L'inspecteur reprend du service 8

L’inspecteur reprend du service 8,
Il appela son supérieur hiérarchique pour l’informer de l’affaire et de ses rebondissements. Il avertit ensuite le préfet et le Procureur de la République qui lui donnèrent le feu vert pour faire intervenir le GIPN. Il se devait de prendre un maximum de précautions pour interpeler le couple, sans coup férir si possible. Puis, il dépêcha une voiture de la PJ pour se rendre sur les lieux.
Quand il arriva sur place, les époux avaient été appréhendés par les forces de l’ordre, la propriété balisée et le médecin-légiste l’attendait de pied ferme. Le corps de la victime avait été exhumé et reposait sous un drap blanc. Mais l’inspecteur fut surpris et dubitatif : il ne lui semblait pas que ce fût celui du jardinier. D’après la description de Mademoiselle de Serreville, il aurait dû trouver un homme d’une soixantaine d’année, de type caucasien, très grand et musclé, la peau hâlée par son travail de plein air. Au lieu de cela, il avait devant lui un homme d’une quarantaine d’années tout au plus de petite taille, de type asiatique et quelque peu chétif. A première vue, il était mort par arme blanche, des coups portés sous la jugulaire et dans le dos. A n’en pas douter, il avait été frappé par surprise car il ne voyait aucune blessure de défense. Mais le médecin diligenté sur place lui en dirait plus à l’autopsie. Selon les dires de la jeune femme, il pourrait s’agir du majordome.
L’affaire prenait de l’ampleur. L’inspecteur avait maintenant un cadavre à identifier et une disparition inquiétante. Avec ses acolytes, il fit rapidement le tour de la propriété et s’arrêta devant l’appentis du jardinier. Il trouva étonnant qu’il ne fût pas fermé à clé. Avant de pénétrer dans les lieux, il jeta un coup d’œil par la petite lucarne et ne vit rien de particulier, à part un grand désordre et une lampe de chevet allumée dans le coin de la pièce : tout le reste était sombre et silencieux.
Après avoir tapé selon l’usage et s’être présenté sans recevoir de réponse, Il s’avança prudemment sur le seuil et ce qu’il vit le stupéfia !
La pièce était sens dessus dessous. Des meubles avaient été renversés, des bibelots cassés, des papiers éparpillés… Une odeur de renfermé le saisit au nez. Des reliefs de repas jonchaient le carrelage crasseux, de la vaisselle de plusieurs semaines attendait, empilée à la va-vite dans l’évier de la kitchenette. Tout cela ne ressemblait pas au portrait décrit par la jeune femme : son jardinier était très propre et méticuleux ; il ne supportait aucun papier sur la pelouse ni même une branche cassée ou fanée dans le jardin. II inspecta la maisonnée minutieusement et au moment d’entrer dans la chambre, une forte odeur de chloroforme le fit suffoquer. Il chercha l’interrupteur à tâtons pour éclairer la pièce noire et ce qu’il découvrit le laissa pantois. Le jardinier était sur son lit, bâillonné et ligoté ; il semblait à l’agonie : seul son regard trouble et affolé disait son désarroi et sa terreur. L’inspecteur fit diligence pour le libérer, appela à la rescousse le médecin pour qu’il le soigna rapidement et attendit que l’homme retrouva ses esprits avant de l’interroger. Il était très affaibli, pâle et comme anesthésié. Il semblait amaigri et avait des difficultés à parler. De toute évidence, l’homme était en état de choc et il fallut au docteur énormément de temps et de patience pour le rassurer.
Au bout de plus de trois heures de soins et de surveillance, il put s’assoir dans le lit et commencer à raconter à l’inspecteur ses longs mois de calvaire, de privations et de tortures commises par le couple pervers sur sa personne.
Son histoire était dantesque et semblait très décousue mais étant donné son état physique et psychologique, l’inspecteur comprit qu’il lui faudrait attendre encore son plein rétablissement. Il lui proposa une collation, suivi d’un petit noir très fort pour le remettre sur pieds plus rapidement. Il le laissa entre les mains compétentes du médecin et se rendit à la grande demeure pour interroger les prévenus. Il espérait maintenant des explications sur ce droit de propriété bafoué et cette prise d’otage : il emploierait la force si nécessaire…
Lucienne le 06.02.2016