L'inspecteur n'est pas au bout de ses peines 14

L’inspecteur n’est pas au bout de ses peines 14,
L’interrogatoire avait duré plus de dix heures non-stop. Les policiers étaient épuisés mais plus que ravis. Ils avaient arrachés les aveux sans violence, sans brutalité, à la force de leur sueur et de leur grande psychologie humaine. Ils n’avaient plus qu’à remercier la psychothérapeute pour le soutien apporté par sa présence dans le bureau. Mine de rien, elle les avait aidé par des regards sous-entendus, des petites notes échangées, des gestes amicaux et bienveillants vis-à-vis du prévenu. Elle l’avait rassuré à plusieurs reprises pendant l’audition. Elle lui porta même un grand verre d’eau pour se désaltérer. A aucun moment, elle n’avait pris position ni n’était intervenue dans l’audition. Elle avait laissé faire les policiers. Tout s’était déroulé dans le calme et la patience avait fini par payer. Le serial killer avait été traité comme un individu normal et il s’était délivré en toute confiance. Les policiers pouvaient s’enorgueillir de leur réussite. Ils savaient qu’ils avaient gagné une bataille mais que la chasse continuait : c’était leur métier et ils le faisaient avec passion et grande détermination. Un énorme poids était tombé de leurs épaules. Ils firent signer la déposition au prévenu et le firent ramener en cellule manu militari. Désormais seuls, ils pouvaient se congratuler mutuellement : ils avaient fait un travail de longue haleine et la fatigue avait fait le reste.
Ils saluèrent chaleureusement la psychothérapeute et la raccompagnèrent à sa voiture. Elle avait décliné l’offre de boire un petit verre avec eux.
Ils pouvaient désormais laisser éclater leur joie en toute quiétude. Ils rangèrent le bureau vite fait. Il était grand temps pour eux d’aller boire ce verre au bistrot du coin, en espérant qu’à cette heure tardive il fut encore ouvert. Ils allaient se mettre minables pour une fois : ils l’avaient bien mérité !
Le commissaire était aux anges. Grâce à son collègue, il avait éclairci cette grosse enquête : deux ans de recherche et de chasse à l’homme. Il pourrait désormais dormir sur ses deux oreilles et ne plus faire de cauchemars la nuit. Cependant, il fallait qu’il modernise ses services et qu’il prenne en compte plus efficacement les renseignements récoltés par les autres districts. Il lui fallait établir un relais efficace pour éviter ce genre de bavure : des victimes auraient pu être épargnées et le serial killer interpellé avant qu’il ne fit trop de dégâts. Ils téléphonèrent au procureur pour l’avertir de la saisie du serial killer et de ses aveux. Puis ils appelèrent un avocat pour le présumé coupable : il en aurait grandement besoin.
Pour l’heure, le café étant encore ouvert, ils s’installèrent au comptoir et commandèrent un bourbon. Leur service était fini pour ce soir, ils pouvaient se le permettre. Et ils reprirent leur conversation comme ils l’avaient laissé la veille à parler des festivités de la région, sa gastronomie, ses monuments historiques, ces parcs verdoyants, ces petits bistrots à l’ancienne, ces églises réputées, ses ruelles cachées, les vieux quartiers, les petits ragots aussi …
L’inspecteur commençait à avoir faim. Alors d’un commun accord, ils commandèrent un repas frugal : une omelette aux truffes avec sa salade verte ferait l’affaire, accompagnée d’un bon vin du pays et d’une belle part de tarte au citron meringuée. Le verre terminé, ils s’installèrent dans l’arrière salle du bistro pour s’y restaurer tranquillement. C’était le commissaire qui régalait alors l’inspecteur y alla d’un bon coup de fourchette. Enfin pour les deux hommes un succulent repas tranquille qui n’était pas dérangé par un coup de fil inopportun. Ils avaient le champ libre pour la nuit et ils comptaient bien en profiter un maximum.
L’inspecteur était en pleine forme maintenant que la pression de l’interrogatoire était tombée. Enfin il était arrivé au bout de ses peines et comptait bien profiter de quelques jours supplémentaires pour visiter la région et papoter avec l’habitant comme un simple touriste. Il n’était pas pressé de rejoindre son bureau minable et la ville béton.
Lucienne le 23.03.2016