L'inspecteur reprend du service 12

L’inspecteur reprend du service 12,
Après avoir quitté la jeune femme, l’inspecteur pressa le pas dans les ruelles sombres et balayées par le vent frais : il n’aimait pas trop s’y trouver seul. L’air vif le ragaillardit et il arriva sans encombre à son bureau. Il se dévêtit rapidement, rangea le chapeau dans sa boîte et posa les documents sur son bureau pour les examiner. Il commença par le courrier et n’y trouva rien qui puisse l’aider dans son enquête : le jardinier n’était pas très disert.  Il échangeait des banalités sur la propriété et le parc abîmé par la tempête de l’hiver, les rosiers gelés par la neige, quelques arbres arrachés par le vent violent, etcetera. Par contre, les documents familiaux lui en dire plus sur la famille de Serreville. Ils étaient originaires de la région depuis des générations et possédaient un autre bien immobilier au Pays Basque. Tout ceci confirmait bien les dires de sa cliente. Il était là de son inspection quand le téléphone sonna. Il sursauta, surpris et quelque peu énervé de recevoir un appel si tardif : il était déjà vingt-trois heures et la fatigue de cette rude journée se faisant sentir, le sommeil le gagnait déjà. Mécontent, il décrocha le combiné et formula un « Allo » sec et brutal mais son ton se radoucit vite à la voix de son interlocuteur. C’était son agent resté sur les lieux avec l’équipe cynophile qui l’appelait en urgence : ils avaient trouvé un autre cadavre enseveli sous les massifs de rosiers, lardé de coups de couteau, ligoté et bâillonné, entièrement dévêtu. Qui cela pouvait-il être et que lui réservait encore cette immense propriété ? Il pensait avoir bouclé l’affaire mais cela se compliquait. Il espérait que le médecin légiste fut encore sur place mais il était reparti à son laboratoire. Il le rappela donc et se donnèrent rendez-vous au domaine dans la demi-heure qui suivit : l’inspecteur n’était pas au bout de ses surprises. A n’en pas douter, sa nuit serait plus longue que sa journée éprouvante.
Arrivés sur les lieux pratiquement en même temps, les deux hommes se dirigèrent immédiatement vers le petit monticule de terre où reposait le corps. Et ils furent sidérés par la physionomie du cadavre qui correspondait trait pour trait au jardinier : mais ce ne pouvait-être possible puisqu’ils l’avaient vu en vie dans l’après-midi. Ce pouvait-il qu’ils aient commis une bavure ? L’inspecteur voulut en avoir le cœur net et se dirigea rapidement, accompagné de ses hommes, vers l’appentis. Il était vide de tout occupant ! Il pensait encore le trouver dans la maison mais il n’y avait personne : qu’est-ce que cela voulait dire ? L’inspecteur commença à avoir des nausées. Le manque de sommeil et ces rebondissements le mettaient mal à l’aise : se pouvait-il que l’homme de l’appentis ne fut pas le jardinier de la maison mais un comparse du couple ? Que tout ceci fut une mise en scène criminelle pour égarer les soupçons ? L’inspecteur examina la demeure de fond en comble, sans succès. Pendant que le médecin s’occupait d’examiner le nouveau cadavre, la brigade cynophile réinspectait minutieusement le parc et ses dépendances. Le policier voulait être sûr de n’y pas trouver un autre corps : à croire que cette propriété ancestrale fut un cimetière !
Mais les maîtres-chiens ne trouvèrent rien d’autre que des ossements d’animaux enterrés par-ci par-là : sans doute les chiens de la maison.
L’inspecteur fit un rapide briefing avec ses hommes et le médecin et il décida, malgré l’heure tardive, d’appeler le Procureur de la République pour obtenir un mandat d’arrêt  et mettre en branle interpol afin de rechercher l’homme de l’appentis. Il devenait urgent de le retrouver avant qu’il ne nuise encore à d’autres personnes. Puis il téléphona au GIGN pour mettre sous haute protection mademoiselle de Serreville. Elle courait un grave danger et il ne voulait pas être responsable d’une victime de plus.
Ceci étant fait, il quitta les lieux avec appréhension, celle d’apprendre une autre nouvelle désagréable et qui enlèverait toute crédibilité à son flair reconnu de fin limier. Sa réputation lui tenait à cœur et il ne voulait pas perdre ses éventuels et prochains clients : c’était une question d’honneur…
Lucienne le 07.02.2016