Les vacances de l'inspecteur 1

Les vacances de l’inspecteur,
 L’inspecteur divisionnaire était enfin en vacance. Il avait choisi comme lieu de villégiature un petit village de campagne, isolé de la grande métropole et où il ne s’y passe jamais rien. Il avait gardé sa vieille Renault 8 Gordini rouge des années soixante et il traçait sur les petits chemins, sifflant un refrain, trop content de se trouver loin des foules et des villes. Il était heureux comme un poisson dans l’eau.
Mais le temps n’était pas de la partie : le ciel était gris et bas, des bourrasques de vent soulevaient la voiture et des voiles de brouillard tombaient en paquets sur la route, l’obligeant à modérer sa vitesse : ce n’était pas le moment de tomber en panne d’essence ni mécanique. Les yeux vissés sur le parebrise, il avançait doucement, à la recherche d’un abri pour se dégourdir les jambes. La marche lui ferait grand bien. Il se gara à côté d’un bouquet d’arbre un instant.
Il descendit du véhicule et, dans l’ombre du soir, visita les alentours : c’était plus fort que lui, son flair de policier n’était jamais bien loin.
Au détour d’une sente, il aperçut un amoncellement hétéroclite de feuilles, de planches en bois, de tôles  et d’humus incongrus : avec le souffle du vent, il aurait dû être essaimé en moins de deux . Avec la pointe du pied, il balaya l’amas et découvrit un … cadavre en parfait état de conservation.
L’ennui est qu’il n’avait pas pris sa lampe-torche et il n’y avait pas de lune ni d’étoile pour l’éclairer un peu mieux.
Dans le silence de la nuit, il regagna sa voiture au pas de course et appela de son portable les services de police concernés : cette fois, ce n’était pas de sa juridiction mais il comptait bien en savoir davantage,  métier oblige.
En attendant, il s’installa dans la voiture et ferma les yeux, se remémorant les souvenirs de ses jeunes années. Et il ne sut pourquoi mais le chant des Pinks Floyd, The Wall (le mur) lui revint en force à l’esprit : il aimait le fredonner quand son esprit commençait à réfléchir sur une affaire.
Même si cette dernière ne le concernait pas, il était certain qu’il allait s’y impliquer : il était le premier sur les lieux de la découverte du corps.
Pour l’heure, il se tenait en retrait, l’équipe policière était sur place et faisait les premières constatations de rigueur. Ils avaient gelé la scène du crime et bouclé le périmètre de sécurité : personne ne pourrait s’en approcher sans montrer patte blanche et bonne raison sauf cas d’urgence.
Mais l’inspecteur restait dubitatif : qui était ce cadavre, depuis quand reposait-il là et qui pouvait bien l’y avoir déposé ? En plein jour, il aurait forcément attiré les regards, ce monticule hétérogène : très mal enseveli, pensa-t-il, à croire que c’était fait exprès pour qu’il soit découvert rapidement.
Dès que son homologue aura fini son travail de recherche, il irait le voir pour se faire reconnaître et lui soumettre ses premières impressions.
Lucienne le 13.01.2016