le jardin, le char funèbre attend Ce sublime héros, cet ardent combattant, Aux abords de l'hospice et jusques à la grille, La foule au fantassin, lui tient lieu de famille, Ah ! quel recueillement ! chacun verse des pleurs ! Sur le char, on a mis le drap aux trois couleurs. Dans cette foule émue, où chaque âme frissonne, Une d'elles aperçoit le char nu, sans couronne. Vos aïeules, jadis, livrèrent des combats, Devant vous, je m'incline et je dis : « Chapeau bas ! Dans votre dévouement, vous bravâtes la peste, Femme de Marseille, humble et toujours modeste Et, celle que je chante au cœur noble ignoré, Surgit subitement, dans un groupe éploré. Son regard ne pouvait voir ce char sans couronne ; Ce luxe, à cet enfant, il faut qu'on le lui donne ! Et soudain, relevant les coins du tablier, Sans penser au refus, qui peut l'humilier, D'un pas ferme, elle part, avec cette sébille, Quêtant dans tous les rangs de la foule immobile ! « Donnez, mes bons amis ! donnez un petit sou, « C'est pour une couronne à ce brave pioupiou ! Tandis qu'à ce héros, on présente les armes, La foule émue a peine à retenir ses larmes, Cette couronne, avec son ruban violet, Donne, à cette heure triste, encore un gai reflet, Sur cet emblème, on lit : “Aux morts pour la Patrie” ! Derrière le convoi, la foule pleure et prie. __________________
Joseph Marius Antoine DELORT - sergent du 173e RI - (1894-1916)
MORT POUR LA PATRIE
Il est tombé devant Verdun, un soir d'avril, Et dans la plaine fauve, où le Boche se terre, Son corps est étendu, qui frémissait naguère : Mais je gage qu'il tient encore son fusil !
Il est mort ! mais son geste est toujours menaçant, Sur son visage pâle on ne lit pas la crainte ; On sent qu'il est tombé sans un cri, sans une plainte, Et qu'il a, sans regret, donné son jeune sang !
Il aimait sa patrie et son petit village... Ses aïeux, ses parents, ses amis, son langage... Il les a défendus au moment opportun...
C'est pour eux qu'il est mort, pour eux que, dans la plaine, De son corps menaçant encore plein de haine, Il barre aux Allemands la route de Verdun ! __________________
ANONYME
LES LARMES DU DRAPEAU
J'ai longuement flotté sur les champs de bataille, Résistant bravement aux coups de la mitraille ; Maintes fois ma voilure épongea dans le vent Le sang des soldats morts, les pleurs des survivants.
Au sommet du pays je dressais mes couleurs, Témoignage vibrant de la Foi, de l' Honneur. Les anciens devant moi soulevaient leur chapeau, Qu'y-a-t' il de plus beau que l'amour d'un drapeau ?
Mais la honte survint par un soir gris d'hiver : Ma hampe fut brisée par des mains étrangères. Lacérés, mes beaux plis sanglotaient en silence En voyant que ces doigts s'attaquaient à la France.
Devant la foule haineuse, on me jeta à terre. Un instant je pensais : "nous sommes donc en guerre !" Mais en guerre un étendard a ses défenseurs, Ici nul n'accourut pour calmer ma douleur !
Les uniformes bleus trépignaient de colère, Mais leur chef, tout là-haut, préservant sa carrière, Me laissa sans mot dire aux mains de mes bourreaux : Je mourus sans qu'une arme quitte son fourreau.
Ce soir je regrettais de porter ces couleurs, Car une part de la France est morte dans mes pleurs. Quand mon pays me laisse ainsi succomber, seul, Je ne suis plus drapeau, mais je deviens linceul. __________________
G. Matt DE KER
LES HONNEURS DEVANT LES SÉPULTURES
Clairons veuillez sonner "Aux Morts" En ce très nouveau cimetière Qu'entourent les tranchées ou forts Concélébrant stars et lumières Pour saluer tous les Poilus Siégeant aux côtés de Jésus
Dormez en paix bien chers soldats Et grand honneur de la fratrie Vous remerciant pour ces combats Dont se souviendra la Patrie Qui vous devant sa liberté A tous en dira la beauté
Les canons tonnent et sur le front Nos assauts bravent la mitraille Chacun s'est engagé à fond Pour terminer cette bataille Qui verra enfin trois couleurs Flotter très haut couvrant de fleurs Vos tombes Et tous vos souvenirs __________________
Marcelle DAVET-DUTEMPS (1886-1968)
LA VICTOIRE
La Victoire a chanté l’hymne de la délivrance. Elle a couru les vals, les plaines et les monts. Sa grande aile a passé sur la terre de France... La Victoire a chanté jusqu'au creux des sillons.
Elle a vibré dans l’air ainsi qu’une fanfare, A sa voix sont partis tous les oiseaux de mort. Elle a fait fuir au loin la cohorte barbare... La Victoire a plané d’un merveilleux essor.
Elle a pris par la main sa noble sœur: la Gloire ! Et la Gloire a baisé le front de nos soldats. Ainsi, vers chacun d’eux s’est penchée la Victoire... Elle a mis un frisson dans le cœur de nos gars.
La Victoire a brillé dans les beaux yeux des femmes, Le long des clairs berceaux elle a mis un espoir. Les mères l’ont sentie passer jusqu’en leur âme... Les vierges ont souri dans la douceur du soir.
Puis, dans le vaste ciel ouvrant ses larges ailes, Au-dessus d’humbles croix... au-dessus des tombeaux... Comme pour réveiller leurs âmes immortelles, La Victoire a chanté la chanson des Héros !... _________________
_________________ La poésie se nourrit aux sources de la prose et s'embellit au concerto des mots. (André Laugier)
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| Sujet: Re: COMMÉMORATION DU CENTENAIRE DE LA GRANDE GUERRE 1914-1918 | |
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