PETIT LEXIQUE POÉTIQUE
L'ORGANISATION DES STROPHES
En s'appuyant sur l'organisation des
"strophes", en poésie, on peut distinguer les poèmes
monostrophiques, les
homostrophiques où un même schéma se répète, et les poèmes
hétérostrohiques, qui présentent divers schémas successifs.
On peut donc envisager les formes fixes dans une perspective achronique en proposant des typologies qui s'appuient sur des critères internes, tels que la combinatoire des strophes utilisées, ou la plus ou moins grande importance respective des facteurs formels et sémantiques.
1°) - POÈMES MONOSTROPHIQUES.
Exemple de poème monostrophique :
On trouve le rondel simple qui deviendra le triolet au XVIe siècle.
Sidonie a plus d'un amant,
C'est une chose bien connue
Qu'elle avoue, elle, fièrement.
Sidonie a plus d'un amant
Parce que, pour elle, être nue
Est son plus charmant vêtement.
C'est une chose bien connue,
Sidonie a plus d'un amant.
Charles CROS - Triolets fantaisistes.
Nous avons affaire, ci-dessus, à une
forme fixe minimale.
2°) - POÈMES HOMOSTROPHIQUES
Si, dans ce cas, une même strophe se répète, il faut signaler que, généralement, la fin du poème est marquée par un léger changement, tel que la présence d'une strophe plus longue ou plus courte, ou différents jeux sur les refrains.
C'est dans la villanelle, introduite à la Renaissance, et qui est encore en faveur au XIXe siècle. En effet, divisée en tercets, dont le nombre n'est pas fixé, elle est écrite sur deux rimes, le 1er et le 3e vers du premier tercet reparaissant tout à tout dans tout le poème et devenant alternativement le dernier vers de chaque tercet. Quant au dernier couplet, il est un quatrain de 2 vers suivi des deux vers répétés tout au long du poème.
Exemple de poème homostrophque :
Près de Marie-Antoinette,
Dans le petit Trianon,
Fûtes-vous bergerette ?
Vous a-t-on conté fleurette
Aux bords du nouveau Lignon,
Près de Marie-Antoinette ?
Des fleurs sur votre houlette,
Un surnom sur votre nom,
Fûtes-vous bergerette ?
Etiez-vous noble soubrette,
Comme Iris avec Junon,
Près de Marie-Antoinette ?
Pour déniaiser Ninette,
Pour idylliser Ninon,
Fûtes-vous bergerette ?
Au pauvre comme au poète,
Avez-vous jamais dit : Non,
Près de Marie-Antoinette ?
O marquise, sans aigrette,
Sans diamants, sans linon,
Fûtes-vous bergerette ?
Ah ! votre simple cornette
Aurait converti Zénon !
- Près de Marie-Antoinette,
fûtes-vous bergerette ?
Philoxène BOYER - La Marquise Aurore.
Il convient de citer, dans le cadre des poèmes
homostrophiques, le
vilerai et enfin l'
ode, du moins l'
ode horatienne, composée de
strophes identiques.
3°) - POÈMES HÉTÉROSTROPHIQUES
On rangera, dans cette catégorie, le rondeau marotique où
deux quintils encadrent un
tercet, et le sonnet où les
deux tercets succèdent à deux quatrains.
Ce qu'on peut retenir de ce classement, c'est la diversité des formes fixes et du rôle qu'y joue la strophe, ainsi que la nature particulière de la fin du texte qui se présente le plus souvent comme une rupture. Les formes fixes s'inscrivent, en effet, sur un continuum qui va de contraintes purement formelles (le rondeau), à une définition exclusivement sémantique (la complainte). Dans l'entre-deux, la plupart des formes fixes sont définies par l'un ou l'autre aspect. C'est le cas du sonnet qui repose à la fois sur un nombre de vers (14), une combinaison de rimes, et une tension ainsi qu'un déséquilibre entre des masses différentes.
Ce double principe de définition explique que les formes fixes soient moins rigides que leur dénomination ne le laisse supposer et qu'elles aient pu évoluer.